Référendum contre la xénophobie d'Etat : Le PS dans la nasse

Une coalition d'organisations a décidé de lancer un référendum contre les derniers durcissements de la loi sur l'asile. Malgré l'opposition d'Amnesty International, de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés et du Parti socialiste, le Forum pour l'intégration des migrant-e-s, les Juristes progressistes, le Centre social protestant de Genève et les Jeunes Verts ont donc décidé de prendre le risque du vote populaire. On attend encore la décision de Solidarité sans Frontières (opposée au référendum, mais qui pourrait s'y rallier puisqu'il sera de toute façon lancé), des Verts et des sections socialistes cantonales et locales, qui peuvent parfaitement contourner le refus de la direction du PSS -d'autant que ce refus doit lui-même être confirmé par le « parlement » du parti, l'Assemblée des Délégués.

Le vin est tiré, il faut le boire


Que le lancement d'un référendum contre les nouveaux durcissements (c'est-à-dire les nouvelles dispositions xénophobes) introduits dans la loi sur l'asile soit politiquement risqué, nous en avons il y a quelque temps fait état, et même les partisans de ce lancement l'admettent. Mais à ce risque, ils acceptent d'être confrontés au nom d'une exigence qui dépasse l'examen du rapport des forces politiques, et l'état de l'opinion : l'exigence de pouvoir dire, dans une campagne référendaire, en quoi et pourquoi la politique suisse d'asile actuelle et, si les mesures prises récemment sont confirmées, future, est inacceptable, contradictoire des engagements internationaux du pays, étrangère à toute raison, et même vide de tout pragmatisme. Cette xénophobie d'Etat est non seulement inadmissible en principe, mais elle est de plus inefficace en pratique : elle traite les requérants comme du bétail, sans en réduire le nombre, mais en les stockant dans des lieux de relégation qui rappellent plus les léproseries du moyen-âge que des lieux d'accueils pour migrants dans une société civilisée.

Le référendum est risqué. Masis le risque de le lancer a moins pesé que la certitude, si on ne le lançait pas, de se retrouver «objectivement» complices d'une politique qu'on n'aurait pas même tenté de combattre. C'est ici comme on l'a déjà souligné, la vieille contradiction de l'éthique de vérité et de ,l'éthique de responsabilité -de l'éthique de vérité qui, engageant à défendre nos idées, nos valeurs et nos principes, justifie le référendum, et de l'éthique de responsabilité qui, prenant la mesure des rapports de force politiques et culturels, incite à la prudence.
Et c'est pour le Parti socialiste que le choix, de soutenir ou non le référendum, va être le plus douloureux, et la contradiction entre l'éthique de vérité et l'éthique de responsabilité la plus difficile à « gérer ».  Parce que si le référendum renvoie sans ambiguïtés aux principes qui sont ceux du programme socialiste (éthique de vérité), il renvoie également sans ambiguïté aux contradiction d'un parti dont le programme, précisément (celui adopté à Lugano, et qui porte sur la politique migratoire) est parfaitement incompatible avec les décisions d'un gouvernement auquel le PS est lié puisque deux d'entre les sien-ne-s y participent (éthique de responsabilité), dont la ministre chargée, entre autres, de la politique de l'asile, Simonetta Sommaruga. Du coup,  le président du parti, Christian Levrat, a  annoncé (un peu vite, puisque seule la direction du parti s'est encore prononcée, et que son prononcement doit être ratifié par l'Assemblée des délégués, début décembre) l'opposition du PS au référendum.

Peu importent désormais ces incertitudes : le vin est tiré, il faut le boire -le référendum est lancé, il faut le soutenir, parce que rien ne serait pire qu'il échoue, et le lâche soulagement (ou la Schadenfreude ?) qui s'emparerait de quelques uns si le référendum se plantait faute de signatures serait largement couvert par les cris de triomphe de l'extrême-droite. L'assemblée des délégués du parti, mais surtout, compte tenu des délai référendaire les sections locales et cantonales du PS, ont une tâche à accomplir : se caler sur les décisions prises et les principes exprimés à Lugano il y a un mois. Et cela signifie soutenir le référendum.

Commentaires

  1. J’approuve chaleureusement l'engagement de Pascal Holenweg en faveur du référendum contre le durcissement en urgence de l'asile. Il contraste favorablement avec celui, ici dénoncé, du PSS, Levrat en tête. Heureux aussi que le PS Ge n'ait pas suivi les injonctions de ses instances nationales et ait rejoint de comité unitaire genevois. Qu'il me soit permis toutefois de rectifier quelques informations:

    1. Solidarités Sans Frontières appuie à notre connaissance, comme Balthasar Glättli son secrétaire et conseiller national Verts Zurich le confirme sur son site, la défense du référendum. Voir sous http://www.balthasar-glaettli.ch/2012/10/09/das-neue-asylgesetz-schutzwurdige-abwehren/. SOSF en fait d'ailleurs la promotion indirecte en renvoyant sur sa page de garde à www.asyl.ch.
    2. Pascal renvoie justement au site de StopEXclusion pour participer à la collecte de signatures. Il omet toutefois de signaler que cette organisation fédère les activités du référendum à Genève en tant que comité unitaire où son parti adhère, et il ne cite pas ce dernier dans les groupements ayant officiellement décider de s'engager pour ce référendum.

    Tout se passe comme si ce texte daté pourtant d'aujourd'hui avait déjà quelques rides et était rédigé avant que les échéances, très courtes, n'aient forcé les opposants à précipiter le rythme. Il est urgent de contribuer aux signatures et les polémiques sur l'opportunité du référendum sont dépassées. Par contre il reste indispensable de combattre pied à pied ceux qui s'ingénieraient encore à lui faire échec, tel J-D Delley dans Domiane Public, par exemple. Merci de lire à ce sujet ce que je lui ai répliqué.

    Solidairement, Dario Ciprut

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