200 rues libérées. Pour commencer.

A une majorité rendue plus confortable par le ralliement à la gauche des radicaux, rassérénés par le projet du Conseil administratif de créer un parking souterrain à Rive pour faire passer une « piétonnisation » partielle du rond-point le plus bordélique de la ville, le Conseil municipal de Genève a donc accepté l'initiative des Verts pour la création de 200 rues totalement ou partiellement piétonnes sur le territoire communal, prioritairement aux abords des écoles, des EMS, des établissements médicaux et des maisons de quartier. Acceptée par le parlement municipal, l'initiative n'aura donc pas besoin d'être soumise au vote populaire -les opposants au développement des rues piétonnes pouvant néanmoins lancer des référendums contre les arrêtés concrétisant l'initiative. Le Conseil administratif a trois mois pour soumettre au Conseil municipal un projet conforme à l'initiative (le canton gardant toutefois, hélas, le dernier mot sur les mesures touchant le trafic), et la Ville aura ensuite quatre ans pour réaliser ce projet. 200 rues, ça ne fait qu'une artère sur quatre en Ville de Genève ? Sans doute. Mais accepter de les rendre en tout ou partie au déplacement humain, est un signe qu'on ne peut que saluer. Et c'est un excellent début : celui de la libération de la ville de l'emprise polluante, bruyante, encombrante et dangereuse du plus absurde des moyens de se déplacer en zone urbaine.

La sécurité publique -la vraie

Quand la droite traditionnelle ou la droite populiste se lance à grand fracas dans des campagnes sur le thème de la « sécurité », ce n'est jamais pour évoquer ce qui la menace le plus : la circulation motorisée en général, et automobile en particulier. C'est politiquement logique : les électeurs que l'on drague sont plus souvent automobilistes que malfrats, l'un n'empêchant cependant pas l'autre, comme le relève le porte-parole de la police genevoise, qui explique que certains automobilistes, ceux qui « pensent être les seuls sur la chaussée et les rois de la route » restent des dangers publics et des assassins en puissance. La moitié de la population de la Ville de Genève en âge et en état de conduire une voiture n'en a pas et plus de la moitié de la population de la Ville est piétonne, cycliste, usagère des transports publics. Or les piétons sont les usagers des voies publiques les plus vulnérables aux accidents -et les automobilistes les usagers les plus dangereux pour les piétons (et les cyclistes) : en 2008 à Genève, 218 accidents de la route ont tué ou blessé des piétons. Près de la moitié de ces accidents sont survenus alors que les piétons étaient sur un passage de sécurité, et la majorité sont survenus entre une voiture circulant en ligne droite et un piéton traversant la route. Le Conseil fédéral étudie un projet visant à réduire massivement le nombre de morts et de blessés dans des accidents de la circulation en Suisse. Le projet contient un catalogue de mesures dont une bonne partie ont toutes les chances d'être abandonnées au bord de la route, sous les hauts cris du lobby bagnolard, mais tout se passe comme si une évidence restait hors d'atteinte des esprits : là où les voitures ne peuvent circuler, elles ne peuvent ni tuer, ni blesser, et le meilleur moyen de réduire le nombre de morts et de blessés dus à des accidents de la circulation est donc de réduire, autant qu'il est possible, la circulation motorisée. Et de la réduire non par des prescriptions légales, mais par des impossibilités matérielles -des obstacles physiques, des aménagements routiers... et des zones piétonnes. 200 rues piétonnes, ce sont 200 rues sans accidents. Une initiative comme celle, municipale, des Verts, que le Conseil municipal vient d'accepter, est donc un moyen infiniment plus efficace de lutte contre l'insécurité que tous les battages d'estrade préélectoraux auxquels il va falloir s'attendre dans les treize mois à venir...


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