Fonds de tiroir

Les conditions de détention à Champ-Dollon violent les règles pénitentiaires européennes (celles du Conseil de l'Europe, dont la Suisse est membre) et les droits des détenus : c'est le Tribunal genevois des mesures de contrainte qui le dit, en donnant raison à un détenu, en détention  préventive pendant 24 nuits dans une cellule de 23 m2 carrés hébergeant six détenus, la norme étant de 4 m2 par détenu. En février dernier, le Tribunal fédéral avait déjà imposé aux juges d'examiner si l'incarcération d'un détenu se faisait dans des conditions acceptables. Le tribunal genevoi, lui, rappelle que le manque de ressources ne peut justifier des conditions de détention contraires au respect de la dignité humaine. Or à Champ-Dollon, plus de 80 détenus (un détenu sur dix) dorment sur des matelas posés à même le sol, dans des cellules surpeuplée. Ce qui n'émeut pas outre mesure le Conseil d'Etat (ses sept membres et la Chancelière ont effectivement un peu plus de places dans la Tour Baudet), qui persiste à déclarer (dans un communiqué du 5 juin, au lendemain de la décision du Tribunal des mesures de contrainte) que « la seule issue à moyen et long terme reste la construction de nouvelles places de détention », qui ne «connaîtra ses premiers effets qu’en 2014 », avec l'espoir qu'en 2017 « le nombre de places de détention aura plus que doublé, de même que les effectifs ». Autrement dit, on sera dans la même situation, avec deux fois plus de places de détention, et deux fois plus de gardiens, mais au moins deux fois plus aussi de détenus, et donc toujours une suroccupation des lieux de détention. L'important étant toujours de permettre à Jornet et Maudot de pouvoir se présenter à la télé comme « Messieurs Sécurité » genevois... C'est vrai que ça en jette plus que « Messieurs bourrage de geôles »...

Le 22 septembre, premier jour de l'année républicaine, on votera en Suisse sur (notamment) deux objets importants : l'initiative populaire du GSsA pour l'abrogation du service militaire obligatoire, et la modification de la loi fédérale sur le travail (heures d'ouverture prolongées des shops des stations-service), combattue par référendum syndical. Bon menu de rentrée, ça : un combat antimilitariste et un combat syndical. En pleine campagne électorale pour les cantonales genevoises. miam, miam...

Le PLR a lancé mercredi sa campagne électorale pour les élections cantonales genevoises de cet automne. En « affichant son dévouement à la sécurité, au logement, à la cohésion sociale ou, plus simplement, à Genève ». Et aux forfaits fiscaux, faudrait pas oublier. Pour « afficher son dévouement», le PLR s'est doté d'un budget de 600'000 francs. Eh ouais, le dévouement, ça a son prix. Faut dire qu'entre les effets de la fusion radicale-libérale, la concurrence du MCG à droite et des Verts libéraux au centre, le PLR est assez mal barré, et que tout le monde (lui compris) s'attend à ce qu'il perde des électeurs, des suffrages et des sièges. Il vise 28 % (des sièges ou des suffrages ?), le PLR. Nous, on ne lui donne pas plus de 23 % (des suffrages) ou 25 % (des sièges au Grand Conseil, compte tenu du fait que des listes n'obtiendront pas le quorum). Et encore, si tout va bien pour lui. ça ferait dans les 15'000 balles claqués par siège (si on s'en tient au budget officiel). Un assez mauvais retour sur investissement, pour les champions de l'économie libérale...

Dimanche, alors que le canton de Genève acceptait (comme tous les autres cantons, mais plus mollement) les nouvelles restrictions au droit d'asile, et que même la Ville de Genève (plus mollement que le canton, mais quand même à 58 % des suffrages) suivait, quatre arrondissements disaient NON : Les Pâquis, Prairie-Délices, Cluse-Roseraie, Mail Jonction. Honneur à eux. Et dans d'autres arrondissements, la majorité de OUI est de quelques voix, ou quelques dizaines de voix : Saint-Gervais, Acacias, Cropettes-Vidollet... C'est bien. Sauf que le différentiel de participation entre les quartiers qui votent NON ou presque NON et ceux qui votent OUI à une écrasante majorité est de 10 points : 58,6 % d'abstention aux Acacias, 48,6 % à Florissant-Malagnou. Et après, y'en a qui viendront vous dire que « de toute façon, ils font ce qu'ils veulent ». Dans ces conditions, « ils » auraient même tort de se gêner...

Les riverains, dans les communes de Puplinge et Choulex,  des futures prisons genevoises de Curabilis et de la Brenaz 3 (en plus de l'extension de la Brenaz 1) sont mécontents et inquiets. Mécontents parce que, contrairement aux promesses, ils n'ont pas, ou mal, ou trop tard, été consultés. Et inquiets de leur nouveau voisinage annoncé, de sa vue, des bruits qui en sortent, de son emprise sur les terres agricoles et la forêt. Est-ce qu'on peut en déduire qu'ils sont opposés, comme nous, à la construction de nouvelles prisons à Genève ? Ben non, ils sont seulement opposés à ce qu'elles soient implantées près de chez eux. Les prisons, ils sont pour. Mais ailleurs. Près de chez les autres.

Jolie leçon de libéralisme donnée par le Tribunal fédéral au très libéral (prenons la posture pour l'essence...) Charles Poncet, qui estimait avoir été diffamé par le Conseiller d'Etat François Longchamp, qui l'avait qualifié de « traître à son pays, son canton et sa ville » (et la quartier, on l'oublie ?) en s'étant porté défenseur, et payé pour cela, de l'Etat libyen (celui de Kadhafi) dans la crise l'opposant à la Suisse après l'arrestation d'Hannibal Kadhafi à Genève en 2008. On vous passe le détail des savoureux échanges médiatiques de noms d'oiseaux entre le PLR-canal R François Longchamp et le PLR-canal L Charles Poncet (« traître », « raté»...) et la liste complète des procédures intentées par Poncet (devant l'Autorité indépendante de plainte dans le domaine de la radio et de la télé, devant la justice genevoise, devant le Tribunal fédéral...) pour retenir la leçon de libéralisme donnée par le Tribunal Fédéral à Poncet : « La liberté d'expression indispensable à la démocratie implique que les acteurs de la lutte politique acceptent de s'exposer à une critique publique, parfois même violente, de leurs opinions », et Poncet, « polémiste notoire et défenseur convaincu de la liberté d'expression » (de la sienne, en tout cas), « s'expose naturellement à la critique publique », même assénée « en des termes plus acerbes que celle portée contre) n'importe quel citoyen »... Ce que Poncet est lui même persuadé ne pas être... On se garde précieusement les attendus de l'arrêt du TF, pour la prochaine fois qu'on ressentira le besoin de traiter de connard quelqu'un qui nous semble le mériter...

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