Scènes de chasse aux Pâquis

Quand un échevin radical et un prévôt communiste donnent une leçon de défense du service public à un ministre socialiste

Après que le Conseil d'Etat, collectivement, et le Conseiller d'Etat Laurent Moutinot, personnellement, aient accepté la demande de commerçants des Pâquis de mandater des des vigiles privés pour " patrouiller " aux Pâquis, faute de présence policière (cantonale ou municipale) suffisante, le Conseiller administratif radical Pierre Maudet, en charge de la police municipale genevoise, a dénoncé une " capitulation de l'Etat ". Position également exprimée par son homologue lausannois, mais popiste celui-là, Marc Vuilleumier. Pour Maudet, la décision cantonale d'autoriser des vigiles à faire semblant de faire le boulot du Guet " s'apparente à un abandon du terrain et à une capitulation de l'Etat ", donne le signe " que la sécurité sur le domaine public peut s'acheter sur le marché ", et qu'on doit " monnayer sa sécurité ". Le discours de Maudet est un discours de gauche -et c'est d'ailleurs le même que tient Vuilleumier " la sécurité s'inscrit dans une optique de service public ". Les seuls qui pourraient trouver dans ce débat tout le comique, sans doute involontaire, qu'il recèle sont les 200 ou 300 emmerdeurs qui zonent du côté des rues de Fribourg et de Neuchâtel, et que les " patrouilles " des vigiles privés repousseront peut-être d'une, deux ou trois rues pendant une semaine..

Le coût du Guet, du vigile et du chasse-gueux
Le Grand Conseil a voté le 20 février un projet de loi, sensé clarifier les rôles respectifs de la police municipale et de la police municipale. La loi, contre laquelle aucun référendum n'a été lancé, unifie les tenues des " municipaux " (en les distinguant de celle des " cantonaux ") les arme d'une matraque et d'un spray au poivre (mais pas d'armes à feu, ni de taser -le morgenstern est en suspens), et ne leur confie surtout que les missions qui sont déjà les leur : lutte contre le bruit et les tags, contrôle de circulation routière, etc. Les députés ont renoncé à transformer les agents municipaux en auxiliaires de l'Office des Poursuites, mais leur ont donné le pouvoir de prononcer des " interdictions de périmètres " (éloignement de certaines personnes de certains lieux ou quartiers, ce qui a pour effet que de les concentrer dans les lieux voisins ou les quartiers d'à-côté). Dès 2010, les désormais policiers municipaux (il y en aura 120 en ville, et autant dans le reste du canton) auront des compétences élargies par rapport à celles des actuels agents de sécurité municipale. Et le nombre de postes de police municipale passera à huit (il y en a actuellement quatre) Le Conseiller administratif Pierre Maudet a annoncé que l'objectif de la Ville est que " chaque citoyen croise un policier municipal au moins une fois par jour ". Mais pas la nuit. Pas assez de personnel, pas assez de crédits. " Il est intolérable de devoir monnayer sa sécurité ", clame Maudet. Et il a parfaitement raison. Il serait en effet intolérable que la sécurité ne soit assurée qu'à ceux qui peuvent se la payer, en engageant des vigiles " privés " pour faire le boulot du Guet et des Chasse-gueux publics. Mais on ne peut pas à la fois baisser les impôts et engager plus de chasse-gueux, ou les faire bosser la nuit. Il faut plus de flics dans les rues, il en faut dans toutes les rues, et 24 heures sur 24 ? Il faut donc les former et les payer. La cheffe de la police déclare avoir besoin de 220 policiers supplémentaires. Plus hautes et plus fortes que les clameurs sécuritaires, on pourrait bien entendre bientôt les clameurs budgétaires et fiscales et l'invocation aux dieux du frein à l'endettement, de la part de ceux-là même qui depuis des mois touillent le brouet sécuritaire.

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