Election du gouvernement genevois : Deux tiers d'abstention ?


Mercredi soir à minuit, à quatre jour du scrutin, le taux de participation au deuxième tour de l'élection du Conseil d'Etat stagnait misérablement à 16,7%. Parti comme c'est parti, on devrait avoir deux tiers d'abstention. Il est désormais trop tard pour voter par correspondance. Si comme apparemment beaucoup de Genevois vous n'avez reçu votre bulletin de vote qu'aujourd'hui, il va falloir vous rendre au local de vote de votre quartier ou de votre commune, dimanche matin de dix heures à midi. Et si vous ne l'avez pas reçu du tout, ce matériel, comme l'auteur de ces lignes à l'heure où il les écrit ? Vous revêtez une robe de bure, vous prenez un cierge, vous vous couverez la tête de cendres et vous vous rendez au service des votations et élections supplier qu'on vous donne le moyen d'exercer votre droit de vote -après vous être platement excusé de vouloir l'exercer, ce droit ?

A quoi sert un gouvernement ? A gouverner ? Non : à proposer

Au moment où on se demande à quoi sert une élection à laquelle les deux tiers des électeurs et des électrices s'abstiennent de participer, on peut glisser cette autre question : à quoi sert un gouvernement, et plus précisément, puisque c'est de lui qu'il est question et que c'est lui qui va être élu dimanche, à quoi sert un gouvernement cantonal ? On pourrait évidemment répondre : "à gouverner", mais-t-on besoin d'être "gouvernés" ? On peut aussi répondre, avec Bakounine, qu'un gouvernement ne sert à rien d'autre qu'à opprimer -ou plutôt, à rien d'autre qu'à sans cesse renforcer son propre pouvoir, même lorsqu'il est élu par "le peuple" ou une fraction du "peuple". On pourra agréablement lire à ce propos la petite brochure (téléchargeable sur https://www.fichier-pdf.fr/2018/05/04/bakounine-ours/) que l'Anar russe, se faisant passer pour un "Suisse humilié et désespéré", fit paraître en 1870 pour régler quelques comptes avec la Suisse et sa prétention, après la révolution radicale, à être une démocratie modèle. Rappelons seulement que pour lui, les seules élections légitimes, et donc les seuls parlements et gouvernements légitimes, étaient les élections municipales.

Laissons Bakounine, et à la question "à quoi sert un gouvernement" répondons, plus posément que lui, qu'un gouvernement sert, ou peut servir, à faire au parlement (le nôtre a été élu le mois dernier) et au peuple des propositions. Dont certes, en démocratie, le parlement ou le peuple font ou peuvent faire ce qu'ils veulent, mais dont la pertinence, l'utilité, la cohérence, sont la mesure de celles du gouvernement. Et cela renvoie aux enjeux d'une législature, et on connaît déjà une bonne partie de ceux de la législature genevoise qui va s'ouvrir : la traversée routière du Petit Lac, l'imposition des entreprises, la répartition des tâches entre le canton et les communes (non, ce chantier n'est pas terminé), la politique des transports, la politique sociale, l'école... Autant d'enjeux sur lesquels on est en droit d'attendre qu'un gouvernement soit capable de proposer autre chose que la vision boutiquière du gouvernement sortant. De droite, le gouvernement sortant.
C'est de cette attente "d'autre chose" que naît celle d'un changement de majorité gouvernementale -en clair : d'une majorité de gauche.

Alors, que celles et ceux qui n'ont pas encore voté et qui ont reçu leur matériel de vote en fassent bon usage dimanche matin.

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