Cinquante sections du PSS demandent de revenir sur le programme du parti

Trop à gauche, vraiment, le PSS ?

Une cinquantaine de sections (alémaniques) du Parti Socialiste Suisse, ayant en travers de la gorge la révision du programme du parti adoptée, et radicalisée, lors du dernier congrès de Lausanne, demandent que le parti rouvre la discussion sur le programme. En tête de liste des choix sur lesquels la droite du PSS souhaite revenir : le soutien au principe de l'abolition de l'armée, le soutien au principe de l'adhésion à l'Union Européenne, l'affirmation de la volonté de « dépasser le capitalisme » et de ne pas se contenter de le gérer et de le socialiser... Et tous en choeur de pleurnicher sur un « virage à gauche » du PSS qui, s'il correspond à nos souhaits, est encore loin d'être une réalité.

Un virage à gauche après septante-cinq ans de virages à droite...

Qu'une partie de la base traditionnelle du PS ait quelque peine à accepter les choix des militants (puisque les congrès sont composés, non de représentants des électeurs, mais de représentants des militants, élus par eux, et non de représentants des membres cotisants mais inactifs), est une tradition au sein du PSS. Une tradition fort ancienne, d'ailleurs : lorsqu'en pleine Grande Guerre, le PSS adhère aux thèses pacifistes issues de la conférences des gauches socialistes, à Zimmerwald, la base ne suit pas. Elle ne suivra pas non plus le congrès qui décidera, dans un premier temps, après la révolution russe, de faire adhérer le PSS à la Troisième Internationale (bien lui en a d'ailleurs pris d'y renoncer). Elle n'a jamais suivi, cette base traditionnelle, les choix les plus à gauche des congrès, et des directions du parti. Elle ne les suit toujours pas. Il n'empêche : ces choix ont été faits lors de congrès démocratiques, avalisés par une majorité de délégués de sections qui ont eu à se prononcer, préalablement au congrès, sur toutes les propositions faites -des délégués qui ont reçu des instructions de vote précis -ou, s'ils ne les ont pas reçu, ou si leur section n'en a pas débattu, c'est qu'on avait précisément affaire à une base amorphe et à des sections atoniques, ne se réveillant, en sursaut, qu'une fois prises des décisions auxquelles elles auraient pu prendre part et auxquelles elles n'ont pas été capables de prendre part. Et puis soyons sérieux cinq minutes : de quel «virage à gauche du PSS » parle-t-on, dans ces sections, dans l'aile droite du parti -et dans les gazettes ? De celui que manifesterait l'adhésion au principe de l'abolition d'une institution obsolète et parasitaire (l'armée) ? de celui qui se traduirait par la reconnaissance d'une évidence que la Suisse, au coeur de l'Europe, ferait mieux d'adhérer à l'Union Européenne plutôt que d'en appliquer les décisions sans avoir pu y participer ? Ou même de celui qui s'exprimerait par l'espérance d'un « dépassement du capitalisme », en retrouvant ainsi le sens même d'un projet qui seul peut justifier l'existence d'un parti socialiste ? Si « virage à gauche » il y a, il succède à tant de « virages à droite », depuis 1937, qu'on est encore bien loin de l'objectif qui consisterait à refaire du PSS un véritable parti socialiste. Même s'il fallait pour cela perdre, dans un premier temps, des électeurs. Le commentateur du Temps nous explique gravement que des électeurs socialistes, alarmés de ce que le PS se serait placé plus à gauche que les Verts, auraient fui « vers les Verts libéraux ou le Parti bourgeois démocratique »... mais qu'est-ce que ces électeurs foutaient, à voter pour le PS ? Un PS à gauche, ça plait forcément moins à un pays de droite qu'un PS à droite. Reste à savoir à quoi et à qui pourrait bien servir, même dans un pays de droite, un PS qui ne serait plus à gauche. De parti de droite supplémentaire et superfétatoire, quelque part entre l'UDC, le PLR, le PDC, le PBD, les Verts libéraux et les Evangéliques ?

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