On a trouvé à qui refiler la patate chaude

Justice, police et manifs : chouette, c'est Rochat qui s'y colle !

Aucun des " anciens " conseillers d'Etat n'en voulait, on l'a donc refilée à une nouvelle. Et comme les libéraux, à la remorque de l'UDC et du MCG, avaient fait campagne sur le thème de la " tolérance zéro " à l'égard des délinquants (sauf s'ils sont fils de potentats libyens), il était assez logique que ce soit la libérale qui s'y colle : la police genevoise a une nouvelle ministre, la cheffe de la police une nouvelle cheffe et Zavatta une nouvelle autorité politique en face de lui.Tout cela, au passage, nous arrange : de nous en prendre régulièrement au camarade Moutinot, on commençait à fatiguer. On va donc voir ce qu'on va voir. C'est-à-dire vraisemblablement pas grand chose, puisqu'une fois dissipées les fumerolles des déclamations électorales, la triste et lourde réalité va tristement et lourdement s'imposer : celle d'une ville qui ne peut plus redevenir le village qu'elle était il y a 2000 ans, d'une ville frontière qui ne peut ni déplacer ni fermer sa frontière, d'une ville contemporaine qui ne peut être ni épurée ni purgée de ce qui la démange (mendiants, dealers, cambrioleurs, petits délinquants), et d'une République qui pourra couvrir son territoire de nouvelles prisons sans que jamais l'ombre d'une solution au problème de la surpopulation carcérale n'émerge de cette frénésie geolière. Mais ça tombe bien : la nouvelle ministre de la justice, de la police et des prisons était jusqu'à présent maire de la future cité carcérale de Genève : Thônex.

Le droit de manifester
Samedi dernier, à Genève, la manifestation contre la conférence ministérielle de l'OMC n'aura parcouru que la distance qui sépare la place Neuve de l'Hôtel de Bergues. L'intervention du black block aura contraint les organisateurs à mettre fin prématurément au défilé : la casse a été au rendez-vous, puisque le black block y était, et qu'il y était pour cela : casser. Fallait-il interdire la manif ? Depuis bientôt vingt ans, les manifestations du 1er mai à Zurich finissent par des " débordements ", des affrontements et de la casse : on n'interdit pas les manifestations du Premier Mai à Zurich pour autant; depuis des années, la manifetation du 1er août sur le Grütli est pourrie par des fachos : on n'interdit pas la manifestation du Premier Août au Grütli pour autant; chaque week-end, des matches de foot se terminent par des affrontements entre supporters : on n'interdit pas les matches de foot pour autant. Qui se préoccupe de savoir si une manifestation à laquelle on a l'intention de participer est autorisée ou non ? pas les " casseurs ", qui se réjouissent plutôt qu'elle soit interdite, mais les braves manifestants légalistes. En interdisant des manifs, on les réserve à ceux qui veulent en faire un moment de défoulement violent. Et ceux-là sont plus nombreux qu'on le croit, et sans doute politiquement moins analphabètes qu'on le dit : un " autonome " ayant participé à la casse de samedi dernier confiait au Courrier que pour lui cette casse avait le mérite de " porter préjudice à la gauche institutionnelle ", accusée d'empêcher l'émergence d'un mouvement réellement émancipateur. Cette position n'est pas nouvelle : elle était déjà celle des anarchistes de la fin du XIXe siècle et du début du XXe. Bref, Black Block ou pas, le droit de manifester doit être défendu sans condition comme un droit fondamental à l'origine de tous les autres : le suffrage universel a été conquis par des révolutions, les libertés syndicales par des grèves sauvages, le droit de grève par des émeutes, et les lieux de culture alternatifs par des années de manifs parfois violentes. Certes, rien ne nous empêche d'inventer d'autres manières de tenir la rue que celle qui consiste à y défiler. Mais rien ne garantit que ces " autres manières " soient plus paisibles que nos vieilles manifs péripatéticiennes…

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