Le Conseil fédéral reporte sa décision sur la traversée du petit lac : O rage, O désespoir ? Bof...

Le financement fédéral de la traversée routière de la rade ou du petit-lac de Genève est donc renvoyé à une deuxième phase d'études, d'ici 2014, à la grande déploration de ses partisans qui attendaient de Maman Helvetia qu'elle prenne ce projet plus au sérieux qu'il le mérite. Humiliation suprême : la Confédération accepte de financer le contournement autoroutier du Locle, de La Chaux-de-Fonds et de Morges, dans le même temps où elle se donne un délai supplémentaire pour se prononcer sur le fétiche auroutier de la droite genevoise. « Cela démontre que ce projet (celui de la traversée de la rade ou du petit-lac) n'est pas prioritaire pour Berne », s'indigne le directeur de la Chambre de Commerce. C'est assez bien vu. Et ça tombe bien : pour des tas de gens à Genève (dont nous, modestement), ce truc n'a rien, mais alors vraiment rien, de prioritaire.

La traversée routière du petit lac ? C'est notre horizon à nous...

n a beaucoup aimé lire les réactions du Groupement patronal « Transports et environnement », de la Chambre de commerce et d'Industrie (CCIG), du PLR et du Conseil d'Etat à l'annonce du report d'un éventuel soutien financier de la Confédération à la traversée routière de la rade ou du petit-lac. « Dans le meilleur des cas, cela repousse la traversée. Dans le pire des cas, ça l'enterre », résume, amèrement, mais judicieusement, le directeur de la CCIG. Certes. la douleur des autres devrait éveiller de la compassion. Mais tout dépend de qui sont ces autres et de ce qui les fait souffrir, et là, la douleur de la droite, franchement, elle nous fait plutôt marrer. On doit avoir mauvais fond (lacustre).

La Chambre de commerce, le Conseil d'Etat, le PLR sont donc tous « profondément déçus » que le Conseil fédéral n'ait pas « mis le contournement de Genève au même niveau que celui de Morges » (c'est le CCIG qui geint). C'est qu'on est une grande ville, nous, pas un village lacustre. Et d'en remettre une couche (de béton) : pourquoi la Confédération est-elle prête à financer les contournements du Locle et de la Chaux de Fonds et pas celui de Genève ? euh... peut-être parce que les contournements du Locle et de la Chaux de Fonds sont encore à réaliser alors que celui de Genève, même s'il n'est pas encore bouclé, se fait déjà par une autoroute terrestre... peut-être aussi que le projet actuel de traversée de la rade ou du petit-lac accumule les défauts (tracé contestable, nocivité écologique, utilité douteuse, contradiction avec l'objectif de réduire la part de l'automobile dans les déplacements), que la Confédération n'avait que 5 milliards et demi de francs à investir dans l'élimination des « goulets d'étranglement » du réseau autoroutier, qu'il ne lui reste donc plus, après ses dernières décisions, que 4 milliards, soit le coût du seul projet de traversée de la rade genevoise, ou du petit lac. Qui peut croire que la totalité des fonds encore disponibles seront affectés à ce machin ? Et qu'il n'y a rien de mieux à faire de quatre milliards que de les y engloutir ?

« Traversée de la rade : il faut que Genève rame » (pour obtenir le soutien de Berne), titre l'édito de la Tribune de Genève d'hier... bonne idée, ça, la rame, pour la traversée du petit lac... bonne idée aussi, de poser la traversée routière de la rade comme un horizon : depuis Colomb et Magellan, on sait que l'horizon est une ligne inatteignable, qui recule au fur et à mesure que l'on croit avancer vers elle. Alors quand la Julie invite les deux représentants genevois au Conseil des Etats, la socialiste Liliane Maury-Pasquier et le Vert Robert Cramer, à se « faire résolument les avocats » de cette ânerie, on ne pourra que suggérer, mezzo voce, à Liliane et Bob : surtout pas de zèle. Si vous tenez vraiment à ramer avec les autres, ramez, mais mollement. Et si possible à contre-direction. Ou alors dans le vide, en moulinant de la rame au-dessus des flots... Et laissez le Conseil d'Etat, la droite et le TCS nous fixer la traversée de la rade comme horizon programmatique. C'est beau, un horizon. Parce que c'est lointain. Le genre abolition de la propriété privée et de l'Etat dans un programme socialiste libertaire, quoi... à l'horizon de la prochaine glaciation, quand le lac sera totalement gelé, transformé en glacier, et qu'on pourra le traverser à pieds secs. Si on est toujours là et qu'on a toujours des pieds.

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