Refus du salaire minimum, enterrement du revenu minimum d'aide sociale: Genève a voté, mais quelle Genève ?

La majorité (un peu moins de 55 %) d'une minorité (celle qui participé au vote) de citoyennes et de citoyens genevois a donc à la fois refusé le principe d'un salaire minimum, et accepté de supprimer le revenu minimum d'aide sociale. Pendant qu'à Neuchâtel, où l'on votait aussi sur le salaire minimum, celui-ci était accepté avec une majorité comparable à celle qui le refusait à Genève. Et qu'à Saint-Gall, pour l'élection au Conseil des Etats, le président de l'Union Syndicale Suisse terrassait le président de l'UDC. On ne peut pas toujours être les meilleurs. Et on fera mieux la prochaine fois. C'est promis. Reste à nous en donner les moyens.

Ce-n 'est-qu'un-début-continuons-le-combat ! (ad libitum)


Bon, on a perdu. Et c'est navrant, mais explicable. Et ce n'est ni la première, ni la dernière fois. Et puis, la Ville et les villes, et les quartiers populaires, ont voté comme nous le souhaitions, les communes résidentielles et les quartiers bourgeois comme nous nous y attendions. Et le résultat naît du différentiel de participation entre la Genève de gauche et la Genève de droite : la première s'est massivement abstenue, la seconde a voté. Avec 46% des suffrages pour une initiative qui n'était soutenue que par la gauche et les Verts, les élections cantonales de 2013 ne s'annoncent pas trop mal (un tel pourcentage suffit à obtenir une majorité au parlement et au gouvernement, si les trois forces qui l'atteignent partent unies -et que celle des trois qui a accoutumé de gaspiller ses suffrages et les diviser autant de listes qu'elle abrite de candidats à la chefferie, admet l'évidence qu'il faut plutôt les rassembler). Reste qu'il n'est pas inutile de se demander pourquoi nous avons, hier, perdu sur deux thèmes où nous aurions dû, et pu, gagner à Genève. Il y a évidemment de la récurrence dans un tel résultat : on sait bien que les inégalités de ressources matérielles se traduisent en inégalités de ressources politiques, et que cela vaut pour les individus (l'abstention est massive dans les couches populaires, la participation est majoritaire dans les couches dominantes) comme pour les organisations et les moyens qu'elles engagent dans les campagnes politiques. Alors bien sûr, il y a les mensonges de la campagne patronale contre le salaire minimum; bien sûr aussi, il y a le contexte de crise, qui pousse au repli sur soi plutôt qu'à la solidarité, et qui incite à s'en prendre à plus pauvre que soi plutôt qu'à plus riche.; bien sûr enfin, il y a le fait qu'une grande partie des travailleuses et des travailleurs qu'un salaire minimum protégeraient n'ont pas le droit de vote au plan cantonal, que la majorité de celles et ceux qui l'ont s'abstiennent, et que la majorité des travailleurs pauvres, les working poors, sont sans droits politiques. Et que des 4000 travailleurs de la construction qui manifestaient vendredi à Genève, seule une minorité pouvaient voter dimanche (et combien d'entre eux l'ont fait ?). Et que le MCG a fait ce qu'on pouvait attendre qu'il fasse : rouler pour la droite. Mais expliquer un vote comme celui d'hier par ces seuls éléments, dont le moins que l'on puisse dire est qu'ils ne datent pas d'hier, et qu'ils marquent tous les votes « sociaux » (sur les conditions de travail, sur les salaires, sur les retraites, sur les assurances...) ne convaincra ni ne consolera personne. Nous sommes arrivés à gagner en votation contre les campagnes de la droite, dans un contexte social déprimant, malgré l'abstention régnant dans les « couches populaires » et l'absence de droits politiques pour les étrangers. Or hier, à Genève, nous avons perdu. Et si nous avons perdu, c'est que nous n'avons pas réussi à mobiliser sur nos propositions, et nos oppositions, celles et ceux pour qui nous les faisions et les exprimions. Et ce n'est la faute de personne d'autre que la nôtre, que cette incapacité à combler le différentiel de participation entre communes de gauche et communes de droite, entre quartiers populaires et quartiers résidentiels, entre groupes sociaux à bas niveau de revenu et de formation et groupes sociaux privilégiés matériellement et culturellement. Il faudra que nous nous en souvenions, lorsqu'il s'agira de faire voter pour l'initiative syndicale proposant l'instauration d'un salaire minimum de 4000 francs par mois (au moins) au plan suisse. Certes, alors l'embrouillage patronal sur le thème de la menace d'un salaire minimum de 2500 balles par mois ne pourra plus fonctionner puisque l'initiative fédérale propose un seuil précis, mais l'annonce de l'apocalypse économique, des faillites des PME et la fin d'un « partenariat social » sur lequel le patronat est le premier à s'asseoir lourdement quand ça l'arrange, nous l'entendons déjà... Il est vrai qu'on l'entendait déjà en 1877, cette musique, lorsque la loi sur les fabrique décréta l'interdiction du travail des enfants et l'instauration de la semaine de travail de 66 heures... Ce n'est qu'une vieille antienne ? Pour le salaire minimum, une autre s'impose ce n'est qu'un début, le combat continue...


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