14 juillet, fête de la révolution "en soi" et "pour soi"


Le meilleur et le pire
Dans le calendrier pataphysique, le 14 juillet, c'est la Fête du Père Ubu. Dans le nôtre, c'est celle de la Révolution. Même pas de la révolution française, mais de la révolution"en soi et "pour soi". La Révolution majuscule, paradigmatique. En un temps où servi à toutes les sauces le mot même de « révolution » semble ne plus rien signifier qui importe, parce qu’il a été plus souvent utilisé pour désigner ce qui trahissait l’idée même de révolution que pour désigner la révolution elle-même, il faut bien commencer par rappeler ce qu’elle est, et en quoi nous sommes désormais si peu nombreux à croire encore : un bouleversement de la politique, des institutions et des rapports sociaux. Et un bouleversement pour le meilleur, non pour le pire.

 « Jusqu'à présent, les révolutionnaire n'ont fait que prendre le pouvoir; il s'agit maintenant de l'abolir »


L’exigence de la révolution naît de la nécessité d’affronter la réalité : Spinoza professait déjà que la philosophie et la politique étaient nécessaires contre la réalité, parce que la réalité n’est que servitude et violence. La servitude, c’est le salariat et la propriété privée. La violence, c’est l’Etat.  La révolution étant le projet de « ramener sur terre la foi en l’impossible » (comme Edouard Quinet le disait de la révolution française), est révolutionnaire toute organisation et toute volonté, individuelle ou collective, mais seulement cette organisation et cette volonté, qui se donnent pour but l’abolition de l’Etat, du salariat et de la propriété privée, et traduisent cette volonté en actes. Il importe dès lors assez peu que cette transformation radicale se fasse par une révolution (un moment révolutionnaire) ou une réforme radicale (un processus révolutionnant) aboutissant au même résultat en prenant un peu plus de temps, si l’hypothèse d’une réforme radicale aboutissant au même résultat qu’une révolution n’était obstinément révoquée par les faits tant que cette réforme accepte de se tenter dans le respect des institutions existantes. Si elle ne s’y contraint pas, le processus révolutionnant vaut le moment révolutionnaire.


Depuis la victoire de la révolution bourgeoise, plus aucune révolution n’a vaincu. C’est que la mesure même de la victoire ou de la défaite de la révolution a changé : il s’agissait en 1789 de renverser le pouvoir d’une classe, et les institutions qui matérialisaient ce pouvoir, pour lui substituer le pouvoir d’une autre classe, avec les institutions le matérialisant. Il ne s’agit plus désormais pour une révolution de substituer une classe à une autre, d’installer un pouvoir à la place d’un autre, mais d’abolir les classes, et de se passer des pouvoirs. Ou, comme nous invitait Michel Foucault, de ne plus se demander « comment on nous gouverne » mais « comment nous gouverner nous-mêmes ».


Ne vouloir qu’être maître à la place du maître, c’est se contenter d’un changement de maître. Ne vouloir qu’être « comme le maître » pour posséder ce que le maître possède, c’est rester domestique -et esclave envieux. Jusqu'à présent, les révolutionnaire n'ont fait que prendre le pouvoir; il s'agit maintenant de l'abolir.

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