Nouvelles centrales nucléaires : Le test bernois du 13 février

Le 13 février prochain, les Bernoises et les Bernois se prononceront sur la construction d'une nouvelle centrale nucléaire à Mühleberg, que le Conseil d'Etat les appellent à refuser. Par ailleurs, ATEL (Aar-Tessin Electricité) a déposé une demande d'autorisation pour la construction d'une nouvelle centrale nucléaire à Soleure, près de l'actuelle centrale de Gösgen, et une troisième demande a été déposée pour une nouvelle centrale à Beznau. Dans les trois cas, il s'agit de remplacer des centrales à bout de course. Et dans les trois cas, les arguments d'un refus sont les mêmes : à l'avenir, la production d'énergie devra se baser sur des sources renouvelables, la technologie nucléaire reste porteuse de risques considérables, elle produit des déchets à la dangerosité millénaire, son bilan économique est mauvais. Les Verts et le PS ont déjà annoncé qu'ils combattraient par référendum ces demandes, qui seront vraisemblablement soutenues par la majorité de droite des Chambres fédérales. Le vote pourrait avoir lieu en 2013, et si les citoyen-ne-s s'inclinent devant le lobby nucléaire, la première des nouvelles centrales pourrait cracher ses gigawatts dès 2025.

Berne centrale

L'actuelle centrale de Mühleberg a bénéficié, il y a un an, malgré son état inquiétant (des fissures dans le manteau du coeur du réacteur) qui à lui seul justifierait sa mise à l'arrêt immédiat, d'une autorisation d'exploitation « illimitée » -en fait, pour le temps qui devrait être nécessaire à la construction et la mise en service complète d'une nouvelle centrale sur le même site. 1900 oppositions avaient été déposées par des personnes, des organisations, des partis politiques contre cette autorisation, frappée en vote populaire, en novembre 2009 et par 64 % des suffrages, d'un préavis défavorable des électrices et électeurs vaudois. Des recours ont été déposés contre l'autorisation d'exploitation et il y a un mois, après une heure de débat, le Conseil municipal de la Ville de Genève a voté, contre l'opposition acharnée de la droite, un soutien financier au comité « Mühleberg-illimité-non », puisque la Ville en tant que telle ne pouvait être recourante, et que le canton n'avait pas daigné bouger le petit doigt alors que sa constitution lui fait pourtant un devoir (que la droite de la constituante propose de diluer en une sorte d'inclination molle) de s'opposer à l'implantation d'installations nucléaires à proximité de Genève (et la proximité, pour une centrale nucléaire, se mesure en centaines de kilomètres). Mühleberg et les deux centrales, tout aussi désuètes, de Beznau, doivent être arrêtées le plus vite possible, et aux frais de leurs exploitants, qui veulent les faire fonctionner au moins jusqu'en 2020, sinon plus tard encore, et construire parallèlement trois nouvelles centrales qui poseront les mêmes problèmes, seront porteuses des mêmes risques et produiront les mêmes déchets dangereux pendant des millions d'années, dont on sera toujours incapables de se débarrasser. Comme la décision d'autoriser l'explotation « illimitée » de l'actuelle centrale de Mühleberg, les projets de nouvelles centrales manifestent le refus obstiné, quasiment autiste, d'admettre que ce mode de production de l'énergie est dépassé, qu'il est, à terme, condamné, et que s'y accrocher relève de l'irresponsabilité et du gaspillage de ressources nécessaires au développement des énergies renouvelables et des économies de consommation d'énergie. Un tiers de la consommation d'électricité pourrait déjà être, aujourd'hui, économisé, sans atteinte à la qualité de vie, si l'on avait recours aux seules technologies alternatives disponibles. Ce tiers de consommation économisable, cela représente six centrales nucléaires de la taille des actuelles Mühleberg, Gösgen et Beznau -ou des centrales qui devraient, selon le lobby nucléaire, les remplacer. Quoi qu'on entendra dire dans les mois et les années à venir, les alternatives au nucléaire existent, et les moyens que l'on s'apprête à mobiliser pour rester dans le ravin nucléaire pourraient l'être, à bien meilleur escient, et avec un sens bien plus aigu de la prospective, affectés à prendre un autre chemin. Le vote du 13 février prochain, dans le canton de Berne, et les votes ultérieurs, au plan suisse, seront donc d'une importance considérable. Malgré l'engagement du gouvernement cantonal bernois contre le projet de nouvelle centrale de Mühleberg, le résultat du 13 février reste incertain -en revanche, ce qui est certain, c'est la préparation par le lobby nucléaire d'une campagne massive et très coûteuse, prélude à une campagne encore plus massive et encore plus coûteuse lorsque l'enjeu sera porté devant le peuple suisse. D'ailleurs, ces campagnes, qui les paie ? Et quelle part de notre facture d'électricité sert à les financer ?

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