Des réseaux contre l'impuissance

Dépasser les organisations politiques (tout en les utilisant)

Obsédées par les agendas politiques institutionnels et électoraux, presque entièrement mobilisées par les échéances de ces agendas et les contraintes du travail dans les institutions politiques, confrontées à un choix permanent, et exclusif, entre la cohérence et l'efficacité immédiate (à choisir la première, on doit renoncer à la seconde, et à choisir la seconde, on finit toujours par perdre la première), les organisations de gauche de ce pays, comme de tous les pays voisins, en sont arrivées à être à elles-mêmes leur propre fin : le maintien, la croissance, la construction de l'organisation devient le programme de l'organisation, et chaque organisation politique de gauche semble désormais se soucier plus de la concurrence que lui fait l'organisation d'à côté, et de la place qu'elle lui prend, que de la réalisation de ses propres objectifs politiques.

Que cent rhizomes s'épanouissent !
Quand un instrument n'a plus d'autre finalité que lui-même, à quoi et à qui diable peut-il encore servir ? Il est temps de constituer, à côté des organisations politique de gauche, au sens le plus large que l'on puisse donner à cette étiquette " de gauche ", des réseaux d'individualités ne représentant qu'elles mêmes, ne tenant leur mandat que d'elles-mêmes, et n'agissant pour le compte de personne d'autre qu'elles-mêmes... A défaut de cent fleurs, faisons s'épanouir cent rhizomes -non de ceux des botanistes, mais de ceux du philosophe (Deleuze), plaidant pour ce " cercle dont le centre est dans chacune des parties ", en lequel chaque point est connecté avec n'importe quel autre, auquel on adhère librement, qu'on quitte tout aussi librement, où l'on est pas admis et dont on ne peut être exclu: à côté des organisations politiques traditionnelles, cette organisation désorganisée, sans hiérarchie, ne reproduisant rien, ni en elle-même ni dans ses rapports à l'extérieur, des modèles auxquels elle entend se confronter, est peut-être aujourd'hui le seul instrument dont il nous soit possible de nous doter pour surmonter nos impuissances, et nos concurrences et n'ayant de compte à rendre à personne. Nous allons donc nous attacher à constituer un tel réseau, celui d'une " gauche socialiste " n'accordant ni à ce substantif, ni à ce qualificatif la moindre référence à quelque organisation que ce soit, se dît-elle socialiste, et ne se tenant à aucun agenda politique, aucune prudence, aucune affiliation, aucune discipline. Chacun dans le réseau amènera et diffusera ce qu'il souhaite, et prendra ce qu'il veut de ce que les autres y auront amené. Cette toile ne sera pas un rideau, elle sera la transparence même, qui ne filtre la lumière que pour la rendre plus lumineuse encore.

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