Energie : un paquet ficelé de bonnes intentions

Le 7 mars, le vote populaire fera un sort à une « loi sur l'énergie » largement approuvée au Grand Conseil par la droite et les Verts et dont on veut bien croire qu'elle part de bons sentiments, mais qui, à l'arrivée, fera payer l'assainissement énergétique des immeubles, et donc leur plus-value, non par les propriétaires mais par les locataires. Si le projet soumis au vote s'en tenait à ses objectifs proclamés (les économies d'énergie, le développement des énergies alternatives), le « oui » serait unanime. Mais à la question qui fâche (« qui paie » ?), le projet répond : pas les propriétaires, mais l'Etat et les locataires. La loi encourage les rénovations pour réduire la consommation de chauffage ? C'est très bien. Mais elle permet de répercuter le coût des travaux sur les loyers bon marché, les hausses pouvant atteindre jusqu'à 15 %, alors que les économies d'énergie permises par l'assainissement des immeubles pourront être utilisées par les propriétaires pour payer les travaux, au lieu d'être traduites par une baisse des charges pour les locataires... Ce petit tour de passe-passe a été intégré dans la loi sur l'énergie, où les milieux immobiliers comptaient bien qu'il passe inaperçu. C'est raté, ça s'est vu, le paquet ficelé a été ouvert.

Deux mille ouates
Une « conception générale de l'énergie » votée par le Grand Conseil engage Genève à atteindre l'objectif de la « société à 2000 watts », ce qui suppose une réduction massive de la consommation d'énergie d'ici à 2050 (à Genève comme en Suisse, on en est à une consommation d'électricité se situant entre 5000 ou 6000 watts par personne et par heure); il s'agirait d'en revenir, sans détérioration des standards de vie, à une consommation équivalant à celle des années soixante, grâce à des changements de modes de consommation, de transports, et de construction. Un objectif louable, mais qu'on voit mal conjugué à des projets du genre des tours de la Praille, de la traversée routière du petit-lac ou du nouveau terminal gros porteur de Cointrin. La « société à 2000 watts », c'est un joli slogan et un bel objectif, mais l'enfer du gaspillage est ouaté de ce genre de bonnes intentions. Aujourd'hui, Genève consomme, et consume, autour de 3000 gigawatts par heure. Il faut à la fois réduire cette consommation et ensuite opérer un transfert des énergies fossiles et non renouvelables vers les énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermique etc...). Or tout en affirmant l'objectif des «2000 watts» par personne en deux générations, les Services Industriels genevois soutiennent encore la construction de grandes centrales, hydroélectrique à Conflan ou chaleur-force à Vernier, ajoutant une production d'énergie nouvelle (400 gigawatts/heure) à la production, et donc à la capacité actuelle de consommation et de consumation. On proclame ainsi un objectif (la « société à 2000 watts ») qu'on se donne, délibérément, les raisons de ne pas atteindre. Il est vrai que les participants au grand concours d'incohérences sont nombreux, en un temps où le fin du fin du comportement « écologique » semble consister à remplacer, à terme, les bagnoles brûlant du pétrole par des bagnoles fonctionnant à l'électricité (tant pis pour l'objectif des « 2000 watts »...) ou aux biocarburants (tant pis pour les paysans du sud), et les vélos à propulsion musculaire par des vélos à assistance électrique. Combien de watts, au juste, consomme un vélo électrique lorsqu'il faut recharger sa batterie ? Et d'où provient l'électricité de cette recharge ? Et quel volume d'énergie a-t-il fallu consacrer à la fabrication du vélo électrique lui-même ?

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