Brèves de comptoir

Au 37 rue de la Servette, à Genève. est sis un vieil immeuble (fin du XIXe siècle) que le propriétaire (une fondation de droit public, qui l'a hérité de la Banque cantonale), soutenu par la droite municipale et les Verts, veut démolir et que le Conseil administratif voudrait plutôt voir rénover. Le Conseil dministratif ayant fait recours contre la démolition, la droite et les Verts du Conseil Municipal ont voté une motion demandant au Conseil administratif (qui n'est pas tenu de suivre cet avis) de retirer son recours puis, mercredi soit, à voté une résolution appuyant cette motion. Une motion étant une demande du Conseil Municipal au Conseil Aministratif, sans obligation de la suivre, et une résolution un avis du Conseil municipal sans conséquence aucune, voter une résolution soutenant une motion revient à exprimer un état d'âme soutenant une prière. Bref, mercredi soir, le Conseil Municipal de la Ville de Genève a pissé dans un violon...

Explication (dans « Le Matin Dimanche » de dimanche dernier) du Procureur Général Jornot pour justifier l'emprisonnement de gens qui n'ont pas commis d'autre délit que celui de n'avoir pas de titre légal de séjour en Suisse : « On retrouve systématiquement ces gens dans des zones de deal ou d'autres où il y a beaucoup d'infractions ». Donc on les coffre à titre préventif, parce qu'ils pourraient commettre des infractions mais n'en ont pas encore commis. Bon, bon... élargissons la méthode, alors. Tiens, par exemple, les rodéos automobiles meurtriers qui voient de sombres crétins faire la course à 200 à l'heure sur des routes normales : ces chauffards conduisent de bagnoles très chères et très rapides. Il convient donc d'emprisonner à titre préventif tous les propriétaires de tires très chères et très rapides. Non ? Ah bon...

Le MCG a déposé au Grand Conseil un projet de loi renforçant le « bouclier fiscal » protégeant les hauts revenus et les fortunes de la progressivité de l'impôt, et le plafonnant (impôt cantonal et municipal ensemble) à 60 % du revenu imposable. L'auteur du projet, le petit frères des riches, l'Abbé Pierre précieuse,  Ronald Zacharias, qui n'est jamais si bien servi par les projets de loi fiscales que quand il les dépose lui-même, donne comme exemple de la rapacité du fisc genevois celui, fort hypothétique, d'un couple domicilé à Onex et ayant 250'000 francs de revenu et 50 millions de fortune, et qui serait imposé à 100 % de son revenu si on tient compte de l'impôt fédéral. C'est vrai que des couples à un quart de million de revenu et à 50 millions de fortune, à Onex, ça doit courir les rues. Enfin, les rues... disons le petit chemin qui longe le vieux cimetière. Et encore, seulement les nuits de pleine lune. 

Dans les « idées parmi d'autres » étudiées par le Conseil d'Etat genevois (qui n'a, selon son président, Longchamp, « aucun tabou »...) pour « faire des économies» (ça, c'est pas un tabou, c'est un totem...), il y a celle de ne plus autoriser des élèves domiciliés en France à poursuivre leur scolarité obligatoire à Genève. Environ 3000 élèves scolarisés à Genève habitent en France (parmi eux, nombreux sont ceux de nationalité suisse...), dont 1300 fréquentent les écoles primaires et le Cycle d'Orientation (ce sont eux qui sont visés), 1600 les établissements du postobligatoire et une centaine d'autres établissements.  Nous, on trouve que c'est une idée à la con quand on prétend vouloir construire politiquement une véritable région genevoise transfrontalière, mais évidemment, le MCG, lui, est pour (à condition, évidemment, que ça ne frappe que les élèves de nationalité étrangère...). On rappellera au passage que les frontaliers, imposés à la source, contribuent au financement des écoles et de l'enseignement genevois dont on voudrait exclure leurs gniards.  Bref, la Grande Genève est en marche. En tournant en rond dans la cour de l'école
 
On se demandait pourquoi le MCG avait changé d'avis sur la vente à la multinationale UPC Cablecom, des actions de la Ville de Genève dans le téléréseau Naxoo : après avoir dit qu'il s'y opposait, il avait finalement appelé à l'accepter lors du vote populaire sur cette vente contre laquelle un référendum avait été lancé, avait abouti et avait finalement été ratifié lors du vote populaire. Pourquoi ce retournement de veste du MCG ? On commence à en avoir une petite idée : « Le Temps » de samedi nous apprend que le chef, Stauffer, et le sous-chef, Medeiros du MCG, alors encore propriétaires de la boîte de nuit « New Bar à Whisky », y ont accueilli (contre paiement) une «soirée d'entreprise» de Naxoo et Cablecom,  trois jours après le vote populaire refusant la vente des actions de la Ville (mais commandée et acceptée avant, sans doute dans la conviction, erronée, que le vote allait être favorable à la vente). «Une affaire comme les autres» résume Medeiros, qui se dit prêt à «faire des affaires avec Cablecom». Bref, comme en plus de cela Medeiros et Stauffer sont à la tête d'une société (Medinex) de téléphonie mobile suceptible de travailler avec UPC Cablecom, on se dit que ce ne sont pas forcément des arguments très politiques qui expliquent le revirement du MCG, et que ce parti est moins à convaincre qu'à acheter.

Etre administrateur d'une entreprise publique genevoise (et plus encore président du Conseil d'administration, ou mieux, directeur...) n'est pas seulement un honneur, et un mandat civique : c'est aussi un boulot lucratif. Sur la rémunération duquel la Cour des Comptes s'est penchée avec la sagacité qu'on lui connait. En additionnant toutes les rémunérations (traitements, primes, bonus, indemnités, débours...) versées en 2012, on arrive par année, pour les administrateurs, à 5000 francs de base plus 500 francs par séance du Conseil, plus les débours, et pour les présidents à 120'000 francs (ce que le président sortant du Conseil d'administration des SIG, Alain Peyrot, trouve insuffisant). Et si on examine le coût global de chaque Conseil d'administration, on arrive au million pour les Services Industriels et ses 23 administrateurs, à un peu plus de 800'000 francs pour les quatre fondations immobilières de droit public (toutes ensembles), à 400'000 francs pour les Transports Publics, de 200 à 300'000 francs pour l'Hospice Général, les Hôpitaux Universitaires, l'Aéroport et l'Aide à domicile, à moins de 200'000 francs pour les autres (Palexpo, Fondation des parkings etc.). Au total,  241 administrateurs et trices, présidents et dentes compris-es, se sont partagés 3,5 millions en 2012. Ceux qui ont été désignés dans ces conseils en tant que représentants de collectivités publiques proposés par leurs partis, ont reversée une proportion variable de leur rémunération à leurs partis. La Cour des Comptes s'est aussi penchée sur les rémunérations des directeurs (et trices) des entreprises et fondations publiques. Ils et elles se sont partagée en 2012 plus de 19 millions, soit une moyenne de 232'000 francs par tête, mais avec d'assez gros écarts entre les mieux payés (315'000 francs aux Services Industriels, 304'000 aux HUG, 295'000 aux TPG, en moyenne par directeur-trice puisque ces entreprises en comptent plusieurs). Eh ben voilà voilà, c'était nos nouvelles de la nouvelle pauvreté à Genève... Maintenant, on peut passer à la campagne pour le salaire minimum...

Le congrès du PS genevois a adopté, samedi, toute une série de résolutions dont une « pour une mise en oeuvre progressiste de la Constitution du 14 octobre 2012 », résolution qui débute en claironnant que « lors de la votation du 14 octobre 2012, le parti socialiste genevois s'est engagé clairement en faveur de la nouvelle constitution présentée au peuple souverain, persuadé que celle-ci est plus sociale, ouverte, écologique, en un mot progressiste, que le texte qu'elle a remplacé »... oui, bon, faut pas exagérer : d'abord, s'agissant de l'engagement « clair » du PS en faveur de la nouvelle constitution, un bon tiers des socialistes présents lors de l'Assemblée générale donnant le mot d'ordre du parti avaient, si nos souvenirs sont bons, voté en faveur du refus du texte proposé. Précisément parce qu'il n'était pas vraiment « plus social, ouvert, écologique, en un mot progressiste », que le texte qu'il remplaçait. Ensuite, la Jeunesse Socialiste (et nous) avions appelé à voter blanc, les deux textes en concurrence, l'ancienne et la nouvelle constitution, l'obsolète et l'acratopège, nous paraissant s'équivaloir dans l'insuffisance... alors disons que l'engagement du PS en faveur de la nouvelle constitution était aussi « clair »  que l'avantage de cette nouvelle constitution sur l'ancienne et restons en là...

En avril, la gauche présente à l'élection du Procureur Général un candidat, Pierre Bayenet, contre le candidat de la droite, Olivier Jornot. La gauche... toute la gauche? Euh... non : Ensemble à Gauche, les syndicats, un comité de soutien, une liste proche de l'Avivo, oui. Mais pas le PS en tant que tel, ni les Verts en tant que tels (là, il aura fallu que des militant-e-s se décarcassent pour déposer des listes à la place de leur parti, les socialistes ne soutenant personne et les Verts appelant à voter « blanc », comme si Jornot et Bayenet s'équivalaient. Alors, à défaut de «toute la gauche», on peut au moins dire « toute la gauche de la gauche»? euh... non plus : un groupe de cette mouvance mouvante, les «Citoyens pour la justice publique » appelle non pas à voter pour le candidat de gauche, mais à boycotter l'élection. Tout en dénonçant Jornot comme un homme « dangereux pour Genève », exemples à l'appui.  «Jornot dégage !», proclament les «Citoyens pour la justice publique». Voui, mais le problème, c'est que pour que Jornot dégage, il faut voter Bayenet, pas boycotter l'élection. On n'est pas dans le vote sur la constitution, avec le choix exaltant entre deux mauvais textes (un vieux et un neuf) qu'on peut renvoyer dos à dos en appelant à voter blanc, on est dans une élection au suffrage universel, au système majoritaire, avec un candidat de gauche et un candidat de droite, où si on ne vote pas pour l'un, on conforte l'autre... qui, d'ailleurs, s'en félicite dans « Le Matin Dimanche »  (« le PS et les Verts ne me combattent pas..»). Entre ceux qui, à gauche, ne le combattent pas, et ceux qui, à gauche de la gauche, le combattent par des mots sans le combattre par des votes, il peut affecter « un certain détachement par rapport à la vie politique », le candidat de la droite... Il nous reste donc à l'y rattacher contre son gré, en votant et en faisant voter pour notre candidat -seule méthode pour que,  vraiment, « Jornot dégage ! » 


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