« Programme de législature » du gouvernement genevois : Du vide enrobé de menaces


Présentant le « programme » de législature du gouvernement, son président, François Longchamp, s'est excusé de sa vacuité : « nous aurions souhaité vous présenter des promesses enthousiasmantes, ce ne sera pas le cas ». Comme ceux qui auraient souhaité un Conseil d'Etat enthousiasmant sont pareillement déçus, on ne feindra même pas la surprise devant le contenu de ce programme. Le Conseil d'Etat s'est cependant empressé de préciser que les propositions qu'il aurait du faire en juin, pour la législature, il les fera à l'automne, pour l'exercice budgétaire. En attendant,  on devra se contenter d'un « programme de législature » qui ne convient qu'au MCG. Sans doute parce qu'il ressemble à son propre programme : du vide enrobé de menaces.  Avec ce paradoxe : un programme insignifiant peut tout de même dire beaucoup de choses. En les taisant, ou en les travestissant...

Courir après les incendies ou arrêter les pyromanes ?

Le programme de législature du gouvernement genevois n'est éloquent que par ce qu'il tait ou renvoie à l'échéance des budgets annuels. Les nouvelles tâches cantonales imposées par la nouvelles constitution? On gèle. La réforme « Score » du système de rémunération de la fonction publique ? Elle est maintenue, mais sans les mesures d'accompagnement initialement prévues pour éviter les baisses de salaires... L'équilibre des charges et des revenus ? On se refuse à l'atteindre autrement qu'en réduisant les dépenses, même les plus indispensables (en revanche, on ne renonce pas à couvrir Genève de nouvelles prisons...). Bref, résume la députée Salika Wenger, le programme de législature, ce sont « des propositions brumeuses sur les revenus et limpides sur les dépenses ».

«  Genève vit au-dessus de ses moyens d'environ 100 millions de francs chaque année » , se plaint le ministre cantonal des Finances, Serge Dal Busco. Certes, mais si Genève « vit au-dessus de ses moyens », c'est bien que les majorités gouvernementales, parlementaires, voire parfois populaires, de Genève ont réduit les moyens de Genève, à coups de cadeaux fiscaux successifs (un milliard en quinze ans et ce n'est pas fini...) et s'apprêtent à réduire les moyens des communes qui assument leurs obligations, au profit de celles qui se reposent les autres pour ne pas assumer les leur. A quels reports de charges (sans transferts de compétences) sur les villes en général, et la Ville de Genève en particulier, doit-on s'attendre ? Serge Dal Busco exprime le souhait que les réformes de la fiscalité communale et celle de la péréquation intercommunales aient abouti d'ici la fin de l'actuelle législature, en 2018. Ssur le dos de qui ? Le Maire de Genève, Sami Kanaan, qui voudrait bien éviter « une bataille canton-ville » mais la voit s'annoncer, rappelle que « certaines communes, qui ne contribuent guère aux charges collectives, baissent à qui mieux mieux leurs impôts » -or ce sont ces communes pingres, et friquées qui vont bénéficier des « réformes » (la suppression de l'imposition au lieu de travail, par exemple) qu'annonce le Conseil d'Etat...

Si le programme gouvernemental est médiocre, le pire est à venir : le projet de budget 2015 sera sans doute « catastrophique pour le personnel et les prestations publiques », annonce le Cartel intersyndical,.  S'agissant des prestations publiques, le ton a d'ailleurs déjà été donné : Dès septembre prochain, le «supplément d'intégration» versé aux bénéficiaires de l'aide sociale  sera réduit de moitié -soit de 150 francs mensuels sur les 300 actuellement versés. Objectif du Conseil d'Etat : faire une économie de bout de chandelle (neuf millions de francs par an) sur le dos des plus précarisés -ceux pour qui 150 francs de plus ou de moins, c'est surnager ou couler. Mot d'ordre des majorités gouvernementale et parlementaire genevoises : «appauvrissons les plus pauvres, et apprêtons-nous à faire aux multinationales le cadeau d'un taux d'imposition abaissé  » qui coûtera un demi-milliard aux caisses publiques.
« Toutes les bourses seront touchées pour équilibrer nos comptes », annonce le Conseiller d'Etat MCG Mauro Poggia. Ah ouais ? De combien les décideurs de cette amputation d'aide sociale, dont Poggia, ont-ils eux-mêmes réduit leur salaire pour faire faire « des économies » à l'Etat ? Et le même Poggia d'ajouter : « Je ne suis pas convaincu que les personnes à l'aide sociale se retrouvent dans une situation inextricable ». Donc au cas où il n'y seraient pas, mettons-les y, c'est ça ? Eh bien oui, c'est ça.  Avec l'aide du PLR et du PDC, qui joueront ensuite les offusqués devant les dérapages du MCG... tout en s'opposant à ce qu'une commune qui en a les moyens et la volonté (disons, au hasard, la Ville de Genève...) supplée aux carences du canton, dans le domaine de la politique sociale comme dans tous les autres, comme si assumer le service du feu pour le canton impliquait de devoir éteindre les incendies sociaux qu'il a allumés.

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