Fonds de tiroir


Pour convaincre le Conseil des Etats de ne pas suivre le Conseil national dans sa tentative d'édulcorer, dans son dispositif d'application, le contenu de l'initiative (victorieuse) de l'UDC sur (c'est.-à-dire contre) l'immigration, mais au contraire d'exiger une application stricte de ce texte inapplicable, un trio d'udécistes plus très frais (Blocher, Amstutz et Föhn) a trouvé opportun de descendre en flammes les sénateurs PDC et PLR, traités de « laquais de la gauche ». Des fois, les méthodes de l'UDC pour se trouver une majorité parlementaire tiennent un peu de celles d'un kamimaze djihadiste, mais bon, si ça lui fait plaisir d'injurier des gens qu'elle doit convaincre de la suivre, nous, ça nous en touche une sans remuer l'autre, comme disait Papy Chirac quand il était encore en état de savoir où étaient l'une et l'autre...

On ne sait toujours pas ce que c'est que la  « classe moyenne » (sinon qu'elle n'est ni pauvre, ni riche, ce qui ne nous avance guère), mais l'Office fédéral de la statistique, qui la définit par le revenu (entre 3917 et 8457 francs par mois au plan suisse en 2013 pour une personne seule), nous assure que l'argent peut faire son bonheur. Si c'est l'OFS qui le dit... Telle qu'il la définit, la  « classe moyenne » représenterait 58,1 % de la population suisse, soit 27,8 % pour la classe  « moyenne inférieure » (de 3947 à 5639 francs par mois) et 30,3 % de la population pour la classe  « moyenne supérieure » (de 5640 à 8457 francs). On notera tout de même au passage que dans une ville comme Genève, des gens que l'OFS considèrent comme faisant partie de la  «classe moyenne» pourraient être considérés comme faisant partie de la classe  « pauvre » : avec moins de 4000 francs de revenu par mois, dans ce bout de la Suisse, on paie son loyer, son assurance-maladie, sa bouffe et ses vêtements et ses déplacements, mais pas grand chose de plus... L'OFS entre ensuite dans un peu plus de détails, quitte à enfoncer quelques portes au moins entrouvertes : le sentiment d'insécurité croît en relation inverse du revenu (plus le revenu est bas, moins on se sent en sécurité), comme la compétence à  « décoder l'information » (ce qui renvoie logiquement au niveau de formation, qui renvoie tout aussi logiquement, quoique pas mécaniquement, au niveau de revenu). La  « méfiance envers les institutions » politiques et judiciaires elle aussi croît en raison inverse du revenu, ce qui est là encore assez logique (on ne voit pas pourquoi les personnes à faibles revenus seraient satisfaites du système dans lequel elles tentent de survivre). En revanche, la police échappe à cette méfiance. Voilà. Est-ce que ça nous permet de mieux définir la  «classe moyenne » ? Pas vraiment. ça nous permet juste de savoir ce que l'Office fédéral de la statistique considère comme étant cette fameuse (et improbable)  « classe », dont la moitié des personnes qui la composent (selon l'OFS) ont un revenu inférieur à la moyenne, une formation inférieure à la moyenne, mais un sentiment d'insécurité supérieur à la moyenne. On est bien avancés.

Les Fêtes de Genève ont titillé l'imagination fertile (encore qu'en l'occurence, cette fertilité était toute relative) des élus municipaux de la Ville. Surtout à droite, il faut bien le dire, et parce qu'ils y ont été un peu obligés par l'aboutissement de l'initiative populaire municipale «pour des fêtes plus courtes et plus conviviales». Et donc, au Conseil municipal, on a été gratifiés de trois propositions ambitionnant toutes d'encadrer le futur contre-projet que le Conseil administratif doit pré-senter (et que le Conseil municipal doit approuver) pour faire face à une initiative qu'on n'a pas été très nombreux à soutenir au sein dudit Conseil. Le PDC a présenté une longue liste de desiderata, l'UDC demande dans une résolution la renaissance du bon vieux corso fleuri (et des stands ne pouvant être tenus que par des résidents genevois, on ne les refait pas, nos xénophobes locaux), et le MCG le maintien d'un feu d'artifice « de renommée mon-diale ». Toutes ces propositions ont été prestement expédiées pour étude en commission, avant que la proposition du Conseil admi-nistratif prenne le même chemin pour aboutir en séance plénière. Pleine de quoi ? de beaux discours, sûrement. De bonnes idées ? on a des doutes. Assez de doutes en tout cas pour continuer à soutenir l'initiative. et à vous inviter à vous préparer à la voter.

Les autorités de Wildhaus Alt Skt Johann, dans la canton de Saint-Gall, toutes surprises qu'un concert néonazi ait rassemblé plus de 5000 personnes (le double de la population de la commune) dans le village d'Unterwasser (le plus grand ras-semblement d'extrême-droite orga-nisé en Suisse depuis plus de septante ans, et au moins l'un des plus grands organisé en Europe depuis long-temps), envisagent de porter plainte contre les organisateurs du concert, qui avaient donné de fausses information pour obtenir l'autorisation de tenir leur petite sauterie, et n'avaient pas annoncé, jusqu'à l'avant-dernier moment (et sur les réseaux sociaux) où elle allait se dérouler, trop tard pour que la commune et les propriétaires de la salle puissent tout annuler :  « trop de monde était déjà sur place », convient, penaude, la police, qui ajoute qu'avec tout ce monde, empêcher la tenue du concert aurait été très difficile, voie même dangereux pour les participants et pour des tiers. Pourquoi, c'est pas des gentils, les fachos ?  « Nous ne voulons pas de ces gaillards chez nous » a fièrement, mais un peu tard, proclamé le Conseiller d'Etat en charge de la police. Ils n'en voulaient pas, mais ils les ont eu.  A l'affiche (virtuelle) du concert, des groupes d'extrême-droite (c'est logique, pour un concert néonazi, on allait pas inviter Stephan Eicher...), dont les Bernois d'Amok, déjà condamnés pour négationnisme et appel au meurtre de basanés. Mais pour le porte-parole de la police saint-galloise, on ne peut pas  « affirmer qu'il s'agit d'un concert néonazi, car nous n'avons pas pu contrôler tous les participants, mais nous pouvons confirmer qu'il s'agit d'un concert d'extrême-droite ». On a le sens de la nuance et de la distinction politique, à la police saint-galloise. Et elle a raison, faut être prudent, avec les étiquettes, des fois qu'un concert de groupes appelant au pogrom attirerait des baba cools et des bobos solidaires des réfugiés, on sait jamais... De toutes façon, comme disait un porte-parole du groupe d'extrême-droite PNOS , qui fêtait le 22 octobre en Suisse orientale la création de cinq nouvelles sections (d'assaut ?), les chanteurs qu'on invite dans ce genre de concert y sont pour chanter des  « ballades ». Des lieder. Des berceuses. Ouais. Et ce sont les communes et les polices locales qui se font balader. Dans la farine.

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