L'Egypte, entre révolution et putsch : L'alternative syndicale

Alors qu'ils furent l'un des moteurs de la révolution qui mit fin au régime de Moubarak, puis de l'opposition à la récupération islamiste de cette révolution, les syndicats indépendants du pouvoir comme de la mosquée restent interdits en Egypte -mais un centre syndical indépendant, le CTUWS, existe néanmoins, qui lutte précisément pour les libertés syndicales l'indépendance des syndicats, les libertés d'information et de mouvement, et le renforcement de la place des femmes dans le mouvement syndical. Le  renforcement des syndicats indépendants étant un élément décisif de la transformation politique et sociale démocratique de l'Egypte, le Solifonds soutient la campagne du CTUWS :
SOLIFONDS,
mail@solifonds.ch, www.solifonds.ch 
Compte postal 80-7761-7

Entre la caserne et la mosquée, les syndicats...

Il y a certes de l'ambiguité dans la position des syndicats indépendants égyptiens (les uns soutiennent le pouvoir issu du putsch militaire, les autres s'y opposent, sans toutefois se rallier à la contestation conduite par les Frères Musulmans), mais cette ambiguïté naît de leur propre histoire, et de celle d'une répression du mouvement syndical indépendant, qui s'est poursuivie de Nasser à Morsi sans interruption, et à laquelle la chute de Morsi et des Frères n'offre encore que l'espoir d'y mettre fin. Depuis plus de soixante ans -depuis la prise du pouvoir par les Officiers Libres de Neguib et Nasser, une seule centrale syndicale est autorisée, directement contrôlée par le gouvernement: la Fédération des Syndicats Egyptiens (ETUF, dans son signe anglais, où « syndicat » est traduit par trade union), alors même que l'Egypte a ratifié toutes les conventions importantes de l'Organisation internationale du Travail, sur les libertés syndicales, la liberté d'organisation, le droit de négociation, les conventions collectives...). Le Centre pour le soutien aux syndicats et aux travailleurs (CTUWS), né dans les années nonante, s'est créé pour que ces droits fondamentaux et ces libertés essentielles ne restent pas lettres mortes au bas de conventions illusoires.
La révolution de janvier 2011 et la chute du régime Moubarak ont ouvert l'espoir que ce combat allait, enfin, porter ses fruits. Dans ce premier épisode, celui de la victoire de la révolution, en quelques mois, 1800 syndicats d'entreprises et deux centrales syndicales indépendantes, la Fédération égyptienne des syndicats indépendants (EFITU) et le Congrès égyptien démocratique du Travail, EDLC) ont été créés, et en mars 2011, le ministre du Travail d'alors annonçait l'adoption prochaine d'une loi garantissant les libertés syndicales.
Deuxième épisode de la révolution : la confiscation de la révolution par les Frères Musulmans. L'arrivée au pouvoir de leur gouvernement, dans le sillage de l'élection de leur candidat à la présidence, Mohammed Morsi, gèle les belles intentions du printemps 2011 et douche les espoirs : la répression antisyndicale reprend de plus belle.
Le troisième épisode de la révolution égyptienne, c'est-à-dire le renversement par l'armée du président Morsi et de son gouvernement, et le retour des Frères Musulmans dans l'illégalité (et dans la rue), ne fait en réalité que «  remettre les compteurs à zéro ». Et donc de rendre d'autant plus important le soutien à l'organisation d'un mouvement syndical indépendant. C'est dans ce cadre que se situe la campagne du Centre pour le soutien aux syndicats et aux travailleurs (CTUWS), pour l'abrogation de la loi actuelle sur les syndicat, héritage des régimes d'avant la révolution, qui ne reconnaît que l'ETUF comme centrale syndicale, contraint les travailleurs à y adhérer et permet à l'Etat d'intervenir directement dans les activités des syndicats. Il s'agit donc de reconnaître aussi les syndicats indépendants, la liberté d'organisation et d'affiliation syndicales, le droit de grève et d'activité syndicale dans les entreprises.

Il s'agit aussi de soutenir la création de syndicats dans les secteurs où l'exploitation des travailleuses et des travailleurs est la plus criante : le secteur informel, l'agriculture, le travail domestique -secteurs de fort travail féminin, l'égalité des droits entre femmes et hommes, dont on conçoit qu'elle n'est guère du goût des Frères Musulmans, mais qui n'a jamais été non plus une priorité des régimes prétendûment « laïcs » qui précédèrent le leur, étant aussi l'un des principes proclamés par le CTUWS.
Ces objectifs, dans la situation qui est celle de l'Egypte actuellement, supposent des moyens, et un soutien. Quelque critique que l'on puisse formuler à l'égard de certains syndicats indépendants, alliés au pouvoir issu du putsch militaire, le syndicalisme indépendant, en Egypte comme dans d'autres pays « arabes » (on pense particulièrement, ici, à l'Algérie) est une force constitutive de toute alternative à l'islamisme, mais également à la tentation autoritaire, sous vernis laïc -mais un vernis qui le plus souvent se révèle n'être que le cirage des bottes militaires.

Le SOLIFONDS lance un appel au soutien du CTUWS : répondez-y, pour qu'entre la caserne et la mosquée il y ait place pour une organisation autonome des travailleuses et des travailleurs d'Egypte.
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