Pantaleone et Matamore réconciliés sur le dos des immigrants

BUFFONI !

Après s'être assez copieusement houspillés pour la galerie, Sarkozy et Berlusconi se sont donc réconciliés. Ces bouffons s'agitebnt toujours pour la galerie, mais surtout pour leurs extrême-droites respectives, et sur le dos des immigrants africains. Qui se ressemble s'assemblant, le président français et le premier ministre italien n'avaient guère de divergences sur le fond. Les voilà donc unis pour exiger une réforme de l' «Espace Schengen » afin de pouvoir, sous un prétexte ou un autre mais qu'on appellera « circonstances exceptionnelles », refermer sur les Africains les frontières que Schengen voulait ouvrir aux Européens.

Entre le Front et la Ligue, Frontex et Lampedusa

Outre une absence totale de scrupules, une vulgarité confondante et une inculture politique abyssale, Berlu et Sarko ont en commun la concurrence que leur livrent encore plus à droite qu'eux, et donc la tentation d'en rajouter dans la xénophobie et la paranoïa migratoire, afin de ne pas se laisser distancer, l'un par la Lega Nord, l'autre par le Front National. Deux partis qui, outre leur fond de commerce au moins xénophobe, voire raciste, cultivent le même attachement fétichiste à la frontière (et donc à la nationalité au sens juridique du terme) comme délimitation simple du « nous » et des « autres », des « pas comme nous ». Or la convention de Schengen visait précisément à abolir les contrôles aux frontières entre les 25 Etats (dont la Suisse) qui l'avait signée. Mais abolir des contrôles aux frontières, qu'est-ce, sinon abolir la frontière dans ce qu'elle a de matériel, de tangible, et faire des frontières entre Etats de simples limites territoriales du genre de celles qui distinguent les cantons suisses, les Länder allemands, les régions italiennes ou espagnoles les unes des autres ? Une fois un « visa Schengen » accordé, ce sésame permettait de circuler librement entre les 25 Etats de son espace, comme un visa accordé par la Suisse permet de circuler librement entre les 26 cantons de la Confédération. Ce que réclament de concert Pantaleone et Matamore, c'est la possibilité de vider Schengen de son sens. Non parce que ce sens leur déplaît à eux, personnellement, mais parce que leurs concurrents d'extrême-droite y sont absolument et définitivement allergiques, et que la «libre circulation », si relative et européocentrique qu'elle soit, leur donne l'occasion de multiplier des campagnes tonitruantes politiquement dangereuses pour des gouvernants déconsidérés qui ne reposent plus que sur l'acquiescement d'une droite de plus en plus droitière. C'est d'ailleurs, en Italie, un ministre de la Ligue du Nord, Roberto Maroni, ministre de l'Intérieur, qui avait déclenché la parodie d'hostilités politiques entre la France et l'Italie, en accordant à 20'000 Tunisiens arrivés par la mer des « visas Schengen » leur permettant d'entrer en France, puisqu'ils en parlent la langue et qu'y vit une plus importante émigration tunisienne qu'en Italie. Le gouvernement italien cherchait à se débarrasser spectaculairement des immigrants tunisiens, le gouvernement français chercha à les empêcher non moins spectaculairement d'entrer en France, les immigrants se retrouvant ainsi pris en otages à la frontière entre la Ligue du Nord et le Front National... Et puis, si Berlu et Sarko veulent affaiblir Schengen, ils veulent aussi renforcer l'outil dont l'Europe s'est dotée pour se faire forteresse contre l'immigration, « Frontex », l'Agence européenne pour « la gestion et la coopération opérationnelle aux frontières extérieures » de l'Espace Schengen. Une agence qui avait établi de solides liens de coopération avec la Libye, du temps de la splendeur de Frère Mouammar, transformé en garde-frontière de l'Europe, et grassement rétribué pour empêcher la racaille africaine de déferler sur l'Europe blanche et chrétienne- car si l'espace Schengen est un espace de libre-circulation entre Européens, il n'est pas un espace de libre immigration de la plèbe périphérique. Cela écrit, qu'on prenne garde à ne pas se sentir concernés par les gesticulations de Pantaleone et Matamore : s'ils nous divertissent amèrement, par leurs parodies de brouilles et leurs parodies de réconciliation, la xénopathie qu'ils cultivent n'est pas circonscrite à leur aire de jeu, et si eux veulent empêcher les Tunisiens d'entrer en Europe, d'autres, ici, font campagne contre la « mobilité douce » en lui proposant comme alternative de « bloquer les voitures des 70'000 frontaliers » aux frontières de Genève. On a à la fois les menaces et les bouffons qu'on mérite, et le MCG vaut bien la Ligue du Nord ou le Front National.

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