Fonds de tiroir

Dans son communiqué de presse hebdomadaire, le Conseil d'Etat nous a informé mercredi dernier qu'il a « répondu favorablement à une consultation du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) portant sur le nouveau concept de stationnement de l'armée pour le canton de Genève ». En clair: le gouvernement genevois est très content que l'armée chuiche libère  le site actuel de la caserne des Vernets – lequel sera principalement dédié à la réalisation de 1500 logements et salue l’abandon du terme de «place d’armes de Genève» au profit de la notion nouvelle de « centre de formation des troupes de sauvetage », plus conforme à la vocation humanitaire et internationale de Genève. Ben nous aussi, on est content de tout ça. C'est bon, de temps en temps, d'être content des mêmes choses que son gouvernement. C'est bon, parce que c'est rare. On n'a pas le temps de s'en lasser.

Le président du Conseil d'Etat genevois, François Longchamp, vient de se faire torpiller par son propre parti, le PLR, cornaqué par le MCG, un projet auquel il tenait (ou semblait tenir) : une réforme de la loi destinée à mettre fin aux abus dans les ventes d'appartements. Des acheteurs fortunés en achètent plusieurs dans les zones de développement, où leurs prix sont plafonnés par l'Etat, les thésaurisent et les revendent une fois que le contrôle public est levé, à un prix largement supérieur. Tout bénéfice pour les propriétaires. Ou alors, des familles ou des groupes de propriétaires achètent plusieurs appartements, n'y habitent pas, et les revendent avec benef. En 2012, sur 204 appartements vendus, le tiers n'étaient pas habités par leur acquéreur. Le projet de Longchamp voulait imposer le principe de l'habitat du logement acheté par son acquéreur pendant dix ans (sauf exceptions). Le projet de loi sortait de commission, ou il avait longuement été étudié, ou tous les milieux immobiliers (propriétaires, régisseurs, notaires, entreprises de construction) avaient été entendus, et où il avait été approuvé avec la seule opposition du PLR. Il était donc soumis au Grand Conseil, mais il s'est trouvé une majorité de droite et l'extrême-droite ( PLR, PDC, UDC et MCG) pour le rééexpédier en commission, histoire de le rendre inoffensif -ou de le geler. Le MCG et le PDC ont donc retourné leur veste entre leur vote en commission et leur vote en plénière.  Ce qui ne nous étonne ni de l'un, ni de l'autre. Et signalent clairement à qui ils obéissent. Y'a des séances du Grand Conseil, comme celle-là, dont on se prend à regretter qu'elles ne soient plus transmises en direct par Léman Bleu : elles auraient peut-être quelque effet pédagogique sur cette part du public qui croient en les protestations «centristes» des uns et en la posture « ni de gauche, ni de droite » des autres...

«  Gauche Hebdo » commence l'année très fort  et son numéro de rentrée, le 18 janvier, est particulièrement revigorant : il s'ouvre sur une première, une deuxième et une troisième page entièrement consacrées à l'éloge des camarades récemment  disparus : Raymond Bertholet, Michel Denoréaz, Fritz Kaeser, Bernard Golay. Des camarades méritants, certes, mais trois pages nécrologiques d'un coup, en ouverture du journal, comme contenu rédactorial, ça titille pas l'optimisme... Bah, comme disait Léon Nicole, « les perspectives sont plus belles que jamais »

On ne sait toujours pas combien au juste va coûter, de part et d'autre, la campagne autour de l'initiative udéciste contre l'« immigration de masse », mais plus le temps pas, plus on se dit qu'elle va coûter un saladier. Et pas en fer blanc, le saladier : côté patronal, Economiesuisse va dépenser autant (entre six et huit millions de francs), sinon plus, que ce qu'elle avait claqué en vain contre l'initiative Minder. Côté xénophobe, l'UDC, quoi qu'elle en dise, va être au même niveau que ses adversaires patronaux du moment (rassurez-vous, ils se retrouveront copains comme cochons sur d'autres enjeux -le salaire minimum, par exemple). A lui seul, Christoph Blocher a déjà balancé deux millions dans la campagne, et se dit prêt à en remettre un petit sur (ou sous) la table. Le seul envoi « tous ménages», en trois éditions (une par langue -le romanche ne compte pas... c'est pourtant la seule langue de Suisse qui ne soit pas immigrante...), du canard de l'UDC a coûté un million. Ajoutez-y une campagne d'affichage de longue durée, les mailings, les annonces dans la presse etc... Mais on ne saura jamais précisément combien les uns et les autres ont investi dans leur propagande : le gouvernement et la droite refusent toute transparence des campagnes référendaires et électorales. Pourquoi diable ? «Démocratie directe», ça rime pourtant mal avec « financement obscur » ...

La Cour des Comptes s'est penchée, avec toute l'attention qu'elle mérite, sur la pratique en cours chez les directeurs des TPG de prendre des congés excédant leur droit, ou de se constituer une «épargne retraite» leur permettant de cesser précocément de travailler. La Cour a décelé trois situations «problématiques», mais dont elle ne sait pas si elles ont ou non coûté quelque chose à la régie publique : la sixième semaine de vacances dont bénéficiaient sept membres de la direction sans que cela soit prévu dans leur contrat de travail ou le statut du personnel, la constitution d'une l'« épargne retraite » non conforme au droit du travail, et un certain laxisme dans le contrôle (par timbrage) des heures de travail sur le lieu de travail. Conclusions de la Cour : un cadre réglementaire incertain, des pratiques contradictoires, des arrangements à la légalité douteuse... Commentaire du président de la Cour : « L'opacité du système laissait la place aux préférences individuelles, mais ça ne veut pas dire que les directeurs avaient la volonté de truander ». Juste la volonté de profiter au maximum de leur position de directeurs. Pas de quoi fouetter un tram, quoi. Mais pas de quoi non plus redorer le blason de l'entreprise...

Le 9 février, les Tessinois voteront, en plus des objets fédéraux, sur une proposition d'inégibilité aux parlements cantonal et municipaux de candidat-e-s ayant de « graves antécédents judiciaires ». Que les Verts tessinois, qui appellent à soutenir l'initiative xénophobe de l'UDC se rassurent : la connerie n'est pas un « grave antécédent judiciaire », et n'a jamais empêché personne, nulle part, d'être élu. Parole d'élu municipal genevois.

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