Organiser les JO d'hiver 2026 en Suisse ? Le Jeu des Chaises Musicales, discipline olympique


Le président du comité de candidature du Valais (et de quelques autres cantons) pour l'organisation des Jeux Olympiques d'hiver 2026 ("Sion 2026"), l'avocat d'affaire lausannois Jean-Philippe Rochat, figurait, par son cabinet d'avocat, dans les "Panama Papers" (des documents puisée dans les archives du cabinet Mossack Fonseca, sur plus de 200'000 structures "offshore" administrées par l'officine panaméenne, et décrivant une vaste entreprise de fraude, de soustraction et d'"optimisation" fiscales). Il se défendait dans un communiqué d'avoir fait quoi que ce soit d'illégal (la fraude et la soustraction sont illégales, pas l'"optimisation", qui consiste à trouver le moyen de payer le moins d'impôt possible tout en restant dans les clous), mais comme l'écrivait la "Tribune de Genève", "à l'heure où le projet olympique vient d'obtenir un milliard de francs de soutien de la Confédération, de telles pratiques tombent mal". Encore plus mal que le poing de Christian Constantin (ancien vice-président du comité de candidature) dans la gueule d'un type qui lui déplaisait -Constantin, lui aussi, avait été poussé vers la sortie après avoir balancé son gnon. Et n'avait pas manqué l'occasion, une fois rendue publique la présence de Rochat dans les "Panama Papers", de lui adresser cette flèche du Parthe : "demander de l'argent public alors qu'on défend l'optimisation de fonds privés, ce n'est pas compatible. En termes d'images, c'est dévastateur". Résultat : Jean-Philippe Rochat, lui aussi poussé vers la sortie, s'est retiré de la présidence du comité de candidature "Sion 2026" et y a été remplacé par l'UDC zurichois Jürg Stahl, certes président de "Swiss Olympic", mais dont le parti est plutôt opposé à l'organisation de JO d'hiver en Suisse. "Swiss Olympic" annonce que "la candidature suisse aux jeux olympiques d'hiver 2026 entre dans une nouvelle phase". Comme la lune quand elle décroît ? Si les promoteurs de l'importation en Suisse des JO d'hiver se mettent eux-mêmes à décrédibiliser leur projet, la Suisse a peut-être une chance d'y échapper.

Plutôt sortir de la monoculture touristique que s'y adonner plus encore

Pour le directeur (en partance) de Suisse Tourisme, organiser les JO d'hiver sont "une chance immense à saisir"... pour montrer qu'on est capables de les organiser. On ne voudrait pas faire de la peine à Jürg Schmid, mais cet argument est idiot :la question n'est pas de savoir si la Suisse est capable d'organiser des JO d'hiver (nul ne doute qu'elle en soit capable), elle est de savoir s'il y quelque raison pertinente de le faire, que cette raison soit économique, sportive, symbolique ou de quelque autre nature que ce soit. Pour le Conseiller fédéral Guy Parmelin aussi, justifiant le soutien (pour un milliard de francs) du Conseil fédéral à la candidature "Sion 2026", l'organisation de JO en Suisse "est une chance pour le pays" -mais lui au moins tentait d'en donner quelques raisons raisonnables (on passera sur le "effets positifs sur la cohésion nationale", dont on ne voit pas quels pourraient-ils être), dont le "développement des régions de montagne". Par des JO d'hiver, quand l'enjeu pour ces régions serait plutôt de sortir de la monoculture touristique que de s'y adonner plus encore ?
Le Conseiller national Mathias Reynard, socialiste valaisan trouvait "choquante" la facilité avec laquelle le Conseil fédéral a pu trouver "un milliard pour des jeux" alors que le même jour, le même Conseil fédéral s'opposait à un congé paternité "parce qu'il coute trop cher" et qu'on prévoit des coupes budgétaires de 200 millions dans la formation. "Si on n'a pas d'argent pour la formation, alors on n'en a pas pour des jeux", résumait le socialiste.
Serait-ce pour n'avoir pas à justifier cet étrange "deux poids, deux mesures" que les promoteurs des JO en Suisse, et le Conseil fédéral lui-même, rechignent (pour user d'un euphémisme) à soumettre leur projet au vote populaire, et pas seulement en Valais ou dans les autres cantons organisateurs, mais dans toute la Suisse, puisque toute la Suisse le paiera, ce milliard (au moins) si, malgré tous les boulets qu'il traîne, le projet devait se réaliser ? "Si les porteurs du projet n'ont pas peur de la sentence populaire, qu'ils s'y soumettent", écrivait en édito, en octobre dernier, le correspondant à Berne de la "Tribune de Genève"... Le "si..." dubitatif, s'impose, de toute évidence...


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