Fonds de tiroir


Après l'approbation, à une cinquante de voix de majorité, de la loi sur la police, le PLR et le PDC ont accusé le PS et les Verts, qui soutenaient en effet très mollement la loi (qu'ils avaient d'ailleurs victorieusement attaquée au Tribunal fédéral sur trois de ses dispositions), d'avoir été « totalement absents » de la campagne pour le « oui » et d'avoir laissé les électeurs de gauche voter contre, avec le MCG (mais pour d'autres raisons). A quoi le PS et les Verts ont répondu que le PLR, qui n'avait lui-même pas hésité à s'allier au MCG en décembre dernier pour produire un budget cantonal de merde, puis défaire la « Loi Longchamp » contre la spéculation sur les propriétés par étage, était particulièrement mal placé pour donner des leçons de discipline gouvernementale à qui que ce soit. Sauf éventuellement au MCG, dont un représentant siège au Conseil d'Etat mais qui combattait quand même la loi sur la police défendue par le Conseil d'Etat. Bref, on est bien à Genève, avec son paysage politique net, clair et cohérent. Et on ne s'en lasse pas : trois camarades de solidaritéS ont déposé un recours en annulation de vote du 8 mars (et donc une demande d'un nouveau vote sur le même objet, façon  initiative de l'Avivo sur les TPG). C'est vrai que le débat sur la loi sur la police a été si riche, si fructueux, si intelligent, si argumenté, qu'on frétille de plaisir à l'idée de le reprendre da capo.

Quatre parlementaires fédéraux (trois socialistes vaudois, un démo-chrétien fribourgeois) s'en prennent aux banques, et plus précisément au véritable racket que la plupart d'entre elles infligent à une clientèle captive, celle de leurs « petits clients», dans une société où il est désormais impossible de se passer d'un compte bancaire. Or si, comme le relève la socialiste vaudoise Géraldine Savary, « avant, on gagnait de l'argent en ouvrant un compte », grâce aux intérêts et à l'extrême modicité des frais perçus par la banque, « aujourd'hui, avec la multiplication des frais, on en perd». Sauf quand on est un gros client, à qui la banque fait cadeau des frais. Les quatre mousquetaires vont donc déposer quatre interventions pour exiger de chaque banque qu'elle assure un service de base gratuit, ou très bon marché, pour la gestion d'un compte, les services particuliers excédant la gestion basique pouvant, eux, rester payants. On cesserait donc d'être rançonné quand on prend de l'argent au bancomat, à la fin de l'année au prétexte de gestion du compte,  quand on demande une carte bancaire tout ce qu'il y a de plus basique, ou quand on fait ses paiements par internet comme on ne cesse de nous y inviter. Et voilà, ça y'est, les socialos (et même un PDC) s'en prennent à nouveau à nos banques, sous le prétexte futile qu'elles rackettent les petits pour caresser les gros dans le sens du poil... Des comptes en banque gratuits, pis quoi encore ? Pourquoi pas des banques respectant la loi, pendant qu'on y est ?

Mercredi, le Conseil Municipal de la Ville a non seulement refusé une proposition du Conseil administratif de rénover l'annexe du Conseil Municipal et du Grand Conseil (le café de l'Hôtel-de-Ville, donc, haut lieu des abreuvages de pauses parlementaires et de connivences festives entre adversaires politiques), mais a de plus refusé de la renvoyer en commission, ce qui aurait permis de la modifier et d'en faire une proposition acceptable par une majorité. Faut dire qu'on était à un mois des zélections municipales et qu'une majorité (de droite de la droite, de droite tout court et des Verts) avait une furieuse envie de se « faire Pagani ». Résultat, le bistrot, qui nécessite des travaux urgents de remise aux normes d'hygiène et de sécurité, risque d'être fermé par les services cantonaux compétents, précisément pour des raisons d'hygiène et de sécurité. Et que si ça trouve, en mai prochain, la majorité qui voulait se « faire Pagani » au nom de la défense du bistrot se retrouvera avec toujours Pagani au Conseil Administratif, mais un bistrot fermé pour irrespect des normes d'0hygiène et de sécurité. Et là, on l'avoue d'avance, on se permettra de doucettement ricaner. Parce qu'en fait, on a mauvais fond.

Jeudi, au Grand Conseil, on a eu droit, à propos de l'édification dans un parc de la Ville de Genève d'un mémorial du génocide arménien dont on commémorera le centième anniversaire le 24 avril prochain,  à un véritable concours d'applaventrissements : le Conseil fédéral se couche devant le gouvernement turc, le Conseil d'Etat genevois se couche devant le Conseil fédéral et le Grand Conseil se couche devant le Conseil d'Etat  Une motion du PDC, soutenue par la gauche, demandait au Conseil d'Etat de favoriser (au lieu que d'entraver, comme il le fait actuellement) l'édification de ce mémorial. A une voix de majorité (et avec trois abstentions dont on se demande ce qu'elles peuvent bien signifier sur une question pareille), cette motion  a été refusée par le PLR, l'UDC et le MCG. Avec des arguments du genre « la Suisse doit respecter la neutralité sur le territoire de l'ONU » (François Longchamp, courageux conseiller d'Etat PLR) -or le mémorial devait être installé sur un parc de la Ville de Genève, hors du « territoire de l'ONU »... Le mémorial serait « contreproductif » à la reprise du dialogue entre l'Arménie et la Turquie (Patrick Saudan, soucieux député PLR) et il ne faut pas « discriminer les souffrances » (Michel Amaudruz, oécuménique député UDC). Et le conseiller d'Etat Longchamp, carrément faux derche, d'appeler à trouver « une solution cette année encore pour pouvoir commémorer le centenaire du génocide » (dans un mois...), alors qu'il a tout fait pour empêcher qu'une telle solution se trouve. Le 16 avril, une semaine avant la commémoration du génocide arménien, se tiendra à Carouge une cérémonie de commémoration de la Shoah. On attend donc que le PLR, l'UDC et le MCG invitent les organisateurs à y renoncer, pour ne pas chagriner les derniers vieux nazis, ni provoquer leurs néo-héritiers.

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