Législatives françaises : premier tour « normal » pour le président « normal »...

Une majorité pas trop majoritaire...

François Hollande s'est défini lui-même comme un « président normal » (comme si dans un système présidentiel à la française, le qualificatif de « normal » pouvait s'appliquer au Chef de l'Etat post-gaullien...). ce président «normal» jouait dimanche dernier, et jouera encore dimanche prochain, une partie de sa capacité d'action politique : avec quelle majorité gouverner ? Une majorité elle aussi « normale » semble s'annoncer. « Normale », mais sans plus. Ni écrasante (elle aurait été décalée de la réalité politique française, et aurait tôt suscité une opposition hors du parlement), ni insuffisante (au pire, le PS la complètera avec les Verts...). Le président et son Premier ministre auront une majorité. Normale. Mais laquelle et pour faire quoi ?


La gauche, la droite, toujours... quoi d'autre ?


Le PS à plus de 35 %, l'alliance PS-Verts à 40 %, la gauche dans son ensemble à plus de 47 %, alors que la droite démocratique (l'UMP) fait à peine jeu égal avec le seul PS, et que le Front National tourne autour de 14 % : le premier tour des législatives françaises, dimanche dernier, est assez conforme à ce qu'on pouvait en attendre. Le PS en sort grand vainqueur, mais plutôt grâce à un vote « légitimiste » (on a élu un président socialiste, soyons cohérents : donnons-lui une majorité socialiste) plutôt qu'à un nouveau « vote utile ». L'abstention aidant le PS (mais aussi l'UMP), le « score » du Front de Gauche (comme d'ailleurs celui du Front National) est  inférieur à ce qu'il espérait, et à ce qui aurait été politiquement fort utile pour qu'il puisse réellement peser (à gauche, précisément) sur les choix gouvernementaux et présidentiels... quelques choix stratégiques malheureux sont peut-être pour quelque chose dans cette déconvenue : la candidature de Jean-Luc Mélenchon contre Marine Le Pen ne manquait pas de panache (il ne s'en est d'ailleurs pas fallu de grand chose pour que le leader du Front de Gauche ne puisse devancer le candidat socialiste et affronter Marine Le Pen au deuxième tour), mais peut-être de sens tactique. Peu importe, d'ailleurs : Mélenchon aura malgré tout, malgré les résultats des premiers tour de la présidentielle et des législatives, malgré l'inélégance (pour ne pas dire plus) du PS refusant de retirer son candidat pour faire de celui du Front de Gauche le candidat unique de la gauche,  réussi à réinstaller dans le paysage politique français une « gauche de la gauche » qui depuis deux siècles contribue à le composer, et dont l'absence apparente, dans les institutions de la République, ne signifiait nullement l'absence dans la société.


Ce paysage politique français reste d'ailleurs structuré par le rapport gauche-droite : l'écrasement du Modem de François Bayrou en témoigne : depuis le temps que l'on proclame (à droite, ou au « centre-droit », ou au «centre» que le « clivage gauche-droite est dépassé », il ne devrait même plus en être question, de ce clivage. Certes, le système électoral majoritaire pousse aux conjonctions, aux alliances, aux additions de forces en blocs confrontés les uns aux autres, mais ce système ne tombe pas du ciel, ni d'un « cabinet noir »  voué aux manipulations électorales : il est le résumé, peut-être la caricature, en tout cas le concentré, d'un champ politique qu'il structure depuis 1789 (pour ne pas remonter plus loin encore -aux guerres de religion, avec la Ligue comme ancêtre du Front National...).  La droite démocratique se déconsidère sans doute, en refusant de choisir entre le Front National et le PS (le PS appelant pour sa part, en cas de duel UMP-FN, à voter contre le FN), mais Il fallait s'y attendre. Que pouvait-elle faire d'autre, la droite démocratique française, dans l'état où elle est ? Elle ne pouvait ni appeler à gauche sans être accusée de trahir la droite, ni appeler à voter à l'extrême-droite sans être accusée de trahir la République -alors elle n'appelle à rien, qu'à sa propre survie.


Tiens, à part cela, en passant : une élection majoritaire avec une gauche unie face à une droite confrontée à la concurrence féroce de l'extrême-droite, cela ne vous rappelle rien, aimables lecteurs genevois ? Non, vraiment, cela ne vous rappelle à aucun acte politique simple ? Allons, vous avez jusqu'à dimanche matin pour que votre mémoire vous revienne  et vous porte, bulletin de vote (de gauche) en mains, là où il convient de le déposer.

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