Congrès du PS genevois : De Nivôse en Germinal

C'est le dernier jour de l'hiver, et donc le dernier jour du mois de Pluviôse, que le PS genevois a tenu congrès. Ce jour, dans notre calendrier préféré, est le jour du plantoir. De quoi le plantoir est-il le présage ? d'une prochaine germination (puisque le lendemain on entrait en Germinal en même temps que dans le printemps) ou d'une nouvelle plantée ? A s'en tenir à ce que les media locaux en ont dit, le congrès socialiste aurait eu un enjeu principal : savoir si le président du PS genevois serait René Longet ou Alberto Velasco. On rappellera seulement à ce sujet que si toutes celles et tous ceux qui, entre deux couloirs, off the record et sous couvert d'anonymat, ont rendu le président sortant seul, ou principal, responsable de la baffe électorale reçue par le PS à l'automne dernier, s'étaient présentés, en toute cohérence, contre ce président supposé avoir été défaillant, les socialistes auraient demain le choix entre cinquante candidates et candidats à la présidence -et pas deux. Or seul Alberto Velasco a eu, disons le courage pour ne pas user d'une métaphore plus hispanique et machiste, de se lancer... De toute façon, l'important n'est pas forcément de savoir qui présidera le PS dès le dernier jour de Nivôse, mais plutôt de savoir ce que, et ce à quoi, il présidera dès le premier jour de Germinal...

Débats de fond ou faux débats ?
Du « Comité directeur élargi » du PSG, le 23 janvier dernier, il a été tiré une synthèse en forme d'inventaire prévertien. On y trouve tout, absolument tout, et donc un peu n'importe quoi. ça commence par la liste des « fondements » sur quoi le parti se reconstruira (puisqu'on le suppose détruit), à moins qu'on veuille l'y asseoir. Une liste exhaustive, avec les « valeurs », les jeunes, le milieu populaire, l'adhésion symbolique, le sentiment d'appartenance, la protection, le quartier, les propositions concrètes, les liens avec les associations, la convialité, l'efficacité interne, un « état d'esprit », un « souffle »... Les valeurs ? il faut remplacer la « dictature du PIB » par la notion baroque de « Bonheur national brut »... Déjà qu'accoler « bonheur » et « national » procède d'une rhétorique douteuse, pour ne rien dire de « bonheur » et « brut », on ne voit pas très bien comment et par quoi on va le mesurer, ce BNB. On ne voit pas très bien non plus comment en arriver à une « symétrie » des droits et devoirs sans nier les droits au nom des devoirs (cette « symétrie » est un vieux lieu commun réactionnaire, donnant prétexte au refus d'accorder des moyens aux droits, et permettant de faire l'impasse sur l'absurdité d'exiger des « devoirs » de qui n'a même pas les moyens des droits qu'on fait mine de lui accorder). L'inventaire se poursuit par le refus de la « société à deux vitesses », comme si on n'était déjà pas passés à une société à quatre ou cinq vitesses (les exclus, les traînards, ceux qui arrivent à suivre le rythme et ceux qui le donnent), et par la confusion entre l'Etat et la collectivité publique, comme si le premier était la seule organisation possible de la seconde et que la commune n'existait pas, ou plus... Enfin, au chapitre « Etre socialiste, un Etat d'esprit, une responsabilité », on nous donne comme mission d'avoir « une longueur d'avance ». D'avance sur quoi, et sur qui ? Sur les concurrents des socialistes dans la course aux postes ? La gauche a besoin, pour mener une politique de gauche, de trois majorités, dont la première est essentielle quand les deux autres ne sont qu'instrumentales : une majorité populaire, une majorité parlementaire, une majorité gouvernementale. La condition de la majorité populaire, c'est une « hégémonie culturelle » que la gauche, et d'entre elle la social-démocratie, a perdue depuis 25 ans. Et c'est pour l'avoir perdue qu'elle-même se perd à courir d'un bastion de défense sociale à un bastion de défense politique pour préserver ce qui peut encore l'être de l'héritage de six ou sept décennies de capitalisme socialisé par la social-démocratie...

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