Gauche de la gauche : Les Noces de Schaffhouse ?

Les " Noces de Soleure ", ce fut, en (1901) la création du Parti socialiste suisse, sous sa forme (mais non plus son fond) actuelle, par la fusion du premier PSS avec le vieux " Grütliverein ". Les " Noces de Schaffhouse ", en le premier jour du mois révolutionnaire de frimaire, seront-elles celles de la naissance, sous quelque forme que ce soit, d'une " gauche de gauche " remédiant à sa propre fragmentation et surmontant ses propres divisions ? C'est à Schaffhouse que se tient ce samedi le congrès fondateur de " La Gauche - Linke Alternative - La Sinistra " (noms pas encore définitifs), avec pour objectifs " de mettre en place un processus de rencontres avec toutes les forces anti-capitalistes et écosocialistes du pays, dans la perspective d'unifier et de créer à terme un parti ou mouvement commun démocratique avec droit de tendances ". On n'a pas encore rompu avec la belle langue de bois de gauche, mais une belle dynamique existe, et c'est en soi une bonne nouvelle : la " gauche de la gauche " veut rompre avec ce qui aujourd'hui l'empêche de jouer le rôle qui pourrait être le sien : sa propre impuissance à s'unir. Bons vents, camarades !

De beaux défis
Le programme proposé aux congressistes fondateurs de " La Gauche " pour être celui du nouveau parti, ou du nouveau mouvement, n'est peut-être pas révolutionnaire, mais l'important, à ce moment d'émergence d'une volonté politique, n'est pas là. La proposition faite aux congressistes fondateurs de " La Gauche " d'accepter la " double appartenance ", au nouveau mouvement et aux organisations existantes, est, en soi, un élément très important de rupture avec les modes d'organisation de tous les autre partis et de toutes les autres formations de gauche, qu'elles vont obliger à un choix : admettre que l'on puisse rester au nombre de leurs membres tout en étant membre de " la gauche ", ou se lancer dans des purges et des épurations qui seront autant d'amputations -mais aussi de clarifications. La " double appartenance " est en outre une manière de conjuguer deux modes de constitution d'un mouvement : l'organisation politique sous sa forme traditionnelle, d'une part, le réseau, d'autre part. S'agissant du programme : pour la première fois aussi, une véritable force politique de ce pays pourrait faire sien le projet de la décroissance, dans son acception " écosocialiste ". On est donc passé de la seule référence à un " anticapitalisme " d'autant plus commode qu'il est a priori sans contenu programmatique clair, à un véritable projet politique de rupture. Des éléments imnportants du programme font encore débat, d'autres ressortissent d'un bon programme social-démocrate de gauche, c'est-à-dire fidèle aux principes fondateurs de la social-démocratie, que la social-démocratie elle-même a abandonnés ou tellement délayés qu'ils en sont devenus homéopathiques, mais peu importe encore. Si le congrès de Schaffhouse s'achève réellement par la création du parti ou du mouvement dont ses initiateurs veulent le faire accoucher, et qu'ensuite, dans chaque canton, ce mouvement se décline en formations capables d'y rassembler les volontés éparses et concurrentes qui y existent (car elles y existent), Genève n'étant qu'une sorte d'idealtype négatif de ce qu'il convient de ne pas, ou de ne plus faire, l'effort de nos camarades organisateurs du moment schaffhousois n'aura pas été vain.

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