« Gauche de la gauche » : Savez-vous vous replanter dans les choux ?



Nouvelle plantée de la « gauche de la gauche » genevoise aux élections : les mêmes causes qui l'ont éjectée du parlement cantonal il y a deux ans l'ont maintenue ce week-end hors du parlement fédéral (où l'unique siège, vaudois, de cette présumée « gauche de la gauche » a également été perdu). A Genève, en tout cas, ces causes sont si connues, si précisément identifiables, qu'on s'interroge sur leur permanence : la division, les querelles de voisinage politique, les concurrences de jardinets électoraux, les calculs d'organisations et les réglements de compte personnels. Il y a du trouble obsessionnel compulsif, là-dedans. ça devrait se soigner, mais comment ? Continuez comme ça, camarades, et votre dilemme se réduira à l'alternative que le « vote utile » de ce week-end suggère : rejoindre le PS ou disparaître du champ politique visible...

Les socialistes, qui d'autre ?

Résumons donc le sort des urnes fédérales : recul de la droite de la droite (UDC et PLR), élargissement du « centre » (à l'automne, les marais s'étendent, c'est dans l'ordre des pluies), léger affaiblissement de la gauche, du fait d'un recul des Verts que ne compense pas le succès du PS et de la disparition des deux dernières représentations parlementaires (celles du PCS et du POP), déjà presque anecdotiques, d'une gauche autre que le PS et les Verts. Il entre sans doute du « vote utile » (en faveur du PS) dans le résultat calamiteux de la « gauche de la gauche», ce week-end. Un « vote utile » (que symbolise à merveille le résultat vaudois : le PS gagne deux sièges, les Verts et La Gauche en perdent chacun un...) en faveur de la principale force politique de gauche, la seule dont on puisse réellement faire usage institutionnel contre la droite et l'extrême-droite de ce pays. En effet, quoi que l'on pense ou dise et que l'on ait à critiquer des choix et les positionnements du PS, cette force, ici et maintenant, c'est lui, et lui seul (« les socialistes, qui d'autre ? »). Mais ce constat ne répond pas à la question (qui ne se pose d'ailleurs pas qu'en Suisse) : pourquoi diable ce qui dit se veut à la gauche du PS se trouve incapable de capitaliser le mécontentement (ici), voire la révolte (ailleurs), populaires ? « La Gauche » s'est précisément créée pour surmonter les concurrences et les guerres de territoire entre organisations et micro-organisations : en partant de la base pour construire un nouveau mouvement, à partir des militantes et des militants des organisations existantes, ou de sympathisantes et sympathisants membres d'aucune organisation mais disposés à rejoindre quelque chose de neuf, qui ne se créerait pas comme la Nème version d'un cartel de formations négociant entre elles, âprement mais sans y arriver pour un temps plus long que celui d'une campagne électorale, leur regroupement sous une bannière commune (Alliance de Gauche, A Gauche Toute, Ensemble à Gauche... prochaine étape : Au fond à Gauche ?). C'était d'un nouvel espace politique « à la gauche du P » dont il était question, prenant la place des jardinets entretenus depuis des lustres, les uns à côté des autres, mais clôturés séparément les uns des autres. Bref, « La Gauche » n'avait (et n'a encore) de sens que pour remplacer solidaritéS, le Parti du Travail, le Mouvement pour le socialisme, la Gauche anticapitaliste, les Communistes, le DAL, les Indépendants de gauche etc... etc.... Pour les remplacer, pas péur s'y ajouter... Or pour qu'elle puisse les remplacer, il faudrait qu'elle s'en tienne à son intuition première : se construire à partir des personnes, non à partir des organisations, et, si elle décide de prendre part à des élections, décider des candidatures qu'elle y présente ans tenir compte d'une quelconque répartition des places entre les différentes organisations encore existantes. C'est d'ailleurs ce que suggère le secrétariat national de « La Gauche » : « travailler en amont, pour éviter de perdre trop de temps en campagne dans des calculs interminables, laissant venir se sous-apparenter les derniers dissidents éventuels, et ne nous occupant pas de commenter les faits et gestes de ceux qui vont choisir de rester à part » . Il serait temps, en effet.

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