Prestations sociales municipales : Egalisons par le haut, pas par le bas !



Lors du récent débat budgétaire municipal, nous avons entendu des bancs de la droite une dénonciation de l'« inégalité » qu'introduirait, entre les habitants du canton, le fait que la Ville de Genève accorde aux siens des prestations que la plupart des autres communes n'accordent pas aux leurs (allocation de rentrée scolaire, aide sociale complémentaire aux allocations complémentaires cantonales, par exemple). Nous n'avons en revanche pas entendu formuler la proposition de contribuer si peu que ce soit à ce que ces prestations soient introduites dans les communes qui ne les accordent pas, mais seulement le dur désir d'en priver les habitants de la Ville. La Ville de Genève ne peut certes (et hélas) imposer à d'autres communes une élévation de leurs prestations sociales au niveau de celles de la Ville, mais puisqu'une majorité du Conseil municipal trouve cette inégalité inacceptable, et que nous espérons qu'une majorité considère que ce scandale ne réside pas dans le fait que les habitants de la Ville bénéficient d'un droit mais dans le fait que les habitants des autres communes n'en bénéficient pas, nous proposons que s'instaure une égalité des droits sociaux non par le bas, mais par le haut.

On fait comme ce qu'on peut, avec les compétences légales qu'on a, mais au moins on le fait...

Une alliance de syndicats, d'oeuvres d'entraide et d'organisations engagées sur le « terrain social » a publié, juste avant noël, une déclaration commune dénonçant les attaques systématiques portées contre l'aide sociale et contre celles et ceux qui en bénéficient : « Depuis un certain temps, il est redevenu à la mode de traiter les bénéficiaires de l'aide sociale de profiteurs » et les travailleurs sociaux de « naïfs écervelés au grand coeur ». Le message délivré par ces attaques est d'une clarté qu'on ose qualifier de biblique : les pauvres menacent le « consensus social », attaqué par des fainéants vivant aux crochets des honnêtes travailleurs suisses. Il faut donc «traquer les abus» -et peu importe que ces abus soient en nombre et en importance infimes si on les compare à la fraude et l'évasion fiscale, aux rémunérations somptuaires des hauts dirigeants de l'économie... et les indemnités que touchent les parlementaires qui se font une mission d'opposer des pauvres à d'encore plus pauvres, les chômeurs aux précaires et les précaires aux clandestins, tout en distribuant à tour de bras des cadeaux fiscaux qui vidant les caisses publiques, réduisent les moyens à disposition de l'aide sociale, ce qui donne ensuite prétexte à réduire celle-ci et à durcir les conditions de son obtention.

La loi cantonale qui, à Genève, attribue la compétence des aides sociales individuelles au canton est celle que le Parlement genevois a voulu -et il est de droite- et que le Conseil d'Etat a voulu -et il est de droite. Nous faisons avec cette loi comme nous faisons avec toutes les lois : si nous avions la possibilité d'imposer des règlements municipaux qui aillent beaucoup plus loin que la loi, nous le ferions. Nous ne le pouvons pas -du moins pas sans changer la loi cantonale. Donc on fait ce qu'on peut, avec les compétences légales qu'on a, mais au moins on le fait. Par exemple, faire accorder par la Commune une aide sociale en complément des allocations complémentaires cantonales. En complément, pas « en doublon » : l'aide sociale municipale suppléée aux carences de l'aide sociale cantonale, et si l'aide sociale cantonale est insuffisante c'est que la politique sociale cantonale l'est.
La droite municipale trouve scandaleux que les habitants de la Ville bénéficient d'un droit dont ne bénéficient pas ceux des autres communes ? Ce que nous trouvons scandaleux, c'est que les habitants des autres communes ne bénéficient pas de ce droit. Alors on égalise comment ? par le bas, comme le veut la droite, ou par le haut, comme nous le voulons ? cette question, d'ailleurs, ne se pose pas seulement de commune à commune, mais aussi de canton à canton, et de pays à pays... et la réponse y sera la même : ce n'est pas parce que des collectivités publiques ne font pas leur travail que celles qui le font doivent cesser de le faire.

Nous avons donc, par une motion déposée mardi, proposé à la sagacité du Conseil Municipal, et à la solidarité intercommunale dont nous savons que ce Conseil l'a chevillée au cœur, le texte suivant, sobre et de bon goût politique :

Le Conseil Municipal invite le Conseil administratif à intervenir auprès des autres communes du canton et de l'Association des communes afin d'obtenir que le droit à une aide municipale complémentaire aux allocations complémentaires cantonales et qu'une allocation de rentrée scolaire soit garanti à tous les ayant-droit potentiel-le-s, dans toutes les communes genevoises, au moins au même niveau qu'en Ville de Genève.

Si une proposition relevant d'une évidence aussi incontestable ne recueille pas l'adhésion unanime des élus,  c'est à désespérer, non ?
           

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