Fonds de tiroir

Le 30 octobre devrait se tenir (droit dans ses bottes) à Zurich un drôle de congrès : une rencontre internationale organisée par la « communauté d'intérêt antiféministe », qui réunit des associations suisses (alémaniques) et allemandes de mâles déprimés par les conquêtes du féminisme, « idéologie irrespectueuse des droits de l'homme ». De « l'homme » avec un « h » très, très minuscule, qui se définissent comme « masculistes » ou «hommistes», et dont le programme se résume à peu près au retour des femmes à la maison -on n'ose dire « au foyer », pour ne pas leur suggérer quelque parenté avec Landru. La mâle rencontre est organisée par un certain René Kuhn, ancien du «parti de la Liberté» (un truc à droite de l'UDC), rallié à l'UDC dont il a présidé la section lucernoise. Mais faut pas croire : René n'est pas seulement un nostalgique du patriarcat : il est aussi anti-écolo, antichômeurs et xénophobe. Un vrai Suisse tel que l'UDC les conçoit, les vrais Suisses : aux bras noueux. Et à la tête de noeud.

« 20minutes » nous l'a appris hier, et on en est encore tout bouleversifiés : les Vieux Grenadiers ont refusé d'admettre en leur sein le président du Grand Conseil, le PDC Guy Mettan, et refusent de donner les raisons de ce refus. Le président de la société a simplement précisé que « ce choix n'est pas politique ». Esthétique, alors `?

L'exécution d'un condamné à mort a été repoussée en Arizona parce que l'Etat n'avait pas réussi à se procurer aux USA le poison (du thiopental) utilisé dans cette terre de haute civilisation pour homicider les condamnés, et avait dû importer du thiopental de l'étranger, sans pouvoir garantir qu'il correspondait aux nobles exigences de la constitution des USA, qui impliquent qu'on ne doit pas faire souffrir les gens qu'on exécute. C'est beau, l'humanisme : on peut gazer, électrocuter, empoisonner ou pendre, mais avec douceur : pendre avec des cordes en soie, gazer avec un truc qui sent bon, électrocuter avec de l'électricité solaire ou empoisonner avec du thiopental parfumé au ketchup.

Un milliardaire sur dix vit en Suisse, qui abrite la troisième plus forte densité de milliardaires au monde, et 3 % de la population déclare autant d'argent imposable que les 97 % restants : c'est le résultat d'une étude de l'Université de Bâle auprès des habitants de notre beau pays qui détiennent une fortune de plus de 100 millions de francs. C'est bien de se pencher sur les espèces pas en voie de disparition, ça nous change des études déprimantes sur les pauvres, les mendiants, les drogués, les sans-papiers. En plus, ça amène un peu d'eau-de-vie au moulin de l'initiative socialiste pour des impôts équitables.

Le Conseil fédéral a décidé de ne pas se prononcer avant 2012 sur les écoutes téléphoniques, la surveillance et l'intrusion informatiques, et d'autoriser tout citoyen à pouvoir demander s'il est fiché. Le chef du service de renseignement a déclaré qu'il pouvait « vivre avec cette décision ». On est soulagés, on voulait pas sa mort, on voulait juste qu'on respecte un peu notre vie privée. Pas trop, juste un peu. De toute façon, nos fouineurs fédéraux, y-z-ont qu'à s'inscrire sur Facebook et devenir nos zamis ou les zamis de nos zamis, s'ils veulent nous fliquer.

Le Tribunal fédéral a pondu, dans l'affaire du chanvrier Bernard Rappaz, un arrêt légitimant l'alimentation forcée des grévistes de la faim. L'idée que tout individu est propriétaire de lui-même et de sa propre vie ne semble donc pas avoir effleuré les juges fédéraux. ça se passerait en Libye ou en Corée du Nord, tout le monde hurlerait à l'arbitraire totalitaire, mais comme ça se passe en Suisse, presque personne ne moufte : les médecins seront donc appelés à la rescousse pour nourrir de force des gens qui ne veulent pas s'alimenter. Et c'est ainsi qu'on passe du serment d'Hippocrate au serment d'hypocrite.

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