L'autre enjeu du 17 juin : l'organisation des institutions publiques



Gouvernance, vous avez dit gouvernance ?

Le 17 juin prochain, à Genève, on ne votera pas seulement pour choisir qui (Anne, donc) occupera le siège laissé vacant au Conseil d'Etat après la démission de Mark Muller, on votera aussi sur une loi modifiant considérablement le mode de « gouvernance » (puisque c'est comme cela que l'on dit désormais en notre contemporaine langue de bois politique) des conseils d'administration et conseils de fondation des établissements publics autonomes. On votera, parce que les syndicats et les partis de gauche ont lancé et fait aboutir un référendum contre une loi qui réduit le peu de contrôle démocratique existant sur ces institutions. Et on votera « non ».


Une évidence, deux menaces, trois raisons de dire NON...

La loi soumise au vote populaire est un pur produit de la majorité parlementaire de droite dont la République de Genève se trouve affublée par l'un de ces accidents de l'histoire qu'on ne peut attribuer en l'ocurrence qu'à l'incompétence électorale de l'opposition de gauche. Cette loi va se traduire par une réduction abrupte du nombre de membres des conseils d'administration et de fondation des grandes entreprises publiques autonomes, réduction qui se fera par celle des représentants du parlement et celle des représentants du personnel. Les représentants politiques ne seront plus, au maximum, que trois, et ne seront plus désignés par le parlement mais par le gouvernement -la plupart des partis n'auront donc plus de représentants. Le but, là, est d'évincer de potentiels questionneurs, de putatifs gêneurs, de menaçants trublions capables de révéler à leurs mandants (leur parti, le parlement, la population) ce qui se dit et se fait là où ils les représentent. Quant à la représentation du personnel, elle sera limitée à une seule personne, sans suppléance possible, même pour des établissements rassemblant plusieurs centaines d'employé-e-s actifs dans des domaines trop divers pour qu'une seule personne puisse efficacement les représenter tous et toutes. Et là, le but est de neutraliser la plèbe salariée.

Les propositions soumises au vote populaire reprennent pour l'essentiel des propositions qui ont déjà été refusées par les citoyennes et les citoyens, à plus de 60 % de majorité, en juin 2008, mais elles les étendent à l'ensemble des établissements publics autonomes. Or ces établissements ne sont pas des entreprises privées dont les propriétaires (c'est-à-dire les propriétaires du capital) peuvent se croire en droit de faire ce qu'ils veulent. Ces établissements publics sont, fondamentalement, la propriété de celles et ceux qui les paient, par leurs impôts et leurs taxes alimentant les budgets publics : les habitantes et les habitants de la République. Et la fonction, la règle, le rôle de ces établissements est de garantir la fourniture de prestations qui correspondent à des droits : la santé, l'aide sociale, les transports, le logement, l'alimentation énergétique, l'accès à l'eau potable, la culture etc... Les critères de « gouvernance » de tels établissements ne peuvent être les mêmes que ceux d'entreprises privées: les premiers doivent assurer des droits, les secondes cherchent à tirer du profit d'activités marchandes. Et on ne « gouverne » pas la garantie des droits comme on « gouverne » la recherche du profit. Ou alors, on cesse de garantir ces droits.
Avec les propositions soumises au vote le 17 juin, on passe d'une « gouvernance » qui respecte un minimum de représentativité démocratique, à une «gouvernance» purement technocratique, dont les critères ne seront plus ceux de l'intérêt public, mais ceux de l'efficacité fonctionnelle, même au prix d'une dégradation des prestations à la population et des conditions de travail du personnel.

Le refus de cette loi, auquel la gauche et les syndicats appellent, est donc fondé sur une évidence et deux menaces : l'évidence d'un recul démocratique, les menaces d'un recul social. Une évidence, deux menaces, trois raisons de dire NON...

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