Parité : L'inconfort de la règle

Demain soir, le PS de la Ville de Genève va gravement s'interroger sur le maintien ou non de l'exigence statutaire de parité des genres sur ses listes électorales. Les statuts d'un parti politique sont en quelque sorte sa constitution. Comme une constitution, ils sont modifiables, révocables, adaptables, partiellement ou globalement. Un parti politique est un instrument, et ses statuts le mode d'emploi de cet instrument. Mais de quoi un parti est-il l'instrument ? d'un programme, d'un projet, d'une volonté politique collective, ou de plans de carrière ? Modifier les règles d'une élection quelques mois avant les élections, c'est se livrer à un exercice dont les gouvernements français (par exemple) sont coutumiers : on redessine les circonscriptions, on modifie le système électoral, on redéfinit les conditions de candidatures en fonction d'objectifs et de calculs électoraux, plus ou moins crédiblement fardés de références à quelques grands et sonores principes politiques... il y a fort longtemps qu'un tel bricolage ne devrait plus tromper personne, surtout à gauche. Après la parité, contestée parce qu'elle gène avec la même ferveur qu'elle était soutenue lorsqu'elle pouvait être instrumentalisée, ce sont d'autres dispositions des statuts socialistes (le non cumul des mandats, leur limitation dans le temps, etc.) qui vont donc être mise en cause pour les mêmes raisons d'où les principes sont aussi absents que sont pesants les calculs carriéristes, les détresses de fin de mandat ou l'envie de cumuler les postes. La règle de la parité est inconfortable ? Certes. Mais elle est précisément là pour cela...

Parite missa est
Le PS s'impose à lui-même des quotas, ou en Ville la parité des genres sur ses listes électorales, et s'oblige donc, comme d'ailleurs ses alliés de l'Alternative, à présenter autant de femmes que d'hommes aux élections : c'est un choix souverain, délibéré, arbitraire -un choix politique, donc, irréductible aux calculs conjoncturels. Si aujourd'hui le PS, les Verts, AGT, ont des représentations parlementaires équitablement, ou majoritairement, féminines, les règles de parité y sont pour beaucoup, qui nous ont obligés à aller chercher des candidatures féminines, nous ont forcés à nous féminiser et à féminiser nos représentations politiques. Sans la parité on en serait encore à gauche, comme on en est encore à droite sauf exceptions accidentelles, à des groupes aux deux tiers, aux trois quarts, quand ce n'est pas en totalité, masculins, et à des parlements aux deux tiers masculins lorsque la gauche n'y est pas majoritaire. C'est dans la durée que se juge et se jauge l'effet d'une règle comme celle de la parité -et non en fonction de son effet sur une élection locale et une seule... Les quotas ou la parité des genres sur les listes électorales sont les moyens de deux principes : la représentativité (les femmes étant « la moitié du ciel », elles doivent être la moitié des listes) et l'offre d'un choix entre autant de femmes candidates que d'hommes candidats, et réciproquement. Le principe est fondamental, la règle est instrumentale : on l'instaure quand on en a besoin, on l'abroge quand on n'en a plus besoin. Or nous avons encore besoin de la parité des genres sur les listes électorales : si le Conseil municipal de la Ville est aujourd'hui « paritaire », c'est que les composantes de sa majorité politique ont instauré pour elles-mêmes la règle de la parité des genres. On peut certes s'opposer aux quotas, paritaires ou non, pour des raisons de principe, mais alors on ne les bricole pas : on en propose l'abolition pure et simple. On ne devrait pas, dans un parti socialiste, avoir besoin d'imposer la parité, de limiter les mandats ou d'en proscrire le cumul : ces règles devraient être inutiles, les socialistes devraient sans que leurs statuts les en prient, ou les y obligent, considérer la parité des genres sur les listes électorales comme allant de soi, comme ils devraient n'être ni cumulards, ni accrochés à leurs sièges. Tel n'est pas le cas. On ne fera pas du PS un parti socialiste magré lui et de ses membres des socialistes contre leur gré, mais on pourra tout de même instiller et maintenir dans les textes du parti suffisemment d'éléments socialistes pour pouvoir encore considérer le PS comme autre chose qu'un vague rassemblement centriste vaguement progressiste. De ces éléments socialistes, le non-cumul des mandats, la limitation des mandats, la parité des genre sont des exemples. On pourra donc considérer comme exemplaire que l'on veuille les démanteler, ou les rendre inopérants : ils gènent, ils empêchent de faire, ou de parfaire, du PS une formation attrape-tout farcie d'élus cumulards et d'élus à vie. A nos yeux, ce mérite de ces règles statutaires suffit à les justifier.

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