Vente de Télégenève (Naxoo) : C'est toujours NON !

Les Verts et le Parti socialiste appellent à soutenir, lors de la votation municipale du 9 février prochain, la proposition du Conseil administratif de la Ville de Genève de vendre à la filiale suisse de la multinationale UPC Cablecom le paquet majoritaire d'actions détenue par la municipalité dans la société de téléréseau Télégenève (Naxoo). Ce soutien s'explique par l'addition du légitimisme politique  (la proposition est celle de «notre Conseil administratif »), du pragmatisme (ne pas vendre serait provoquer une situation pire que vendre) et d'un calcul financier basique (57 millions, c'est bon à prendre quand on a de gros investissements à financer, et des prestations à la population menacées de coupes budgéltaires). C'est aussi sans surprise que, minoritaire et cultivant avec amour ce statut finalement confortable, on appellera ici, une fois de plus, à refuser cette vente.  Parce qu'on est d'un naturel obstiné et que les raisons qui ont conduit une partie du groupe socialiste au Conseil Municipal à refuser (ou à ne pas accepter, en s'abstenant) la vente de Naxoo à Cablecom nous paraissent toujours s'imposer, quelques «mesures d'accompagnement» qu'on ait pu négocier depuis.

La bonne vieille contradiction du pragmatisme et de la cohérence

On ne votera pas le 9 février sur autre chose que sur la proposition du Conseil administratif de vendre les actions de la Ville dans Naxoo. On ne votera pas sur les « mesures d'accompagnement » négociées par la Ville, Télégenève, les représentants du personnel, UPC Cablecom et la faîtière du syndicat Syndicom. On ne votera pas non plus sur les discours lénifiants tenus par UPC Cablecom pour rassurer sur ses (bonnes) intentions à l'égard du personnel et ses (bons) sentiments à l'égard de la société genevoise dont elle veut prendre le contrôle. UPC Cablecom n'a d'ailleurs jamais dissimulé que ce qu'elle voulait, c'était se goinfrer Télégenève. Et qu'elle était prête à y mettre lr prix. Elle a donc promis tout ce qui avait un semblant de crédibilité pour affaiblir les résistances, politiques et syndicales, que suscitait le projet de lui filer les clefs du téléréseau genevois. On ne votera pas sur autre chose que sur cette remise des clefs, le 9 février. Mais en votant sur la proposition de vente des actions, on votera aussi, forcément, sur le contrat de vente qui concrétisera la vente, si le peuple municipal l'accepte. Or ce sont les dispositions de ce contrat de vente (qui n'a en rien été modifié depuis qu'il a été signé), ce qu'elles contiennent (par exemple l'autorisation de licencier 10 % du personnel chaque année pendant cinq ans, et le reste dès la sixième année) et ce qu'elles ne contiennent pas (le maintien de la société, le maintien de la convention collective Naxoo, la signature d'une convention collective engageant UPC Cablecom, etc...), qui ont justifié, et justifient encore, notre refus d'accepter la vente.
Certes, des « mesures d'accompagnement »  ont été négociées : elles prévoient le maintien de la convention collective Naxoo et de la caisse de retraite de son personnel. Mais ces deux engagements ne tiennent que tant que la société Télégenève tiendra -or, du moins à notre connaissance, aucun engagement n'a été pris, aucune garantie donnée, par UPC Cablecom sur l'existence de la société genevoise. Par ailleurs, lesdites  « mesures d'accompagnement »  n'équivalent évidemment pas à un engagement de maintenir les postes de travail, puisqu'elles anticipent sur leur suppression (on a beau démentir avoir conclu un « plan social » , c'est bien de cela dont il s'agit -et un « plan social », cela signifie quoi, sinon l'annonce de licenciements ?). Enfin, aucun engagement n'est pris par UPC Cablecom sur la signature d'une convention collective plus large que celle ne concernant que Naxoo (et qui disparaîtrait avec Naxoo, si Naxoo devait disparaître...). Bref, des cinq conditions que nous posions (et que le PS posait) à une éventuelle acception de la vente, trois ne sont pas remplies, et les deux qui le sont apparemment ne le sont que précairement -et nous ne faisons strictement aucune confiance à UPC Cablecom pour respecter autre choses que ses propres intérêts -c'est ce qui devrait d'ailleurs différencier un actionnaire public, la Ville de Genève par exemple, d'un actionnaire privé -mais en l'écrivant, on se rend sans doute coupables de rigidité idéologique...
Il y a pourtant des engagements sérieux qui ont été pris (et qui, hélas, seront sans doute tenus), à la faveur de la négociation des « mesures d'accompagnement » de la reprise de Naxoo par Cablecom : la commission du personnel et la faîtière de Syndicom se sont engagées à ne pas soutenir l'opposition à cette vente, et à rester l'arme au pied pendant la campagne de votation...). Une sorte de «non intervention», ou d'accord de désarmement. Mais unilatéral, le désarmement.

Le débat qui va s'engager, à deux mois de la votation n'est pas un débat idéologique. Et le clivage entre les « non » et les « oui » à la vente de Naxoo n'est même plus un clivage gauche-droite, dès lors qu'une partie de la gauche va appeler à voter « oui », qu'une autre appellera à voter « non » , que l'extrême-droite hésite et que la faîtière syndicale n'appellera à rien du tout -la section locale de Syndicom, qui a co-lancé le référendum, ne se dédira cependant pas : comme nous, elle persiste et signe, dans l'opposition à la vente, soutenue en cela par la communauté genevoise d'action syndicale (qui rassemble l'ensemble des syndicats genevoius). Ni débat idéologique, ni affrontement gauche-droite, mais contradiction, finalement assez classique, entre le « pragmatisme »  et la cohérence. Entre « faute de mieux » et « on ne lâche rien ».
Ici, nous en tenons, et aurions bien aimé que toute la gauche en tienne, uniment, pour la cohérence. Parce qu'il y a une différence entre la position du gestionnaire, qui peut être celle d'un exécutif municipal, et celle du militant et de son parti, qui est de défendre des positions politiques aussi claires que possibles. Dans le cas de la vente de Naxoo, ces positions étaient exprimées par les conditions que nous posâmes à notre acceptation de cette vente. Ces conditions ne sont pas remplies ? Nous n'avons donc aucune raison de revenir sur notre choix.
Carrément socialistes, on est, décidément. Et depuis trop longtemps (à notre manière, certes, forcément contestable, mais elle aussi trop ancienne) pour changer.

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