Initiative pour une caisse publique d'assurance-maladie : Une majorité populaire à (re)conquérir


Le 28 septembre, on votera sur l'initiative populaire fédérale pour une caisse publique d'assurance-maladie, lancée par le Parti socialiste, et contrairement aux précédents. le dernier sondage n'est pas très optimiste, sauf en Romandie et au Tessin. Or pour être adoptée, l'initiative doit non seulement obtenir une majorité dans l'électorat national, mais également une majorité dans une majorité de cantons. La première majorité populaire, nationale, sera difficile mais pas impossible à atteindre, puisque le sondage ne suggère qu'une majorité nationale rejetante de 51 %, avec seulement 9 % d'indécis, et que cette majorité ne tient qu'à un rejet à 59 % en Alémanie, contre une approbation à 55 % en Romandie et 53 % au Tessin. C'est sur cette (re)conquête d'une majorité populaire que va devoir s'atteler la campagne des partisans d'une proposition qui n'a rien d'excessif, et tout d'une bonne grosse vieille démarche social-démocrate, quoi qu'en dise le Conseiller fédéral socialiste qui combat au nom du gouvernement l'initiative de son propre parti...

Tardiora sunt remedia quam mala

Les hausses de cotisations maladie peuvent elles changer le rapport des forces entre partisans et adversaires de la caisse publique d'assurance-maladie ? Alors que SantéSuisse annonçait au début de l'été une hausse moyenne de 4,5 % des primes d'assurance maladie, les directeurs cantonaux de la Santé ont reçu des propositions de hausse, venant des caisses maladie, variant de 0 à 14 %, dans une absolue incohérence entre les caisses. Ces propositions présagent déjà de hausses plus fortes que ces dernières années. Dans le canton de Vaud, une prime mensuelle avec franchise de 300 francs irait jusqu'à 530 francs selon l'assureur (et on ne tient compte ici que de ceux qui ont au moins 20'000 assurés), et des dizaines de milliers d'assurés verront leurs primes augmenter d'au moins 10 %, et de plus de 1000 francs par an pour certaines familles. Dans le canton de Genève, la prime moyenne dépasserait le seuil des 500 francs. Ces hausses sont sans aucun rapport avec l'augmentation des coûts de la santé, alors que le discours officiel ne cesse d'asséner que l'évolution des primes dépend de celle des coûts : le ministre vaudois Pierre-Yves Maillard résume : « des assurés paieront 14 % de plus alors que la hausse des coûts est d'environ 5 % ». Et son collègue genevois suggère que plutôt que la hausse des coûts de la santé, c'est celle du nombre de médecins et « l'absence totale de pilotage du système de santé au niveau national » qui expliquerait l'envolée des primes.
Certes, la création d'une caisse publique n'entraînera pas forcément une baisse des primes (elle ne remet en outre pas en cause le système de la « prime par tête ») : la structure du système d'assurance-maladie et la nature de ses acteurs n'a aucune influence sur le vieillissement de la population et le coût des soins. En revanche, une caisse unique et publique, cela signifie que les primes d'assurance-maladie serviront uniquement à couvrir les coûts de la santé, et pas, comme actuellement, les dépenses provoquées par la concurrence entre les caisses, leur publicité, les frais de changement de caisse, de chasse aux « bons risques » et la constitution de fonds de réserves différenciés par caisse... Et surtout, c'est la seule réponse crédible à la mainmise des caisses-maladies sur le système de santé, et à une concurrence (faussée) qui sape totalement le principe de solidarité entre biens-portants et malades, jeunes et vieux, femmes et hommes.

On aura donc le 28 septembre le choix entre instaurer une caisse unique et publique, et continuer avec les 60 caisses privées qui se font aujourd'hui concurrence sur le dos des assurés. Posé comme cela, le choix paraît simple -seulement voilà : dans la campagne pour ou contre l'initiative, alors même que les ressources dont disposent chacun des deux comités de campagne sont déjà considérablement inégales (on susurre un écart de un à vingt... en faveur, évidemment, des adversaires...), c'est le Conseiller fédéral socialiste Alain Berset qui exprime l'opposition du gouvernement et du parlement à une initiative socialiste qu'il soutenait lorsqu'il n'était encore que parlementaire.

Dans Le Courrier, le Conseiller fédéral plus trop socialiste appelle à voter « non » à une initiative qui imposerait « un changement trop radical ». Comme si promouvoir une caisse publique relevait du révolutionnarisme gauchiste...
On se réjouit d'avance du débat mettant au prise des initiants socialistes (soutenus par un conseiller d'Etat genevois issu du MCG...) et un ministre socialiste (soutenu par le lobby des caisses-maladie) qui assure qu'il veut réformer le système suisse d'assurance-maladie mais pas le «révolutionner» : quel que soit le résultat du vote, il y aura au moins des socialistes dans le camp des gagnants et d'autres dans le camp des perdants.
Quand même, c'est quelque chose que d'être un grand parti pluraliste...




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