Recyclage de la réforme de l'imposition des entreprises : Bis Repetita


La Communauté genevoise d'action syndicale, qui réunit tous les syndicats genevois, jusqu'à celui de la police, est très claire : que le projet fédéral ou cantonal de réforme de l'imposition des entreprise ait changé de nom, passant de "RIE III" à "PF17", importe peu : si son contenu ne change pas profondément, la CGAS lancera les référendums contre le recyclage du projet fédéral et contre son volet cantonal, tant qu'ils entraîneront des pertes fiscales pour les collectivités publiques et une détérioration des prestations à la population. C'était déjà la raison pour laquelle les syndicats avaient été, avec le PS suisse, en première ligne du combat, victorieux, contre la RIE III fédérale le 12 février dernier. Le nouveau projet fédéral et son volet cantonal risquent donc fort de se retrouver face à une opposition tout aussi déterminée que celle qui mit à bas leurs premières moutures, d'autant que s'il a été revu sur certains points (il renonce par exemple à la "déduction des intérêts notionnels", le projet fédéral contient toujours des éléments (la "patent box", les déductions fiscales pour la recherche et le développement, par exemple) contestables, et que le volet cantonal proposé par le Conseil d'Etat fixe le nouveau taux d'imposition des entreprises à un niveau "vaudois" trop bas (13,8 %). Les syndicats ne contestent nullement l'objectif avoué de la réforme, c'est-à-dire l'établissement d'un taux d'imposition unique pour toutes les entreprises, et donc la fin du privilège jusqu'alors accordé aux multinationales. Mais ils contestent fermement l'usage de cet objectif comme un prétexte pour faire de nouveaux cadeaux à toutes les entreprises, pouvant aller jusqu'à 70 % d'allègements fiscaux, au détriment des finances et des prestations publiques -et donc de l'ensemble de la population, mais surtout de sa part économiquement la plus modeste.
De RIE III à PF17, les enjeux n'ont pas changé, les menaces non plus
A Genève, une table ronde organisée par le Conseil d'Etat avait réuni partis politiques, "partenaires sociaux"(syndicats et patronat) et communes en 2016 pour tenter sans succès de dégager un consensus sur l'application cantonale de la réforme fédérale de la fiscalité des entreprises dans sa version RIE III. La réforme ayant été balayée par le peuple, le Conseil fédéral a remis l'ouvrage sur le métier à tisser des consensus improbables, et propose une nouvelle mouture de la réforme, baptisée PF17. Et du coup, le couvert a été remis sur la table ronde cantonale qui avait été desservie après le refus de la RIE III tant à Genève qu'au plan suisse.. Et le PLR, qui avait soutenu la réforme précédente, et avait donc été désavoué par les citoyennes et yens, appelle par la voix de son président, Alexandre de Senarclens, les candidates et candidats verts et socialistes au Conseil d'Etat à défendre la PF17 auprès de leurs partis et de leurs bases. Ce qu'ils avaient d'ailleurs déjà fait sans succès l'année dernière, alors qu'ils n'étaient encore candidates et candidats qu'à la candidature. Il est vrai que si l'argument massue qu'ils devraient avancer est celui que Alexandre de Senarclens  fournit aux entreprises (dans la "Tribune de Genève du 17 octobre), "pour Genève, PF17 ne change presque rien par rapport à RIE III", c'est assez mal parti pour le large front de soutien à la réforme : on voit mal en effet pourquoi, sauf à vouloir vraiment faire plaisir au PLR et à son président, il faudrait soutenir un projet qui ne "change presque rien" à un projet qu'on avait combattu... et qui, en fixant à Genève un taux d'imposition à 13,8 % pour participer à la concurrence fiscale lancée par le canton voisin, pourrait faire perdre un demi-milliard aux collectivités publiques genevoises (le canton et les communes).
Début 2018, la commission fiscale du Grand Conseil genevois redémarrera ses travaux sur la réforme fiscale. Les enjeux n'ont pas changé, les menaces non plus. Et si le projet cantonal ne change pas, les fronts ne changeront pas non plus, ni sans doute le résultat en votation populaire : ce sera "non".

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