Aujourd'hui, vendredi 10 décembre, « Journée sans TPG »

Boycotter une politique, pas sa victime
A l'appel de la Jeunesse Socialiste -appel qu'on se fait évidemment un plaisir de relayer-, une « journée sans TPG » est organisée ce vendredi. Evidemment, pour nous, ce sera surtout une « journée sans tarifs TPG », mais l'intention reste la même : protester contre une politique qui persiste à ne considérer les transports publics que comme un mode d'appoint à l'automobile individuelle, alors que les priorités devraient être inversées, de telle manière que ce soit le transport automobile individuel qui soit l'appoint des transports publics, pour les personnes dont les horaires ou les trajets ne sont pas, ou sont insuffisemment, « couverts » par eux ou qui ne peuvent que difficilement en user, pour des raisons liées par exemple à un handicap. Bref, en appelant à une « Journée sans TPG », c'est bien à un boycott qu'on appelle -mais à celui d'une politique dont les augmentations de tarifs des TPG, même repoussées d'une année, ne sont que la matérialisation, qui légitime et renforce la revendication de la gratuité, comme celle de la priorité à accorder, enfin, aux transports publics.

Journée sans TPG, années sans priorité aux TPG

La journée d'aujourd'hui doit être moins une « journée sans TPG » qu'une « journée sans TPG payants », et, aussi paradoxal que cela paraisse, une journée pour une véritable priorité accordée aux transports collectifs sur les transports individuels motorisés. Car la fameuse « complémentarité des modes de transports » est une illusion -et encore ne l'est-elle que si on y croit sincèrement. Parce que pour le lobby automobile et ses porte-paroles politiques, cette illusion n'en est pas une : eux savent qu'il s'agit purement et simplement d'une foutaise. Il n'y a pas de « complémentarité » possible entre le trafic automobile et les transports publics, quand les seconds sont piégés par le premier, englués dans son troupeau, empêchés matériellement d'assurer ce qu'on leur demande d'assurer : la loi de 1988 préconise pour les TPG une « vitesse commerciale » de 18 km/h. Au centre -ville, les TPG atteignent péniblement les 12 km/h, quand ils les atteignent et que les travaux de rattrapage de cinquante ans perdus à sacrifier au « tout automobile » n'aggravent pas encore la situation. Ce qui entrave le plus lourdement le développement des transports publics, ce n'est même pas l'insuffisance, pourtant avérée, des moyens financiers qui leur sont accordés par « le politique » : c'est l'absence de priorité matérielle qu'on leur accorde sur la voie publique. Il leur faudrait de véritables voies réservées sur la totalité de leur parcours -ils n'en disposent pas encore partout, et là où ils en disposent, elles sont régulièrement obstruées par des voitures. Il leur faudrait des signalisation lumineuses « intelligentes », qui leur accorderaient partout la possibilité de passer au vert à tous les carrefours -et qui donc stopperaient la circulation automobile qui pourrait les gêner. Ils n'en disposent pas. Résultat : les transports publics se retrouvent piégés aux mêmes « points noirs » qu'il y a dix ans : la rue du Rhône (le trafic automobile y est interdit, mais aucune volonté de faire respecter cette interdiction ne s'est fait jour), le pont du Mont-Blanc, Cornavin... auxquels s'ajoutent les « points noirs » conjoncturels que les travaux actuels provoquent. « A force de ménager les intérêts des automobilistes et ceux des usagers des transports publics, on mécontente tout le monde », constatait en 2000 le directeur général des TPG, Christophe Stucki. On «mécontente toute le monde » parce qu'on s'accroche à une baudruche constitutionnelle, la « liberté du choix du mode de transport » , comme si une telle « liberté » avait un sens, sauf à accepter que des piétons et des cyclistes circulent sur les autoroutes ou que l'on puisse librement se déplacer en hélicoptère au-dessus de la zone urbaine. La « journée sans TPG » ne fait en somme que mettre en évidence des années sans priorité réelle aux TPG. Des années perdues pour une véritable liberté de circulation, dont la condition est précisément une priorité absolue, et partout où cela sera concevable une exclusivité, accordées aux transports publics, aux piétons, aux cyclistes. On en est loin : la Commission des transports du Grand Conseil a rejeté, à une voix de majorité, l'initiative populaire pour la « mobilité douce », soutenue par le PS, les Verts et le PDC, mais combattue par toute la droite, UDC et MCG compris. L'initiative demande un plan directeur de la « mobilité douce » et propose un délai de huit ans pour réaliser des aménagements cyclables continus et directs, et des traversées piétonnes attractives et sécurisées -toutes revendication que la droite affecte de considérer comme contradictoires du principe du « libre choix du mode de transport », alors qu'elles ne visent qu'à garantir ce libre choix -à moins bien entendu qu'on entende le résumer en l'alternative « écraser ou être écrasé ».

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