Pour défendre le droit d'asile !

Encore 25'000 signatures à récolter, et un mois pour les récolter

Par 114 voix contre 92, l'Assemblée des délégués du Parti socialiste suisse a décidé, samedi, de ne pas soutenir le référendum lancé contre la révision (déjà entrée en vigueur du fait de la procédure d'urgence qui lui a été appliquée) de la loi sur l'asile. Mais le référendum a déjà recueilli 35'000 signatures. Il lui en faut 50'000 valables (c'est-à-dire, avec le «  matelas » de sécurité, autour de 60'000 récoltées), et il reste un mois pour les obtenir. Le soutien du PSS, s'il avait été apporté, aurait certes été une aide précieuse, mais le référendum peut, et doit, désormais aboutir sans lui : il faudra bien alors qu'il prenne position sur les lois qu'il refuse aujourd'hui de combattre, mais qu'une quinzaine de partis socialistes cantonaux et de sections des grandes villes combattent déjà, en apportant leur soutien au référendum. Signez !
(Les feuilles de signatures peuvent être téléchargées sur www.stopexclusion.ch)


On ne fait pas de la politique pour calmer sa conscience, mais parce qu'on en a une...

L''Assemblée des délégués socialistes a donc refusé de soutenir le référendum contre la révision de la loi sur l'asile, et a décidé de déplacer le combat en élaborant une initiative pour « prendre l'offensive » sur le terrain de la politique migratoire. C'est une excellente intention, à ceci près que ce n'était absolument pas contradictoire d'un soutien au référendum, d'autant que l'initiative en question devrait porter sur la concrétisation du principe, ou de la revendication, «  un travail, des papiers ». Autrement dit sur l'immigration de travailleuses et de travailleurs (et de leurs familles), pas sur le droit d'asile. Les déserteurs érythréens à qui les mesures que combattent le référendum nient le droit de requérir l'asile politique n'y verront que du feu, et un refus de l'asile qu'ils requièrent. Pour celles et ceux que le démantèlement du droit d'asile frappe, l'ouverture à l'immigration laborieuse ne change rien -or ce sont eux que, par le référendum, il convient de défendre -ou, au moins, de se préoccuper.

« Je ne fais pas de politique pour calmer ma conscience » s'est justifié Christian Levrat en appelant à ne pas soutenir un référendum « que nous n'avons aucune chance de gagner ». «Nous faisons de la politique parce que nous avons une conscience » ont, en substance, répondu les partisans de ce soutien pour qui, comme pour Brecht, les seuls combats qu'on n'a aucune chance de gagner sont ceux qu'on renonce à livrer. Les mesures contre lesquelles le référendum a été lancé sont pourtant unanimement condamnées par les socialistes, qu'ils soient ou non partisans de l'usage du référendum pour les combattre : suppression de la possibilité de déposer une demande d'asile dans les ambassades, exclusion de la désertion comme motif d'obtention de l'asile politique, multiplication des centres de rétention fermés pour requérants déboutés et « récalcitrants »... Mais le référendum lancé contre elles serait « perdu d'avance », et perdre lourdement en vote populaire sur les plus récentes des mesures contre le droit d'asile, ce serait conforter la droite et l'extrême-droite dans l'élaboration des mesures suivantes, ont argumenté les « éléphants » (et éléphantes) socialistes suisses. Ne pas contester ces mesures par la seule arme légale qui reste pour cela, cela conforte qui ? la gauche ? les victimes de ces mesures ?
Lorsque les socialistes auront à se prononcer sur un référendum contre les mesures qui vont être prises, s'ajoutant à celles que nous combattons déjà, et qui poursuivront le démantèlement de ce qui fut un droit d'asile et ne l'est plus que pour une minorité réduite de requérants, qu'auront-ils gagné à ne pas avoir soutenu, aujourd'hui, le référendum en cours ? Quand il faudra se battre contre la suppression de l'aide sociale aux requérants « récalitrants », qu'aura-t-on gagné à avoir accepté de ne plus considérer la désertion comme motif d'asile politique ? C'est pan par pan que le droit d'asile est démantelé, et à chaque fois que l'on se résigne à en voir abattu un pan, on se prépare à être incapable de résister à la démolition du suivant.

« Entre la raison et les valeurs (les socialistes) ont choisi la raison », commente Le Matin Dimanche. Parce qu'il faut choisir entre l'une et les autres ? La raison n'est pas une valeur ? Les valeurs ne sont pas raisonnables ? Quand une conseillère nationale zurichoise confie avoir pleuré à l'issue des débats parlementaires, pour ensuite plaider contre le référendum, que valent cette confidence et ces pleurs, sinon précisément ce que Christian Levrat affectait de voir dans le référendum, un baume pour nos bonnes consciences? Le référendum que nous soutenons est d'une autre trempe. Il peut aboutit, il doit aboutir. Et le PSS qui a refusé de le soutenir devra bien alors se déterminer sur les mesures qu'il refuse aujourd'hui de combattre par le seul moyen qui reste pour cela, l'insoumission volontaire et le refus d'appliquer les lois mis à part.  La direction du PSS l'a assuré : si vote populaire il doit y avoir, le PSS appellera à voter « non ». Son appel aura seulement moins de force,  Il sera lancé avec moins de moyens et son « non » sera moins entendu, parce qu'il ne sera que résigné.
C'est ainsi qu'en croyant éviter le risque de perdre on s'en garantit la certitude, et qu'au prétexte de choisir entre la raison et les valeurs, on dévalue l'une en oubliant les autres.

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