Des avions démocratiquement furtifs passent sur l'Assemblée fédérale : quatre milliards soustraits au référendum populaire

Mercredi dernier, nous avons pu mesurer toute l'influence dont disposent les casques à boulons et le lobby des avionneurs militaires sur le Parlement fédéral : à la suite du Conseil national, le Conseil des Etats s'est prononcé en faveur d'une augmentation du budget annuel de la défense nationale, le portant à cinq milliards, et en faveur de l'acquisition de nouveaux avions de combats, qui nécessitera quelques milliards supplémentaires qu'il faudra bien trouver quelque part -de préférence là où ils seraient bien plus utiles en temps de crise. Toutes les propositions du PS visant à soumettre au référendum populaire l'achat de ces nouveaux joujoux ont été balayées. Du coup, le PS annonce une initiative populaire donnant au peuple le droit de se prononcer, et lance déjà une pétition à l'appui de cette exigence : http://www.sp-ps.ch/fre/S-engager/

Hold-up, braquage, filouterie ou bonneteau ?


La majorité de droite et d'extrême-droite du Parlement fédéral a donc donné son feu vert à une armée surdimensionnée de 100'000 hommes (dont quelques femmes) pour cinq milliards par an (ça fait quand même cinquante mille balles par tête de pipe de tabac de troupe), et à l'achat, sur le budget fédéral annuel, de 22 nouveaux avions de combat sans garantie de pouvoir les payer, puisqu'on ne sait pas où trouver le pognon, et surtout sans donner au peuple la possibilité de se prononcer sur cette dépense somptuaire : elle ne fera pas l'objet d'un financement spécial qui aurait pu être combattu par un référendum populaire, mais sera intégrée au budget, soustrait à tout référendum. « Hold-up », «braquage démocratique », « filouterie d'auberge politique », a lâché le président du PS. « Bonneteau budgétaire » nous aurait bien plu aussi et aurait résumé la volonté de soustraire au référendum une dépense de quatre milliards de francs (alors qu'on passe notre temps à voter sur des broutilles), portée notamment par un parti (l'UDC) qui se réfère constamment aux droits populaires -mais pour en faire un usage qui les dénature et s'empresser de les remiser au placard lorsqu'ils pourraient être exercés contre ses fétiches. En juin encore, le Conseiller fédéral UDC Ueli Maurer, Ministre de la Défense, s'engageait à ce que le peuple puisse voter sur l'achat des gros navions militaires, et dimanche dernier, il faisait, faux derche, le faraud dans Le Matin : « je ne serais pas mécontent d'un référendum qui deviendrait en réalité un vote pour ou contre l'armée (que nous) gagnerions ». Ueli der Soldat n'a cependant pas été le dernier à tout faire pour qu'un tel référendum (qui ne provoquerait qu'un vote sur une dépense inutile, pour une armée dont l'utilité est elle-même sujette à caution) soit rendu impossible. A ses côtés, ou derrière lui, les lobbystes des avionneurs (Dassault, Saab...) ont dépêché quelques drones dans les cercles qui phosphorent sur les missions et les moyens de notre glorieuse armée, avec pour mission de faire avaler au parlement la consumation de quatre milliards pour des prunes -mais volantes. D'entre les 17 membres du Conseil consultatif de l'armée suisse, on trouve un représentant des syndicats patronaux de la métallurgie, directement intéressés à l'achat de nouveaux avions à la France ou à la Suède, de juteux contrats pouvant s'ensuivre. Deux autres membres de ce Conseil, chargé de conseiller le Département fédéral de la Défense, siègent dans des associations (la Communauté de Travail pour une armée de milice efficace et l'Association pour la politique de sécurité) soutenues par la même agence de relations publiques, Farner, que celle de Dassault, fabricant de l'un des avions en compétition, le « Rafale ». Le PS a donc annoncé qu'il allait, comme le Groupe pour une Suisse sans armée l'avait fait en 2008, mais pour la retirer deux ans plus tard lorsque le Conseil fédéral avait décidé de reporter le remplacement des vieux « Tiger», lancer une initiative populaire, en attendant quoi il lance une pétition demandant (comme Ueli der Soldat en juin) que le peuple puisse se prononcer sur la question. La pétition se signe ici : http://www.sp-ps.ch/fre/S-engager/

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