Election à l'escabeau du perchoir du Grand Conseil de Piogre : Au bal des faux-derches


Le Grand Conseil genevois a renouvelé son bureau, au sein duquel tous les groupes parlementaires sont représentés, en s'arrangeant habituellement entre copains de chambrée pour y occuper à tout de rôle la présidence, les vice-présidences et les secrétariats. Seul candidat en lice pour la présidence, le député PLR Antoine Barde a été élu sans problème à la succession du socialiste Antoine Droin. Pour la première vice-présidence, le parlement cantonal avait le choix entre le chef de tribu MCG, Eric Stauffer, et un PDC, Jean-Marc Guinchard. C'est le PDC qui a été élu par 54 voix (très vraisemblablement celles de la gauche et du PDC, plus une partie du PLR) contre 44 (le MCG, l'UDC et l'autre partie du PLR). Du coup, vexé et furax, Gominator, qui estimait avoir « toutes les compétences pour diriger les débats » et affirmait sans rire que lesdites compétences «  ne sont pas contestées » dénonce en parlant de lui à la troisième personne « la basse manœuvre des partis qui veulent sanctionner Stauffer ». Et tout cela vous a plutôt un air de bal des faux derches chorégraphié par Pina Bausch que du  Bal du « Guépard » de Visconti...

« Passe-moi la moutarde, je te passerai le séné  »

Carnet de bal : à droite de la droite, l'UDC soutenait la candidature de Stauffer. A droite tout court, le PLR était divisé, et laissait aux membres de son groupe une «liberté de vote» dont ils disposent de toute façon puisque le vote est secret. Au centre, le PDC, dont on se plaira ici à saluer le courage politique, refusait non seulement la candidature de Gominator, mais aussi, et de manière parfaitement cohérente, toute candidature du MCG, dont il estime qu'il « n'a plus la légitimité institutionnelle pour représenter le canton et son parlement ». Il présentait donc la candidature du député Guinchard. A gauche, les Verts étaient sur la même ligne que le PDC, alors que le PS, opposé à la candidature de Stauffer laissait en même temps dire par certains députés qu'il ne s'opposait pas à l'accession d'un autre èmecégiste que Gominator à la première vice-présidence du parlement. Une partie d'« Ensemble à Gauche » cultivait le même « respect du tournus », alors qu'une autre, qu'on salue au passage, était sur la ligne d'une opposition claire au MCG en tant que tel, le résultat étant une « liberté de vote » aussi piteuse que celle du PLR. Or aucune disposition ni légale ni réglementaire n'oblige le Grand Conseil (ni d'ailleurs le Conseil Municipal) à respecter un quelconque « tournus » entre les partis dans la répartition des postes au bureau du parlement. Le MCG doit être représenté dans ce bureau parce que la loi l'y oblige, mais rien n'oblige ni à ce qu'il y soit par un vice-président ou un président... rien, sinon une crise de crétinisme parlementaire faisant privilégier le confort parlementaire («passe moi la moutarde, je te passerai le séné ») à la cohérence politique.

On est finalement bien contents que le MCG n'ait pas choisi de présenter quelqu'un d'autre que Gominator à la vice-présidence du parlement cantonal, et se soit accroché à la candidature de son chef de meute comme une huitre à son pieu : un autre candidat èmecégiste aurait sans doute été élu... Or c'est moins Stauffer qui est problématique que le MCG, collectivement. Et 'il y a peut-être quelque enseignement à tirer de l'épisode parlementaire d'hier, pour les Municipales du printemps, en particulier à Vernier, (où un allumé MCG a été privé il y a quatre ans de Conseil administratif par une alliance de la gauche et du PLR local), à Lancy (ou le luminescent président du MCG tente à nouveau d'entrer à l'exécutif après en avoir été empêché par une alliance de la gauche et du PDC) et à Onex (où Gominator se représente à un exécutif où il n'a été élu il y a quatre ans que parce que la droite démocratique s'est refusée à un « front républicain » avec le PS et les Verts...).Vernier, Lancy, Onex, trois de ces villes où le problème pour la gauche est celui de l'absence de l'une de ses trois composantes, alors même qu'un électorat qui lui serait disponible y existe. A Vernier, à Onex, à Meyrin, à Lancy, la gauche c'est le PS et les Verts. Point barre. La gauche de la gauche est absente, liquéfiée... Et le problème est celui de la gauche dans son ensemble, parce que si l'une de ses composantes est bien seule responsable de sa propre évanescence dans les villes suburbaines, les autres sont responsables de leur incapacité de l'y remplacer : le vide politique qui ainsi se créée ne tarde pas à être rempli par n'importe quoi et n'importe qui...  Dès lors, le choix est simple: faire cadeau d'un siège au MCG (comme à Onex il y a quatre ans) ou soutenir un-e candidat-e de la droite démocratique avec qui il est possible de travailler (comme à Vernier et à Lancy il y a quatre ans... et au Grand Conseil hier). 

Enfin, rappelons, innocemment, qu'en Ville de Genève le MCG présente trois candidats au Conseil administratif : un qui sait lire, un qui sait écrire et un troisième qui sait compter, chacun des trois surveillant les deux autres dangereux intellectuels. Dont au surplus l'un sera peut-être candidat à la présidence du parlement municipal...
Le parlement de la Ville a bien droit, lui aussi, à son bal des faux derches, non ? Et nous, bien le droit d'y solliciter une danse, non ?

Commentaires

Articles les plus consultés