Fonds de tiroir


On a bien aimé l'interview dans «Le Courrier» du 27 octobre du Prix Nobel 2017 de chimie, le Vaudois Julien Dubochet, professeur à l'Uni de Lausanne et Conseiller communal socialiste à Morges. A la question : « Avez-vous vécu des moments de solitude dans vos combats ? », il répond : « A l'Université, jamais. Par contre, au Conseil communal, oui ». Exemple : un débat sur l'introduction d'un impôt sur les grosses successions : « Il y a eu une très bonne discussion. Et paf : exactement cinquante-et-une voix de droite se sont élevées comme un seul homme. C'était la guerre. On ne peut pas les convaincre. Il faut lutter ». Ben ouais, faut lutter. Mais pour un Prix Nobel, peut-être que le Conseil communal de Morges est moins traumatisant que le serait le Conseil municipal de Genève. Plus loin, Julien Dubochet fait dans la nostalgie désabusée : « Mai 68, c'était une belle dégelée. Vous imaginez un mai 68 aujourd'hui ? Le étudiants qui ficheraient dehors les pontes d'un type d'éducation complètement gonflée ? ça serait intéressant que nos étudiants fassent la révolution et disent qu'ils n'y croient plus ? Non ? ». Rêveur. va...

A Genève, une table ronde organisée par le Conseil d'Etat avait réuni partis politiques, «partenaires sociaux» (syndicats et patronat) et communes en 2016 pour tenter, vainement, de dégager un consensus sur l'application cantonale de la réforme fédérale de la fiscalité des entreprises dans sa version RIE III. La réforme ayant été balayée par le peuple, le Conseil fédéral a remis l'ouvrage sur le métier à tisser des consensus et propose une nouvelle mouture de la réforme, baptisée PF17. Et du coup, le couvert a été remis sur la table ronde cantonale. Et le PLR, qui avait soutenu la réforme précédente, et avait donc été désavoué par les citoyennes et yens, appelle par la voix de son président, Alexandre de Senarclens, les candidates et candidats verts et socialistes au Conseil d'Etat à défendre la PF17 auprès de leurs partis et de leurs bases. Avec comme argument massue : « pour Genève, PF17 ne change presque rien par rapport à RIE III »... Ouais, ben c'est assez mal parti pour le large front de soutien à la réforme : on voit mal en effet pourquoi, sauf à vouloir vraiment faire plaisir au PLR il faudrait soutenir un projet qui ne « change presque rien » à un projet qu'on a combattu...

Un ancien cadre de la police genevoise, aujourd'hui à la retraite, est dénoncé pour des propos antisémites tenus sur Facebook (émissaire) : « pourquoi on en trouve de plus en plus (des obsédés sexuels genre Weinstein) chez les baptisés au sécateur ? Décidément, les crochus seraient des adeptes ou des addicts ! ». Commentaire de la cheffe de la police genevoise, Monica Bonfanti : «la police genevoise attend de ses collaborateurs un comportement irreprochable en et hors service ». Bon là, c'est raté, mais comme le Céline au petit pied a quitté la police depus huit ans, « il est donc entièrement respon-sable de ses propos et en assumera intégralement la teneur », vu que plus aucun rapprochement ne peut être fait entre les propos du retraité et la police. Circulez, y'a rien à voir, ni à lire, ni à entendre, le crétin, on le connaît plus.

Selon l'enquête suisse sur la santé, menée par l'Office fédéral de la santé publique, les Romands et les Tessinois (les « latins ») souffrent plus de dépression que les Alémaniques : 8,9% des « latins » en souffriraient, contre 5,5 % des Alémaniques. Et comme les femmes souffrent également plus de dépression (10,9 %( que les hommes (5,7 %), et les urbains plus (7 %) que les ruraux (5,4%), la conclusion tombe d'elle-même : les Welches, c'est rien que des gonzesses des villes (d'ailleurs, la population romande est plus urbaine que la population aléma-nique). Et les Staubirnes des vrais mecs de la campagne. Ouala. A moins que la différence entre Romands et Alémaniques, urbains et ruraux, femmes et hommes, ne tienne qu'à la propension ou à la réticence des un-e-s et des autres à confier leurs maux aux enquêteurs de l'OFSP ? Ou que certaines variables soient à la source de la différence ? Le taux de chômage, par exemple (plus élevé en Romandie et au Tessin qu'en Alémanie) ou le statut familial (les personnes vivant en couple sont proportionnellement moins nombreuses en Romandie que dans le reste de la Suisse) ? N'empêche, on a un coup de blues, là. Allez, on va s'en jeter un ou deux. Ou plus. Pour oublier qu'on déprime. Elles disent quoi, déjà, les statistiques de l'alco-olisme selon les régions linguistiques ?

L'Islande, on est d'accord, c'est pas une superpuissance (sauf du point de vue tellurique et vulcanologique), ça n'a que 340'000 habitants, c'est paumé en plein atlantique juste en dessous du cercle polaire, mais quand même : c'est là que la gauche a emporté la semaine dernière une de ses rares victoires électorales depuis longtemps, avec la majorité absolue des sièges du parlement (32 sièges sur 63, moins que le Conseil municipal de la Ville de Genève) pour une coalition rassemblant les Verts de gauche, les sociaux-démocrates, les progressistes et les pirates. Le parti de l'indépendance (droite) recule de quatre points et perd cinq sièges, les sociaux-démocrates en gagnent quatre, et le président Johannesson a demandé, jeudi 2 novembre, à Katrin Jakobsdottir, du Mouvement Gauche-Verts, de former le prochain gouverne-ment. Ouala. Vous nous direz qu'on se console avec peu, mais on s'en fout, on n'a pas besoin de grand chose de plus...

Le 24 septembre, après Nidwald et Zurich, Lucerne a rejeté, en votation populaire, une initiative populaire demandant la suppression de l'enseignement d'une langue « étrangère » à l'école primaire. L'initiative visait, évidemment, l'enseigne-ment du français, mais menaçait tout autant celui de l'anglais, puisque le Conseil d'Etat avait averti que s'il devait choisir entre une langue réellement étrangère (l'anglais) et une langue nationale (le français), il choisirait de garder la langue nationale. Parce que c'est une langue nationale. C'est bien, de temps en temps, de le rappeler à la Schweiz profonde.

La Suisse a trouvé un bon moyen de gonfler le pourcentage de son revenu national brut qu'elle affecte à la coopération au développement : elle y intègre une partie des dépenses liées à la politique d'asile. Ainsi, quand elle annonce qu'en 2016, elle a consacré 0,54 % du RNB à l'aide au déve-loppement, elle donne l'impression que faire mieux que la plupart des autres pays développés (0,32 % en moyenne en 2016) et de s'approcher de l'objectif des 0,7 %... sauf que près d'un cinquième des dépenses d'aide aux réfugiés ont été comptabilisées dans l'aide au développement : c'est 681 millions qui gonflent opportu-nément la statistique. Y'en a point comme nous. Ou presque.

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