Elections zurichoises et vaudoises : déroute du « centre-droit »

C'est rienka la faute aux Japonais

Les élections du week-end signent une nouvelle déroute du « centre-droit », à Zurich et dans le canton de Vaud. A Zurich, ce sont les Verts libéraux qui, en doublant leur représentation parlementaire, et le Parti bourgeois-démocratique, qui font figure de vainqueurs des élections cantonales, lourdement perdues par les radicaux-libéraux. Dans le canton de Vaud, les socialistes et les Verts progressent dans les exécutifs municipaux des villes, et là aussi, ce sont les radelibes qui reculent. Cependant, la gauche stagne dans les parlements municipaux, où l'UDC (en l'absence d'un équivalent vaudois du MCG) progresse. Explication des perdants : tout ça, c'est la faute à Fukushima. A y regarder de plus près, les retombées électorales suisses de l'accident nucléaire japonais ne sont pourtant pas si évidentes...

Fukushima, mon désamour...

A Zurich, ce ne sont pas les deux partis les plus clairement antinucléaires (les Verts et le PS) qui progressent, même si les Verts regagnent un siège au Conseil d'Etat (mais ils stagnent au Grand Conseil) et si le PS fait élire l'un de ses candidats en tête de l'élection du gouvernement (mais il perd un siège au parlement) : les grands vainqueurs des élections cantonales sont les Verts libéraux et le Parti bourgeois démocratique. Et le parti le plus «pronucléaire» de l'offre électorale locale, l'UDC, ne perd que deux sièges au parlement. En clair : l'« effet Fukushima » invoqué par la droite démocratique (le « centre-droit »...) pour expliquer sa défaite tient bien plus du prétexte, ou de l'excuse, ou du trompe-l'oeil, que de l'analyse. D'autant que les résultats des élections municipales vaudoises et genevoises vont dans le même sens que ceux des cantonales zurichoises: à force de se droitiser et de courir aux basques du berger udéciste, les moutons PLR et PDC ont obtenu le résultat qu'ils méritaient : se faire bouffer la laine sur le dos par plus à droite qu'eux, et perdre quelques poils supplémentaires au profit d'un centre un peu plus centriste (les Verts libéraux à Zurich), sans que Verts et socialistes n'en profitent réellement (à Genève et dans le canton de Vaud, c'est plutôt la « gauche de la gauche » qui progresse). Ces élections municipales et cantonales, quelques mois avant les fédérales, ont donc valeur de révélateur, de clarificateur : les hésitations, les contradictions, les alliances à géométrie variable, et fort peu euclidienne, des libéraux-radicaux et des démocrates-chrétiens les rognent sur leur gauche et sur leur droite, et les réduisent à ne plus être que des forces d'appoint de la gauche ou de l'UDC. Et le seul « effet Fukushima » perceptible est celui, désastreux, des tentatives radelibes et démo-chrétiennes de se faire passer, après la catastrophe japonaise, pour des partisans de la «sortie du nucléaire» : les antinucléaires n'ont accordé qu'un ricanement dédaigneux aux palinodies des Pelli et des Darbellay, et les pro-nucléaires se sont reportés sur l'UDC, seul parti gouvernemental a assumer son choix de ne pas toucher aux centrales existantes, et d'en construire de nouvelles - et d'assumer ce choix jusqu'à la caricature, en nous expliquant benoîtement que si on a besoin de centrales nucléaires, c'est à cause de l'immigration. Il en est ainsi allé de l'enjeu nucléaire comme de l'enjeu sécuritaire : les partis qui résistent à la poussée du populisme de droite (les Verts et le PS) sont ceux qui lui opposent un contre-discours clair, les partis qui succombent à cette poussée sont ceux-là même qui ont cru pouvoir l'accompagner en durcissant leur discours sécuritaire tout en camouflant leurs accointances avec les nucléocrates. Il y a comme une sorte d'étrange mimétisme, inexplicable scientifiquement, dans ce seul « effet Fukushima » discernable dans les élections de ces dernières semaines : Des partis qui voulaient se présenter aux élections fédérales en tant que garants d'une politique « apaisée », « raisonnable», d'un « renouveau de la concordance », en sont réduits aujourd'hui à regarder s'enfuir leurs électeurs comme autant d'émanations d'un réacteur nucléaire tsunamisé, et à compter les coups que se donneront la gauche d'un côté, l'UDC de l'autre, sans plus pouvoir cultiver autre chose que la nostalgie d'un temps où un ancien président du parti radical, Yann Richter, pouvit déclarer en parlant de lui et des siens, après l'échec d'une candidature socialiste féminine au Conseil fédéral : «on sait qui commande dans ce pays»..

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