Rapports entre les femmes et les hommes : Le retour du refoulé

Elèves masculins agressifs à l'égard de leurs condisciples féminines, insultes sexistes ou homophobes, violences, jusqu'au passage à l'acte de l'agression sexuelle : dans les écoles moyennes, quand ce n'est pas dans les dernières années de l'école primaire, se constate une dégradation des rapports entre garçons et filles, du fait des premiers. Ces rapports n'ont certes jamais été faciles à l'âge de l'adolescence et de la pré-adolescence, mais apparemment, ils se dégradent, après avoir été, au moins pour un temps, et apparemment, un peu civilisés. Ce que la loi proscrit dans une entreprise, on peine à y répondre à l'école. Et on s'interroge : régression des droits des femmes ou plutôt persistance d'un écart, jamais résorbé, entre les progrès faits par les femmes (et les filles) dans le parcours de leur émancipation, et la lenteur de ceux encore à réaliser par les hommes (et les garçons) sur la voie de la leur, à l'égard des vieux stéréotypes masculins et de la virilité mesurée à l'aune de la violence rhétorique ou physique ?

L'air vicié du temps
Fondamentalement subversif, en ce que ses revendications étaient une remise en cause radicale des règles fondatrices du jeu social, le féminisme était porteur non seulement d'une libération des femmes, mais aussi d'une libération des hommes - or la première a avancé plus vite que la seconde, et les garçons se retrouvent encore souvent piégés par un modèle « viril » qui ne répond plus à aucune condition sociale objective, alors qu'il fut le code même de l'intégration sociale : le caïd n'est plus qu'un largué, violent mais pas moins largué pour autant. Des garçons adoptent les postures de ce qu'ils croient (et qu'on continue à leur dire) être la « virilité », dans ce qu'elle a de pire ? ce comportement n'est ni socialement, ni culturellement confiné -jouer au « petit mec » n'est ni une spécificité prolétarienne, ni une caractéristique des enfants de l'immigration, et on peut déceler dans ce jeu le signe d'une dégradation sociale plus globale : s'enfermer dans ce qu'on croit être une « identité masculine » peut être la réponse à la précarité des manifestations sociales traditionnelles de cette identité : l'emploi, le salaire, la position sociale... Pour couronner le tout, les filles ont tendance à mieux travailler, et à mieux réussir, à l'école : le cancre qui roupillait paisiblement au fond de la classe se réveille, veut montrer qu'il est quand même plus fort qu'elles -et comme il ne peut le montrer scolairement, il le montre physiquement -l'agression physique (sexuelle ou non) comme substitut de la réussite individuelle, la chose n'est pas nouvelle, si elle est plus visible. Le vieux système des rôles et des signes respectifs de « l'homme » et de « la femme » n'a pas disparu. Il est toujours présent à l'école dans les têtes des élèves, des enseignants, des parents, dans celles des femmes autant que dans celle des hommes, dans les familles, dans les entreprises, dans la rue. Et dans la politique. Sur tous les terrains où la lutte engagée par le féminisme avait fait reculer les vieux modèles patriarcaux, ceux-ci reprennent du poil (viril) de la bête (quitte à se parer de quelques références aux « intérêts », à défaut des droits, des femmes). La nouvelle offensive lancée par les milieux intégristes religieux (chrétiens en l'ocurrence) contre le droit des femmes à disposer de leurs corps est dans l'air vicié du temps : les quelques décennies qui ont révolutionné nos sociétés en révolutionnant les rapports entre les genres, ne pèsent pas encore assez lourd pour effacer des millénaires de sujétion et de discrimination et purger le cerveau reptilien du sexisme ordinaire qui s'y tapit.

Commentaires

  1. Les femmes ont encore beaucoup à faire pour le respect de leurs droits qui, comme énuméré, sont bafoués dans tous les domaines. Le système patriarcal instauré depuis toujours est ancré dans les mentalités et se transmet de génération en génération sans changer de cible. Et pour renverser ce système, les femmes et les hommes doivent prendre conscience de toute cette construction qui les enferme dans des rôles sexués, à savoir la femme fragile et dominée et l'homme viril et dominant, dans le but d'atteindre une réelle égalité qui est loin d'être acquise partout dans le monde. Rejoignez osezlefeminisme!

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