Fonds de tiroir
C'est une obsession (pas la seule, d'accord) de la droite : autoriser les magasins qui ne le peuvent pas (encore) à ouvrir le dimanche. Dernier épisode du feuilleton : le PLR valaisan Nantermod a déposé une motion pour l'autoriser aux commerces de proximité. Justifica-tion? ça s'inscrit dans une évolution sociale et le développement du travail du dimanche, et ça permet aux habitants des villages éloignés des centres de faire des achats de dernière minute. La commission compétente du Conseil national s'oppose à cette motion, mais sou-tient une initiative cantonale zuri-choise qui veut faire passer le nombre d'ouvertures dominicales annuelles autorisées de quatre à douze. Or on a déjà à la fermeture des magasins le dimanche tellement d'exceptions (les stations-service, les magasins des gares, les kiosques, les dépanneurs, la proximité des fêtes de fin d'année) que si on en rajoute encore, elles vont finir par devenir la norme, et qu'on ne se demandera plus quand les magazes pourront ouvrir le dimanche, mais quand ils ne pourront pas. Et puis, franche-ment, comment on faisait dans ce pays quand tous les magasins, sauf les boulangeries et les magasins de tabac-journaux, étaient fermés le dimanche? Ben, on faisait toutes ses courses le samedi. Autrement dit, on prévoyait. Faut croire que c'est désormais hors de portée. Même dans les villages éloignés des centres.
En juin 2024, sur mandat de «Charlie Hebdo» et de la Fondation Jean-Jaurès, l'IFOP réalisait un sondage sur la liberté d'expression, la manière dont on la conçoit, les limites qu'on y pose (ou n'y pose pas). Et les résultats sont passionnants, parce qu'ils bousculent parfois de solides idées solidement reçues. On se félicitera d'abord que 76% des personnes interrogées consi-dèrent la liberté d'expression comme «un droit fondamental». C'est 18 points de plus que douze ans aupara-vant, et c'est considérable. La même progression se constate quand on évoque le droit au blasphème: en 2024, 62% le reconnaissent, et c'est 12 points de plus qu'en 2019. Le plus intéressant, puisqu'on parle de blasphème, c'est d'examiner les réponses par catégories confessionnelles affirmées: Une majo-rité de catholiques (59%) et de musul-mans (53%) reconnaissent le droit au blasphème. En revanche, seule une minorité (47%) de protestants en font autant : là, ce sont les évangéliques qui pèsent... Peut-on rire de tout? Non: une moitié des personnes interrogées considèrent qu'on ne doit pas se moquer de ce que des gens considèrent comme constitutif de leur identé : la sexualité, la religion, l'origine ethni-que. Et si un petit tiers des personnes interrogées considèrent qu'on peut rire de la Shoah, ils ne sont que 17% des musulmans à partager cet avis... contre 32% des protestants. Mais 55% des personnes interrogées pensent que «Charlie» a eu raison de publier les caricatures de Muhammad. Et ce sont les sympathisants socialistes, à 81%, et vert, à 80%, qui défendent le plus le droit à la caricature, et au blasphème (à 72% dans les deux groupes). En revanche, seuls 63% des sympathisants de LFI défendent le droit à la caricature et 47% le droit au blasphème. On n'a pas connaissance d'un sondage comparable en Suisse, mais on peut supposer (seulement supposer...) que les chiffres ne doivent pas être très différents. Et que, donc, y'a encore du boulot pour expliquer que la liberté d'expression ne supporte aucun «mais» et «sauf» sans être niée. Et que, comme le «mais» qui suit «je ne suis pas raciste» signale le racisme, le «mais» qui suit «je soutiens la liberté d'expression» n'est pas une restriction mais une négation, une fin de phrase qui annule son début. Une tartufferie. Même pas un «oui mais», d'ailleurs, juste le «oui» de merde de Tartuffes...
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