Réforme du système des retraites : Désaccord à corps


Le 27 octobre, le Conseiller fédéral Alain Berset réunissait 27 protagonistes de la campagne sur son défunt projet de réforme du système de retraite : les partisans de gauche et les opposants de gauche, les opposants de droite et les partisans de droite, ceux qui veulent repousser l'âge de la retraite et ceux qui le refusent, ceux qui veulent une réforme globale et ceux qui veulent une réforme saucissonnée. Résultat selon Alain Berset lui-même : "il y a désaccord sur presque tous les points", et selon l'ATS, un peu plus euphémique : "Il n'y a pas de convergence de vue sur les contours d'une future réforme. Le seul constat partagé à été celui de la nécessité d'agir". Faut faire quelque chose. Oui, bon, d'accord, mais quoi ? Il faut un financement additionnel pour l'AVS afin de maintenir le niveau des rentes. Oui, bon, d'accord, mais quel  financement additionnel ? une hausse des cotisations, une hausse de la TVA, un déplafonnement de l'impôt fédéral direct ? un report  à 65 ans de l'âge de la retraite des femmes ? un report de l'âge de la retraite de tout le monde à 66 ans ? à 67 ans ? Et le 2e Pilier, on en fait quoi ? On le renforce, on le renfloue, on le fusionne avec le premier ? "tous les points sont ouverts sur la table", a résumé Alain Berset. La table ? Disons : l'établi...

"Etre charitable ne suffit pas, il s'agit désormais d'être juste"

Que pouvait-il sortir de la "table ronde" organisée par Alain Berset vendredi dernier, sinon le constat que, sur l'essentiel, les fronts politiques sont restés ceux qu'ils étaient à la veille du vote du 24 septembre : la droite veut toujours repousser d'un an l'âge de la retraite des femmes, ce à quoi la gauche de la gauche (et même le PSS et l'USS si une compensation importante sur l'AVS, n'est pas proposée) s'oppose. En revanche, presque tout le monde semble accepter une hausse prudente de la TVA. Seul petit frémissement : le PDC semble avoir rejoint le camp de la droite (PLR, UDC), à quelques états d'âme près. Quant au 2e pilier, la plupart des acteurs du débat acceptent une baisse du taux de conversion du capital en rentes (il pourrait passer  6 %,. soit ce qui était proposé dans la réforme refusée le 24 septembre). Et puis ? Et puis, pas grand chose. On a renoncé à une réforme ambitieuse (on y avait de toute façon déjà renoncé avec le PV2024), on renoncera très certainement à une réforme conjointe du premier et du deuxième pilier, et il n'y a guère que la gauche de la gauche (JS et socialistes genevois compris, sans doute, pour le plus grand plaisir du PS suisse et de son président) pour proposer de fusionner l'AVS et la Prévoyance professionnelle dans une seule grande assurance-vieillesse solidaire, fondée sur la méthode de la répartition (les actifs paient pour les retraités, pas pour eux-mêmes), et garantissant à elle seule un niveau de vie digne après la cessation de l'activité professionnelle.

D'aucuns, à droite, font mine de vouloir boucler rapidement un nouveau projet, ne portant que sur l'AVS, en attendant de s'attaquer à la prévoyance professionnelle (les caisses de pension sonnent l'alarme). Rapidement ? tout est relatif : on évoque alors la fin de l'actuelle législature fédérale, en 2019. Une bonne idée, ça, de présenter au peuple, juste avant les élections, un projet de réforme des retraites qui, s'il péjore la situation des retraités actuels, ou celle des futurs retraités, ce qu'un projet ressemblant aux intentions de la droite ne manquera pas de faire (elle tient mordicus au report d'un an de l'âge de la retraite des femmes, avec ou sans susucre compensatoire), s'attirera à tout coup un refus populaire. Il faut bien en effet rappeler que si une majorité de citoyennes et de citoyens ont refusé le précédent projet de réforme du système des retraites, PV2020, c'est que les jeunes, les femmes et les bas salaires se sont mobilisés contre. Et que le report de l'âge de la retraite des femmes a été déterminant dans cette mobilisation, lors même qu'il s'accompagnait d'une hausse des rentes (les fameux 70 francs mensuels supplémentaires honnis par la droite). Et que l'inégalité des salaires et des rentes entre femmes et hommes dans le 2e pilier (63 % d'écart, alors qu'il n'y en a que 3 % dans l'AVS) ne va pas disparaître dans les deux ans. Et qu'à gauche, plutôt qu'un replâtrage du système actuel, on envisage une véritable réforme : la fusion du premier et du deuxième pilier. Au terme de sa "table ronde" de vendredi, Alain Berset a confié : "la rencontre a été intéressante, j'ai pris 17 pages de notes manuscrites". Elles ne lui seront certainement pas inutiles. On lui en souffle même une petite de plus. Une citation d'Emile Zola, écrite à l'imparfait et qu'on peut mettre au présent  : "Etre charitable ne suffit pas, il s'agit désormais d'être juste"





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