Brèves de comptoir


« Les fonctionnaires, première force du parlement genevois », titrait, alarmé, « Le Temps » du 4 mai. Selon les calculs du quotidien, il y aurait «39 fonctionnaires (anciens, actuels et retraités) sur les 100 élus qui composent le parlement genevois » (les collaborateurs de l'Etat peuvent siéger au Grand Conseil depuis bientôt vingt ans). Gargl... tant que ça ? Ben oui, quand on commence, pour faire nombre, par compter comme «fonctionnaires» non seulement ceux qui le sont réellement, mais aussi ceux qui l'ont été et ne le sont plus. Et qu'on ajoute aux fonctionnaires cantonaux les fonctionnaires municipaux. Et qu'on ajoute à tous ces fonctionnaires cantonaux et municipaux, « anciens, actuels et retraités », les employés des régies publiques -aéroport, TPG, hôpital- qui ne sont pas fonctionnaires, on arrive assez facilement à 39 «fonctionnaires» sur 100 députés. Sauf que sur ces 39 «fonctionnaires», la majorité ne le sont sans doute pas ou plus, ou pas cantonaux. C'est quoi le but de cette addition à la con, sachant que les députés ne se prononcent pas au parlement en fonction de leur statut professionnel mais des consignes de leurs groupes (oui, bon, d'accord, pas toujours, y'en qui qui n'en font qu'à leur tête, mais c'est pas la majorité de l'espèce), et que sur les 39 «fonctionnaires» inventoriés par "Le Temps", 24 sont des élus de droite ou d'extrême-droite ?

Dimanche 25 novembre, on vote. En Suisse, dans les cantons (dont Genève) et les communes (dont Genève). ça faisait longtemps. Donc, on votera en Suisse sur l'initiative populaire pour «sortir du nucléaire». Et on lui dira oui. Et on  votera dans le canton de Genève sur l'initiative populaire « touche pas à mes dimanches » (contre la libéralisation de l'ouverture dominicale des magasins). Et on lui dira « oui » aussi. Et sur le contre-projet adopté par le Grand Conseil (là, on dira rien). Et quand on  nous demandera si on préfère l'initiative ou le contre-projet, on dira qu'on préfère l'initiative. Et en Ville de Genève, on votera sur l'aména-gement de la Plaine de Plainpalais, la plantation de 87 arbres et la transplantation de 54 arbres pour cet aménagement. Et on dira « oui ». Parce que cette morne plaine a bien besoin d'un petit coup de renouveau avant que tous les arbres soient tombés de mort naturelle. Trois objets seulement (avec cinq mots d'ordre), c'est léger, comme ouiquènde votatoire, mais bon, on prend ce qu'on nous donne, hein...

Lors d'une séance d'information organisée par la Ville de Genève autour du projet des « réverbères de la mémoire », célébrant « la mémoire commune de Genève et des Arméniens » (mémoire dans laquelle il y a celle du génocide de 1915, et devant être installé dans le parc Trembley, des indigènes du coin (outre les habituels néga-tionnistes turcs du génocide) ont exprimé leurs craintes : une rive-raine prédit que « les Arméniens vont envahir le parc » (avec l'aide des Kurdes ?), une autre assure que «ça va attirer les moustiques» (sans doute des moustiques arméniens)... d'autres proposent d'installer le projet dans un cimetière ou autour de l'église arménienne. Curieu-sement, personne n'a proposé d'appeler Erdogan à la rescousse. On peut pas penser à tout.

Discourant devant des patrons, Nicolas Sarkozy a nié toute implication humaine dans le réchauffement climatique : « il faut être arrogant comme l'homme pour penser que c'est nous qui avons changé le climat ». Et arrogant comme Sarkozy pour penser que son opinion à ce sujet vaut quoi que ce soit.

On a failli l'oublier, ce truc soumis au vote populaire à Genève, dimanche : le Conseil d'Etat et la majorité du parlement proposent de plafonner à 500 francs la déduction fiscale pour frais de déplacement entre le domicile et le lieu de travail. Pourquoi 500 francs ? Parce que c'est le prix d'un abonnement TPG annuel. C'est logique. Et c'est équitable : tout le monde serait logé à la même enseigne, quel que soit le mode de transport choisi. De toute façon, seuls 15 % des contribuables genevois verraient leur déduction plafonnée (tous les autres sont en dessous du plafond, ou à sa limite). En revanche, 44 % des contribuables frontaliers verraient leur facture fiscale augmenter, puisque plus ils viennent de loin, plus leurs frais de transports sont importants, et dépassent la limite proposée. Mais qu'ils paient plus, les frontaliers, réjouit évidemment le MCG (qui ne voit que cet effet dans la proposition gouvernementale -et ça lui suffit pour la soutenir : aux âmes simples, il faut soumettre des arguments simples). Sur les autres bancs de la droite de la droite de la droite locale, on fait la grimace : Pour la Conseillère natio-nale UDC genevoise qui préfère Zurich à Genève, cette proposition n'est « rien d'autre qu'une hausse d'impôt ». Et donc elle est contre, et l'UDC avec elle. Pour la gauche, en revanche, le plafonnement à 500 balles est une manière d'encourager la « mobilité douce ». Et comme ça rapporterait 28 millions aux caisses publiques, c'est toujours bon à prendre, si on est capable d'en faire bon usage -pour la « mobilité douce », justement. Les transports publics, par exemple... Bon, bref, nous, on votera «oui» Même si le MCG aussi votera «oui». Ben quoi, on peut pas tout de même prendre cette bande de nazes comme repères a contrario pour nos prises de position. Ni comme repère de quoi que ce soit, d'ailleurs.

On n'a pas eu seulement le feuilleton de la burqa des rues et du burkini des plages, cet été, à se mettre sous la dent : on a aussi eu le feuilleton des affres de la gauche de la gauche genevoise. On résume : une partie des membres du groupement de «Défense des Aînés, des locataires, des emplois et du logement » (DAL), l'une de sept composantes de la coalition « Ensemble à Gauche », qui dispose de groupes parlementaires au Grand Conseil et au Conseil municipal de la Ville de Genève, ont décidé de créer un nouveau parti, le Parti radical de gauche. Qui n'a à voir avec le parti homonyme français sauf, précisément cette homonyme (il ne serait d'ailleurs pas déshonorant d'être du même parti que Christiane Taubira). Deux membres du nouveau PRG siègent au Grand Conseil (Pierre Gauthier) et au Conseil Municipal (Pierre Gauthier et Stéphane Guex-Pierre). En conflit avec les créateurs du PRG alors qu'ils étaient encore membres du DAL, les repré-sentants du principal (mais pas unique, quoi qu'il en rêve) groupe de la coalition de la gauche de la gauche, solidaritéS, ont sauté sur l'occasion pour mitonner une petite purge interne, avec le soutien du Parti du Travail, au prétexte que le Parti radical de gauche n'étant pas membre de la coalition (forcément, il n'existait pas au moment de la création de celle-ci), ses membres ne pouvaient plus être représentants d'EàG dans les parlements, et donc ne pouvaient plus siéger dans les commissions parlemen-taires comme représentants d'EàG, alors que c'est en tant que tels qu'ils ont été élus, et non pour  représenter telle ou telle composante, réelle ou putative, passée, présente ou future de la coalition. Peu importe à la majorité des composantes d'« Ensemble à Gauche »: les dissidents ont prestement été remplacés dans les commissions municipales par des élu-e-s de solidaritéS. Virer les deux représentants du PRG des commissions où ils représentent la coa-lition et les remplacer par des repré-sentants de solidaritéS, à défaut de pouvoir carrément les virer du Conseil municipal et du Grand Conseil, c'est facile et ça peut rapporter quelques jetons de présence supplémentaires au groupe purgé de ses hérétiques. Chose rêvée, chose faite. L'ordre règne à gauche de la gauche. Quant à convaincre son électo-rat que la coalition, ou ce qu'il en reste, est capable de représenter une alternative à la gauche gouvernementale, on voudrait pas ironiser, mais finalement, on se dit qu'on y est bien, dans notre petite niche, au PS...

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