Il y a 80 ans, à Gernika



Le lundi 26 avril 1937, jour de marché, quatre escadrilles de la Légion Condor allemande accompagnées par des bombardiers italiens et escortées par des avions de chasse allemands bombardent la petite ville basque de Gernika. L'attaque commence à 17 h 30 à la mitrailleuse puis aux bombes explosives et enfin aux bombes incendiaires. La ville est en flammes. Le bilan officiel par le gouvernement basque, fait état de 1 654 morts et de plus de 800 blessés. Le journaliste britannique George Steer, correspondant à l'époque du Times, estime qu'entre 800 et 3 000 des 7 000 habitants de Guernica périrent. Les archives russes mentionnent 800 morts. Ces chiffres ne prennent en compte ni les personnes retrouvées ultérieurement sous les décombres, ni celles décédées plus tard de leurs blessures, ni celles victimes des mitraillages des réfugiés de Guernica par les avions de chasse à l'extérieur des limites de la ville.
Ce bombardement a souvent été considéré comme un des premiers raids de l'histoire de l'aviation militaire moderne sur une population civile sans défense, le premier tapis de bombes et le premier bombardement alternant bombes explosives et incendiaires. Pourquoi bombarder Gernika ? La ville n'avait pas d'importance stratégique, mais une importance symbolique : l'autonomie juridique et fiscale était représentée par l'arbre de Guernica où les rois de Castille allaient prêter serment de respecter les libertés basques. Et le Pays Basque et son gouvernement autonome, pourtant politiquement largement dominés par des forces conservatrices, s'étaient immédiatement opposé  au pronunciamiento franquiste, en mobilisant leurs milices et en affirmant leur soutien au gouvernement républicain espagnol.
Le dernier exilé de la guerre d'Espagne y revenait en 1981 : le « Guernica » de Picasso. Picasso avait refusé que son oeuvre gagne l'Espagne avant que la démocratie l'ait gagnée.



La victoire de Guernica (Paul Eluard, Cours naturel, 1938)
I
Beau monde des masures
De la nuit et des champs
II
Visages bons au feu visages bons au fond
Aux refus à la nuit aux injures aux coups
III
 Visages bons à tout
 Voici le vide qui vous fixe
 Votre mort va servir d'exemple
IV
 La mort cœur renversé
V
 Ils vous ont fait payer le pain
 Le ciel la terre l'eau le sommeil
 Et la misère
 De votre vie
VI
Ils disaient désirer la bonne intelligence
Ils rationnaient les forts jugeaient les fous
Faisaient l'aumône partageaient un sou en deux
 Ils saluaient les cadavres
 Ils s'accablaient de politesses
VII
Ils persévèrent ils exagèrent ils ne sont pas de notre monde
VIII
 Les femmes les enfants ont le même trésor
De feuilles vertes de printemps et de lait pur
 Et de durée
 Dans leurs yeux purs
IX
 Les femmes les enfants ont le même trésor
 Dans les yeux
Les hommes le défendent comme ils peuvent
X
 Les femmes les enfants ont les mêmes roses rouges
 Dans les yeux
 Chacun montre son sang
XI
 La peur et le courage de vivre et de mourir
 La mort si difficile et si facile
XII
 Hommes pour qui ce trésor fut chanté
 Hommes pour qui ce trésor fut gâché
XIII
 Hommes réels pour qui le désespoir
 Alimente le feu dévorant de l'espoir
 Ouvrons ensemble le dernier bourgeon de l'avenir
XIV
 Parias la mort la terre et la hideur
 De nos ennemis ont la couleur
 Monotone de notre nuit
 Nous en aurons raison.

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