Fonds de tiroir


La « Tribune de Genève » nous a tartiné vendredi dernier un article sur les udécistes romands qui «convoitent la présidence du groupe UDC» au Conseil national : le Conseiller national vaudois Jean-Pierre Grin explique que comme le président du parti est alémanique, le chef ou la cheffe du groupe parlementaire (le plus important du Conseil national) devrait être romand. Or les Romands ne pèsent qu'un petit 10 % de ce groupe, et l'UDC reste un parti essentiellement alémanique (c'est grâce à sa force chez les Staubirnes qu'il est le premier parti de Suisse : chez les Welches, il n'est que la cinquième roue du char de la droite). Et puis, pour présider un groupe parlementaire important, il faut être « Arena compatible » : pouvoir causer en schwyzertütsch dans la table-ronde politique de la télé alémanique -et manque de pot, à part le jurassien bernois Manfred Bühler, les parlementaires fédéraux UDC romands ne causent pas tütsch. Et puis, en Romandie, l'UDC ne va pas fort : à Neuchâtel, elle est dans les choux, dans le canton de Vaud elle ne sait pas où elle est, en Valais elle est orpheline de Freysinger et à Genève  son espace politique est squatté par le MCG. C'est peut-être cette faiblesse même qui lui suggère de cultiver l'illusion que, ne pesant pas grand chose de ce côté de la Sarine, elle pourrait prendre du poids de l'autre côté en revendiquant une chefferie de groupe hors de sa portée. De la gonflette, rien que de la gonflette...

Le Grand Théâtre de Genève est dans la mouise. Plus précisément : le bâtiment historique de l'opéra genevois est dans la flotte, et du coup, la saison 2018-2019 de l'institution est dans l'incertitude, et la fondation du Grand Théâtre dans la crise. La nappe phréatique monte plus haut que prévu, le chantier de rénovation du bâtiment historique va prendre quatre mois de retard, l'ouverture de la saison prochaine ne pourra pas se faire sur la place Neuve mais devra se faire dans l'éphémère bâtiment de l'Opera  des Nations, où les productions prévues, budgétées, ne peuvent pas être accueillies : il faut renégocier les contrats des artistes et des metteurs en scène et les coproductions avec d'autres opéras, prévoir des dédommagements, revoir les calendriers des orchestres... « un pur cauchemar », pour le directeur du Grand Théâtre, Tobias Richter. Déjà que le Grand Théâtre devait compter avec les états d'âmes des parlementaires cantonaux et municipaux et avec les incertitudes de la « nouvelle répartition des tâches » en matière culturelle entre le canton et les communes, et sur ses conséquences sur le statut du personnel de l'institution, voila qu'il doit encore compter avec la flotte qui monte et la programmation qui descend. Il lui manque plus qu'un fantôme, à l'opéra genevois. Comment ça, y'en a un ? Ben alors, il pourrait pas faire quelque chose pour arranger la situation ? A quoi il sert, l'ectoplasme ?

Le syndicat UNIA dénonce à Genève l'« explosion » dans la construction des licenciements de travailleurs expérimentés, bénéficiant de condi-tions salariales et sociales liées à leur expérience et à leur ancienneté, et remplacés sitôt licenciés par des travailleurs intérimaires plus jeunes, moins bien payés, moins coûteux en assurances sociales et plus dociles, car non syndiqués. Selon le syndicat, certaines entreprises ont même créé leur propre agence d'emploi tempo-raire. Unia demande une limitation à 10 % de la proportion de travailleurs temporaires sur un même chantier. Au Conseil municipal de la Ville, une résolution de l'Alternative (soutenue par le MCG)  demande au Conseil administratif de ne passer de marchés qu'à des entreprises (sous-traitants compris) respectant la convention collective et n'employant pas plus de 10 % de temporaires dans leurs effectifs sur les chantiers. Le patronat, lui, nie qu'il y ait le moindre problème et se contente, par la voix du secrétaire  du syndicat patronal genevois, d'admettre que « partout des moutons noirs existent », mais qu'ils «masquent la réalité des faits». Et que les syndicats inventent un problème «pour faire passer d'autres revendications ». Et on est aussi priés de croire que s'il y a 110 entreprises d'intérim à Genève, qui emploient des milliers de personnes dans la construction, ça veut pas du tout dire qu'il y a des employeurs qui les utilisent. Elles sont là pour la galerie, les entreprises d'intérim. Quant aux témoignages recueillis par « Le Matin Dimanche » (célèbre organe syndical de désinformation bolchévisante) d'ouvriers cinquantenaires du bâtiment, licenciés pour être remplacés par des intérimaires,  on est priés de supposer qu'il ne s'agit que d'exceptions désolantes à la règle du «tout baigne sur nos chantiers». D'ailleurs, tout a toujours baigné sur les chantiers, à Genève (et ailleurs en Suisse), même qu'on se demande à quoi servent des syndicats de la construction, sinon à emmerder les gentils patrons.

Au lieu de coûter 1,4 million de francs comme annoncé pour arracher le soutien du Conseil fédéral, l'organisation des JO d'hiver en Suisse en 2026 coûtera au moins 2,4 milliards. Au moins. Du coup, le projet risque fort de sombrer devant le parlement : une majorité de députés et conseillers aux Etats udécistes et socialistes, et tous les Verts, s'y opposeront, ainsi qu'une partie du PLR. En fait, seul le PDC serait acquis au projet, quoi qu'il en coûte : le principal canton hôte, le Valais, est son bastion... L'ancien patron des CFF, Benediklt Weibel, met encore un peu de vinaigre dans la sauce en estimant que les 300 millions prévus pour la sécurité sont totalement insuffisants, et qu'il faudrait sans doute y consacrer deux ou trois fois plus. Quant à la garantie de déficit proposée par le Conseil fédéral, aucune limite ne lui a réellement été posée puisque le mécanisme envisagé ne contient aucun empêchement au dépassement du budget, la garantie évoquée par le gouvernement  (800 millions) risque fort d'ascender à des hauteurs imprévues.  On dira donc que le projet « Sion 2026 » a du plomb dans l'aile. Mais comme on sait que le tir aux pigeons est une pratique courante des coupoles du sport-pognon, genre CIO, UEFA, FIFA, on ne sera pas surpris qu'il soit aussi une discipline olympique.

Commentaires

Articles les plus consultés