La Ville de Genève n'aura toujours pas de budget le 20 mars

Le budget d'en bas


Le Conseil Municipal de la Ville de Genève devait être convoqué pour le lundi 20 mars, avec à l'ordre du jour l'adoption d'un budget pour l'année commencée depuis des mois. Convoqué, il l'a été. Mais sans budget à l'ordre du jour. En attendant le bon vouloir d'une majorité de la Commission des finances, puis du Conseil municipal, la Ville fonctionne depuis le 1er janvier sous le régime des "douzièmes provisionnels", c'est-à-dire sur la base du budget 2016 découpé en tranches mensuelles. Or contrairement aux cantons et à la Confédération, les communes n'ont pas la possibilité de se décharger de leurs responsabilités sur un échelon institutionnel inférieur : même d'une ville de 200'000 habitants, leur budget est le "budget d'en bas", le seul qui finance des prestations publiques qui ne peuvent être reportées sur un autre budget public mais seulement sur leurs habitants ou le tissu associatif. Ce dont jusqu’ici, une majorité du Conseil municipal de la Ville de Genève semble n'avoir pas pris conscience -ou se contrefoutre. Ce qui, incidemment, ne semble pas empêcher de dormir la minorité (PS, Verts, PDC) favorable à l'adoption d'un budget, et qui pourrait elle-même convoquer une séance du Conseil Municipal, mais ne le fait pas. Contagieuse torpeur...


Un peu de constance dans les positions politiques ne ferait pas de mal. Mais c'est sans doute trop demander.


A Genève, le mois de décembre est, en principe, le mois des budgets -mais pas forcément celui de la cohérence des postures politiques : le projet de budget cantonal genevois présenté par le Conseil d'Etat a été accepté (sans enthousiasme) en décembre par une majorité hétéroclite du Grand Conseil (PS, Verts, PDC, MCG), contre une minorité tout aussi hétéroclite (UDC, PLR, Ensemble à Gauche) : "Une nouvelle année sans budget est inimaginable pour Genève, ne serait-ce qu'en termes d'image". En Ville de Genève, en revanche, une année sans budget est tout à fait imaginable pour la droite,  puisque une majorité tout aussi bricolée qu'au Grand Conseil (mais bricolée par d'autres) a refusé le 22 décembre le projet de budget du Conseil administratif, le PLR, l'UDC et le MCG recevant le soutien d'Ensemble à Gauche contre le PS, les Verts et le PDC. Pourtant, les raisons de soutenir le projet de budget cantonal étaient les mêmes que celles de soutenir le projet de budget municipal, et les raisons de s'opposer à l'un les mêmes que celles de s'opposer à l'autre... Lors de la présentation du projet de budget 2014, l'UDC en revanche saluait l'équilibre budgétaire et annonçait qu'elle allait voter le budget "Un budget voté dans la sérénité, tout le monde y gagne" ponctuait-elle. Mais c'était il y a deux ans... Et surtout quelques mois avant les élections municipales. Deux ans plus tard, l'UDC rejoignait le PLR, le MCG et Ensemble à Gauche pour refuser le projet de budget alors qu'elle se satisfaisait du budget 2014.  Un peu de constance dans les positions politiques ne ferait pas de mal. Mais c'est sans doute trop demander.
"Faire de la politique, c'est avoir un projet de société avec des projets concrets", avait lancé la Conseillère administrative Sandrine Salerno à la majorité du Conseil municipal qui avait refusé d'examiner le projet de budget de la Ville de Genève. Demander à la droite et à l'extrême-droite genevoise d'avoir "un projet de société avec des projets concrets" témoigne d'un bel optimisme quant aux capacités de celles et ceux à qui on s'adresse... et dont la posture politique a consisté jusqu'à présent à exiger du Conseil administratif de gauche qu'il présente le budget que veut la majorité de droite du Conseil municipal -qu'elle veut, mais est incapable de concevoir elle-même.
Elle a peut-être raté sa vocation, Sandrine Salerno : elle aurait du faire enseignante de classe spécialisée.

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