Elections municipales genevoises : Vive la Commune, bordel !

2011 : Les élections municipales se déroulent à Genève au moment même du 140ème anniversaire de la Commune de Paris (28 mars 1871, proclamation de la Commune de Paris - 22-27 mai 1871 : Ecrasement de la commune de Paris par l'armée du gouvernement de Versailles). Municipales à Genève, 140e anniversaire de la Commune de Paris ? Rien de commun, évidemment, entre les deux événements, l'un marquant l'histoire, l'autre ne marquant que le calendrier électoral local. Mais deux raisons tout de même de reprendre un bon vieux cri primal socialiste, communiste, anarchiste : « Vive la Commune ! »

L'Alternative, qui d'autre ?


En Ville de Genève, l'alliance du PS, des Verts et de la gauche de la gauche (« Ensemble à Gauche ») dispose de 42 sièges sur 80, l'Entente de droite (PDC, radicaux, libéraux) de 28 sièges, l'UDC de 8, une indépendante, dissidente libérale, et un indépendant, dissident UDC, complètant le tableau). Cette majorité de gauche a, à quelques épisodes conflictuels près, tenu pendant quatre ans, et fait passer tous ses principaux projets -même si ce fut parfois dans la douleur, et parfois avec l'apport, utile mais non indispensable, d'une partie de la droite : nouveau statut du personnel municipal, municipalisation de la plus grande partie du personnel du Grand Théâtre, réglement de la Gérance immobilière municipale. Sur tous ces projets, l'opposition de droite a fait du bruit, produit du vent, fait perdre du temps, mais n'a rien pu faire de plus, et du coup, parfaitement oublieuse du traitement qu'elle fait subir à ce qui reste de la gauche au parlement cantonal, s'est répandue en sanglots longs et violons automnaux sur l' « arrogance » et le «mépris» de l'Alternative. Or on ne peut analyser la situation politique municipale sans porter le regard sur la situation politique cantonale : Genève est gratifiée depuis 2009 du parlement cantonal le plus à droite depuis 1941, c'est-à-dire depuis l'interdiction du Parti Socialiste de Léon Nicole par le Conseil fédéral, et la déclaration d'inéligibilité de ses dirigeants, de ses cadres et de ses militants les plus connus. A ce parlement « introuvable » né des élections de 2009 et des divisions de la gauche de la gauche, s'ajoute un gouvernement lui aussi de droite, quoi qu'il en soit de la présence en son sein de deux Verts fort pragmatiques et d'un socialiste qui s'est lui-même déclaré autonome de son propre parti... le tableau est complété d'une Constituante de droite, d'un Parlement fédéral de droite, d'un gouvernement fédéral de droite, sans oublier 40 communes genevoises de droite. Face à cette majorité parlementaire et gouvernementale de droite, un électorat versatile (parfois de gauche, parfois de droite, presque toujours majoritairement abstentionniste), et deux villes de gauche -les deux principales villes du canton : Genève et Vernier, avec une majorité «alternative» au Conseil municipal et au Conseil administratif, plus deux autres villes disposant d'une majorité « alternative » au Conseil administratif :Lancy et Onex. Quelques doutes que l'on puisse parfois nourrir sur la cohérence de ces majorités, et quelque énervement que puissent susciter les démangeaisons centristes des uns et les querelles de préau d'école entretenues par les autres, elles font de ces Municipalités, et en particulier de la Ville de Genève le seul réel contre-pouvoir institutionnel au parlement et au gouvernement du canton. Un contre-pouvoir indispensable: « Chaque année, nous devons un peu plus pallier les lacunes sociales du canton », rappelle, pour « Ensemble à Gauche », Vera Figurek. Ce rôle de contre-pouvoir que joue la Ville, explique en grande partie la grosse envie « bourgeoise » de dépecer, voire d'abolir, la municipalité genevoise, dont on rappellera qu'il a fallu une révolution (radicale) pour la rétablir, après que la vieille oligarchie de l'Ancien Régime, revenue au pouvoir dans les fourgons des armées de la Sainte-Alliance, l'ait supprimée en 1815... On rappellera aussi que, dans l'actuelle Constituante, ce sont les héritiers des «restaurés» de 1815 qui voulaient à nouveau supprimer, ou à défaut, éclater, la commune de Genève, dans le même temps où ils charcutaient les droits sociaux. Bref, on va pouvoir se la jouer Communards municipaux contre Versaillais cantonaux, histoire de remuer un peu de ce qui nous reste de mémoire historique, et surtout de maintenir non seulement une majorité relative de sièges pour les partis de l'Alternative (cette majorité là est acquise, l'Entente de droite étant hors d'état de la reprendre), mais une majorité absolue, pour ne pas dépendre des sautes d'humeur et des incohérences politiques d'un parti, le MCG, qui a composé sa liste pour les élections en ramassant les largués des autres partis. Genève mérite mieux que jouer sa politique sociale, sa politique culturelle, sa politique d'aménagement, sa politique du logement et sa politique des transports au bilboquet. Et ni en Ville, ni à Vernier il n'y a d'autre majorité possible que celle de l'Alternative.

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