Emois autour du Moa : Un tintamarre gonflant



Après le « Moa », fermé jeudi pour des raisons de sécurité, le «Weetamix» a été fermé vendredi, pour les mêmes raisons, et entre 500 et 1000 personnes ont manifesté samedi pour protester contre ces fermetures. Qui, avouons-le, nous indiffèreraient assez prodigieusement, n'était le tintamarre gonflant que l'on fait autour d'elles, comme si elles étaient devenues un enjeu de la politique culturelle genevoise, quand elles ne sont guère qu'un enjeu électoral pour quelque candidat kazakh en mal de programme -et d'électorat. Le « Moa » est une discothèque, pas un lieu culturel, ni un lieu alternatif. Le Macumba n'est pas l'Usine, et on s'autorisera à être aussi indifférent au sort de l'un que soucieux de défendre l'autre.

Surmoa

Ainsi, il faudrait que nous émouvions de la fermeture du « Moa » -mieux, que nous nous en insurgions ? mais voilà : on n'en a décidément rien à secouer. On peut le laisser fermer, le Moa, ou le rouvrir, peu nous chaut. Mais que le destin de cette boîte devienne l'événement phare de ces premiers jours d'octobre, alors là, oui, il nous en chaut, de ce barouf alimenté par des gens dont on ne souvient guère, au moment où les uns après les autres, les lieux culturels et les lieux de rencontre alternatifs tombaient sous les coups de la grande offensive d'épuration sociale et culturelle lancée contre les squats, qu'ils se soient manifestés autrement que pour y applaudir, pour ensuite se retourner contre l'Usine, ultime survivante des années où Genève était une sorte de petit phare de cette part, alternative précisément, de la « vie nocturne » qui ne se mesure ni au profit qu'on peut tirer de la vente de bibine, ni aux soutiens politiques dont elle dispose -et qui lui ont d'ailleurs manqué lorsqu'on s'en est pris à elle. On a donc retrouvé avec un certain amusement, en contemplant la manif des clubeurs protestant contre la fermeture du MOA, un article du Courrier du 20 février dernier, titré « Après les Roms, la droite s'en prend aux jeunes », et évoquant une disposition de la loi sur la police permettant à celle-ci de signifier des interdictions de périmètre (de 24 heures à trois mois) à toute personne participant à un rassemblement supposé menacer « l'ordre ou la sécurité publique », même si elle n'a commis aucun délit. Selon les propos du député Vigilant (pardon : libéral) Olivier Jornot,. cette disposition vise en particulier les groupes de jeunes qui zonent dans les préaux d'école, les parcs ou les arrêts de bus. Les grands esprits se rencontrant, ces groupes ont été brandis comme un argument pour exiger la réouverture du Moa, sur le ton : « si on peut plus aller en boîte, on ira traîner dans les rues ». Or des groupes de djeuns qui zonent, il y en a et il continuera de s'en former de toute façon, que des boîtes du genre Moa soient ouvertes ou non. Et lors de la grande offensive lancée par la droite contre les squats, l'argument du déplacement des nuisances (si les squats sont vidés, les squatters iront déranger les bonnes gens dans la rue) avait été fermement repoussé par la droite. La même qui a fondu sur la fermeture du Moa comme la misère sur le pauvre monde pour se faire un petit lifting politique auprès de la « jeunesse » (la bonne jeunesse, la saine, la propre sur elle, pas celle qui squatte) ? oui, la même droite. Celle qui a applaudi à l'évacuation de Rhino au nom du respect de la loi, qui voudrait bien que l'on fermât l'Usine au prétexte qu'elle dérange les voisins et qui aujourd'hui exige que l'on rouvre le Moa, malgré la loi et les voisins.

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