Fonds de tiroir

On a encore à nouveau reçu comme tous les membres du Conseil Municipal de Genève, une nouvelle lettre de mise en garde de notre vénérée présidente qui, au nom du bureau du susdit Conseil, nous avertit qu'« après une discussion approfondie », les membres du susdit bureau « ont résolu que dès ce jour (21 octobre), il y aura dépôt de plainte systématique contre tout membre du Conseil municipal qui communiquera, par quelque moyen que ce soit, et dans quelque média (sic) que ce soit, sur des débats ou votes intervenus dans les commissions du Conseil municipal, tant que le rapport de l'objet en question n'aura pas été inscrit à l'ordre du jour des séances plénières ». Et de nous rappeler que la violation du « secret de fonction est grave et tombe sous le coup de l'article 293 du Code pénal suisse ». D'où une interrogations angoissée nimbée d'un léger sourire : On espère que cette lettre n'était pas frappée du sceau de la confidentialité, parce que sinon, en la publiant on aurait violé l'interdiction de révéler l'interdiction de violer le secret de fonction, d'où une vertigineuse mise en abyme, puisqu'on finirait par être traîné devant les tribunaux pour avoir publié la mise en demeure de ne pas publier la sommation de ne pas commenter la mise en demeure de ne pas ricaner sur l'interdiction de publier l'interdiction de communiquer (quelqu'un a une aspirine ?)... on se marre : l'art. 293 du Code pénal ne menace que d'une amende. Alors, quand déjà on ne paie même pas celles des TPG...

A Genève, avec un résultat lui donnant grosso modo « droit » à deux sièges, le PS en obtient trois, grâce, notamment aux suffrages des listes de la « gauche de la gauche » avec lesquelles le PS était apparenté, mais qui, divisées, n'ont à nouveau pas été foutues de revenir au Parlement fédéral. Merci du cadeau, camarades. ça prouve que la gauche reste partageuse. Mais bon, il serait peut-être temps de vous poser des questions sur l'efficacité des négociations d'appareils pour le bricolage de listes pseudo « unitaires », non ?

Alors voilà, ce qui est sûr, c'est que Mouammar Kadhafi est mort. Et pas de belle manière. Mais ce qui n'est pas sûr, c'est précisément comment : à la suite d'un affrontement entre ses gardes et ses assaillants ? lynchés par ceux-ci (ce que les vidéos semblent suggérer), des suites des blessures reçues dans le bombardement de son convoi par l'OTAN ? L'ONU demande une enquête, la veuve du Guide aussi, mais on parie qu'enquête, il n'y aura pas. Parce que personne qui pourrait en mener une n'a intérêt à ce qu'il y en ait une. Et que Kadhafi mort, même salement, ça arrange tout le monde. A commencer par ses anciens copains occidentaux Sarkozy ou Berlusconi. Qui doit regretter in petto son copain de bunga-bunga. Ben oui, c'est comme ça : du bunga-bunga au boum-boum, du capitole à la roche Tarpéienne et des palais occidentaux à une bouche d'égoût de Syrte...

Une bonne nouvelle est tombée samedi, suivie d'une moins bonne : le général Khaled Nezzar, ancien ministre algérien de la Défense, l'un des chefs du clan des « éradicateurs » et l'un des responsables de la « sale guerre » contre les islamistes, armés ou non, en Algérie dans les années '90, a été interpellé jeudi à Genève, sur dénonciation de l'association Trial, qui lutte contre l'impunité des puissants. Le Ministère public de la Confédération a ouvert une instruction contre Nezzar pour crimes de guerre (exécutions sommaires, assassinats collectifs, torture, disparitions...). ça, c'était la bonne nouvelle. La moins bonne, c'est qu'après un jour d'interrogatoire, Nezzar a été remis en liberté vendredi, sur la promesse de se présenter devant la justice suisse durant la suite de la procédure. Et évidemment, sitôt remis en liberté, il a pris la poudre d'escampette. Et il y a fort à parier qu'il ne remettra plus les pieds en Suisse tant qu'il ne sera pas certain de n'y rien risquer. Mais bon : son arrestation et l'ouverture d'une procédure contre lui est un geste fort, même si ensuite, comme si elle avait eu peur de son propre réflexe, la justice helvétique s'est empressée de donner au général la possibilité de lui échapper. Et c'est ainsi qu'un bon mouvement peut être suivi d'un lâche soulagement : ouf, on n'aura pas à juger en Suisse un potentat algérien.


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