Demain, 15 heures, place Neuve : Manifestement...

Demain, samedi, on a manif à Genève (à 15 heures, place Neuve). Pour une palanquée d'excellentes raisons, qu'on peut nouer en gerbe pour célébrer le "printemps de l'unité pour la justice sociale et l'austérité". En belle et bonne langue de bois dans le texte. Mais foin d'ironie : des raisons de manifester, on en a en effet de nombreuses : on manifestera contre les obsessions comptables qui, systématiquement, aboutissent à faire payer au personnel et aux usagers des services publics les cadeaux fiscaux qu'on a accordé depuis des lustres (et qu'on s'apprête à faire suivre d'autres) aux grosses fortunes, aux hauts revenus et aux entreprises, . On manifestera contre la proclamation analphabète qu'"on en fait trop pour la culture". On manifestera contre les coupes dans les prestations sociales. On manifestera contre le manque de personnel dans les hôpitaux, contre l'absence de priorité donnée aux transports publics, contre la xénophobie galopante. On manifestera. On SE manifestera. Manifestement. A demain.

"C'est la crapule, Sire. ça bave aux murs, ça monte, ça pullule" (Arthur Rimbaud)

La manifestation de samedi va dérouler son cortège une semaine avant un vote bien  plus important qu'il y parait : un vote municipal, pourtant, mais dont la portée ne se limite pas à la commune de Genève : le vote référendaire contre les coupes budgétaires opérées par la droite coagulée dans les moyens de fonctionnement de la Ville,m dans les subventions culturelles, dans les subventions sociales, dans le Fonds chômage -et on en passe. L'importance de ce vote se mesure à la craindre de le perdre qui anime de toute évidence la droite, jusqu'à la tentative de le faire annuler et reporter au prétexte que le Conseil administratif de la Ville a eu l'insigne culot de défendre sa position dans la brochure de votation -et dans une "tribune libre" signée dans la "Tribune de Genève" par la responsable socialiste des finances. Ces coupes sont
"indolores", se récrient ceux qui les ont opérées -et qui hurlent à la mort quand on propose de ne pas augmenter leurs jetons de présence... Ils se gardent bien cependant de préciser que les coupes "indolores" qu'ils ont réussi, en se coagulant, à faire voter par le Conseil municipal, ils entendent les reproduire chaque année. Que ce n'est donc pas 2 %, 2,5 % ou 10 % de moins et basta !, mais que ce sont des coupes, à ce niveau ou à un autre, chaque année, Cumulées les unes aux autres, et cumulées aux coupes opérées au niveau cantonal. Par les mêmes forces politiques (et parfois les mêmes parlementaires, cumulards eux aussi -une spécialité du MCG).  L'exercice de rabotage indistinct auquel la droite coagulée s'est livrée sur le budget 2016 de la Ville, elle-même le pose comme un prélude : elle veut couper au moins 50 millions de francs dans les dépenses de la Ville, éliminer des services entiers, supprimer des prestations à la population.

On n'arrête pas un massacre en attendant qu'il se commette : on l'arrête en parant à son premier coup. Celui précisément que la droite municipal a tenté de donner, en visant la culture, mais aussi l'action sociale, et de la même manière. "Il fallait frapper un grand coup", explique la cheffe du groupe PLR au Conseil Municipal. Frapper qui, donner à un grand coup à qui ? Au Conseil administratif ? Mais ce sont les associations et les institutions culturelles et sociales, les lieux et les acteurs de la  création et de la solidarité, qui le prennent, ce coup, qui, s'il n'est paré par le vote du 5 juin, les contraindra forcément à réduire, dans le domaine social, l'aide qu'elles apportent aux plus démunis, et au bout du compte, à en déplacer la charge sur des services publics déjà victimes, eux aussi, de coupes budgétaires et de restrictions de personnel. Le message est calamiteux de mépris à l'égard des  associations d'entraide, des organisateurs d'activités de loisirs dont bénéficient 5000 enfants en Ville de Genève et des acteurs culturels. Même les rentiers AVS et AI bénéficiant des prestations complémentaires municipales ont été touchés: la Ville a dû les avertir que ces prestations, financées sur une ligne budgétaire réduite de 2 % par la droite coagulée, allaient par conséquence mécanique être réduites dans l'attente d'un vote populaire qui les rétablira... si nous le gagnons. Et il faut que nous le gagnions : acteurs culturels, associations d'entraide, bénéficiaires des aides municipales : toutes et tous sont pris en otage d'un règlement de compte politicien. Et tout ça pour quoi ? Pour équilibrer le budget ? Équilibré, il l'était déjà... Parce que la Ville est en crise financière ? Ses comptes sont bénéficiaires depuis plus de dix ans (pour un total de près de 700 millions de 2004 à 2014, et de plus de 39 millions en 2015), période pendant laquelle sa fortune a triplé pour atteindre le milliard (en étant d'ailleurs sous-estimée) et sa dette a diminué de 10 %... Non, plus trivialement, parce que cette prise d'otage a été le seul moyen que la droite municipale a trouvé pour montrer qu'elle existe face à un Conseil administratif à 80 % de gauche, où elle ne réussit pas à faire élire un ou une deuxième représentant-e de ses partis, et où le seul représentant de droite doit de l'être au renoncement de la gauche à présenter cinq candidatures.
A demain, et au 5 juin, pour rappeler à celles et ceux qui tentent de faire payer aux créateurs de culture et aux tisseurs de lien social, d'où nous vient le mot "politique", et ce qu'il signifie : il vient du grec "politikos", la Cité. Et il signifie l'engagement aux côtés de la Cité et de ses habitantes et habitants. Aux côtés, pas sur leur dos. Et pour leurs droits, pas pour la satisfaction piètrement vaniteuse de réussir à constituer une majorité en coagulant des démo-chrétiens et des èmecégistes au PLR et à l'UDC. 

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