Le « Gripen », au prétexte de la « sécurité » : Bouquet final anxiogène

Les partisans de l'achat des avions de combat « Gripen » auront tout essayé pour le faire accepter au bon peuple : les witz de corps de garde d'Ueli Maurer, l'activisme de l'Ambassadeur de Suède, le coup des emplois créés par les « mesures compensatoires », celui de la défense de l'armée sournoisement menacée dans son existence (et son essence) par l'opposition à l'achat de l'« avion de papier » (ainsi qualifié par le président du PLR, qui maintenant plaide pour son acquisition). Il ne manquait à ce feu d'artifice qu'un ultime pétard, et on nous l'offre ces jours sous la forme d'un discours légèrement paranoïaque (ou lourdement anxiogène, cela dépend des discoureurs) sur les menaces internationales. Et l'on y convoque pêle-mêle l'Ukraine, l'Afrique du nord, la Syrie. Sans souci de vraisemblance, mais avec l'énergie, sinon du désespoir, du moins de l'inquiétude quant au résultat du vote. On saura dimanche s'il faut en rire ou en être consternés...

Un toit pour notre maison, un plancher pour nos vaches, une chasse d'eau pour nos chiottes...


Dans un long plaidoyer pour l'achat des «Gripen», le Conseiller national PLR genevois Hugues Hiltpold nous file dans Le Temps de lundi, à grand renfort d'allusions à des situations de conflits dans lesquels on ne voit guère l'usage que l'on pourrait faire d'avions de combat  (la Tunisie, la Libye, l'Egypte, la Crimée...), la métaphore foireuse (« il faut un toit sur la maison  suisse ») qui sert désormais de slogan rassembleur aux partisans de cet achat, qui peinent à convaincre une majorité de sa nécessité et font désormais feu de tout bois humide pour enfumer le plus opaquement possible l'électorat hésitant. « A moins de tomber dans le déni de réalité, nous devons bien admettre que nous ne pourrons jamais nous prémunir contre les crises », nous révèle Hiltpold. Voui, l'a

Bref, les 22 « Gripen » seraient indispensables à la sécurité de la Suisse : « dire non au Gripen, c'est prendre le risque insensé de priver totalement la Suisse de sa sécurité aérienne dès 2025 ». Mais à quelles menaces veut-on parer par cet achat ? une invasion depuis l'un de nos voisins (le rayon d'action des « Gripen » ne permet pas d'intervenir au-delà de ce voisinage) ? Les menaces réelles, pour un pays comme la Suisse, aujourd'hui, sont d'un tout autre ordre que celles auxquelles peuvent parer des avions de combat : cyber attaques, terrorisme, catastrophes naturelles ou industrielles... rien contre quoi des « Gripen » (ni d'ailleurs des « Rafale »...) soient d'une quelconque utilité. Et de ce point de vue, qui n'est pas le seul à nous amener à lui dire «  non », c'est la dépense pour cet équipement qui affaiblit la sécurité de la Suisse -parce qu'elle empêche d'investir dans plus urgent, plus utile et plus sensé  D'autant que même le colonel Antognini, pilote d'essai des forces aériennes suisses, le reconnaît : pour la police de l'air, les 32 F/A-18 suffisent à ce pays que des avions de combat (meme les vieux « Tiger ») traversent dans sa plus grande longueur en dix minutes...


« Il faut un toit sur la maison suisse », et ce toit, ce serait précisément les 22 « Gripen ». Certes, il faut un toit pour notre maison, un plancher pour nos vaches, une chasse d'eau pour nos chiottes et des préservatifs pour nos nuits câlines, mais nous faut-il des « Gripen », et pourquoi, et pour en faire quel usage ? L'espace aérien suisse n'est pas sans défense, et ne le sera pas dans l'avenir, sans eux. Et contre ce qui menace réellement la sécurité du pays et de sa population, des avions de combat sont à peu près aussi utiles que des submersibles lacustres.

A quand un plaidoyer pour l'achat d'un porte-avion afin de ne pas laisser « nos lacs sans défense » ?

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